TÉMOIGNAGE. J’ai tout prévu pour partir à la retraite avant 50 ansAdobe Stock
A 27 ans, Sonia n'a qu'un projet en tête : arrêter de travailler le plus tôt possible. Elle a un plan solide, qu'elle nous expose, point par point.
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Il y un an, Sonia se réveille, comme tous les matins, et la perspective d’une nouvelle journée de travail lui plombe le moral. "Ça n'était pas la première fois que je me levais sans avoir envie d'aller travailler, j’en avais marre. Et pourtant, je fais un job qui me plait, dans le marketing, avec une belle équipe. Mais je voulais profiter de ma vie.”, nous raconte t-elle.

L’idée, au départ, lui vient alors comme une blague : elle veut prendre sa retraite dans 20 ans. “J’avais 26 ans, et je me suis dis : à 47 ans, je ne travaillerai plus”. 

Deux jours plus tard, elle tombe sur un témoignage en ligne. “Dans un groupe sur l'argent, un homme parlait de Liberté 45, un livre de Pierre-Yves McSween, qui explique comment atteindre la liberté financière à 45 ans. Ça a vraiment résonné en moi, par rapport à la réflexion que je m’étais faite quelques jours plus tôt”. 

“Maximiser mes finances et mettre le plus de côté”

Sonia finit par acheter le livre, et le dévore. L’ouvrage détaille le plan “VEI” pour Valeur, Epargne et Investissement, les trois étapes à suivre pour prendre sa retraite plus tôt.

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Côté “valeur”, il préconise d’investir sur soi-même, pour devenir un candidat idéal, en multipliant les formations dans des domaines qui recrutent. La partie “épargne” apprend à mettre de côté “au minimum 15% de son salaire”, explique Sonia. “Il faut être capable d’aller chercher des salaires de plus en plus importants, tout en n’augmentant pas ses dépenses afin de pouvoir épargner massivement, et avoir un pourcentage d’épargne de plus en plus important”, résume-t-elle. 

Enfin, sur l’investissement, le système encourage à trouver les meilleurs placements pour faire fructifier son épargne, plutôt que de laisser dormir sur des comptes qui ne rapportent rien

“Depuis le début de la pandémie, je me suis penchée sur mes finances, et j'ai fait un document excel, que j'ai bonifié depuis, et qui me permet de faire un suivi de toutes mes dépense s, d’établir un budget, et de pouvoir tout de suite épargner de façon importante, car j’ai aussi la chance d’avoir un bon salaire en ce moment. Donc, j’étais déjà dans une approche où je souhaitais maximiser mes finances et mettre le plus de côté”, explique Sonia, qui s'enthousiasme alors pour ce système.

“Prendre mon destin en main”

Car la jeune femme n’a pas toujours connu la sécurité. Elle a même plutôt traversé quelques galères. “A 19 ans, j'ai souscrit un prêt étudiant de 32 000 euros pour venir au Canada, que j’ai dépensé en un an et demi, sans gérer mes dépenses. Donc dès la deuxième année d’études, j’ai dû me mettre à travailler beaucoup”, confie la jeune femme. A l’époque, elle gagne 800 dollars par mois (585 euros), à peine de quoi couvrir ses charges. “C’était assez difficile pendant deux ans”.

Au bout de trois ans, elle doit commencer à rembourser son prêt, à raison de 900 dollars canadiens (650 euros) par mois. “Entre ça, le loyer et les charges, il ne me restait plus grand-chose à la fin du mois. Si je n’avais pas eu de carte de crédit, je ne m’en serais jamais sortie”, souffle Sonia. 

A l’époque, elle met ses rêves de voyage et d’appartement de côté. “Cette astreinte financière me fait, encore aujourd'hui, sentir comme si j’avais pris un certain retard pour construire mon patrimoine”. 

Il y a quelques mois, Sonia finit enfin par rembourser son prêt entièrement. “J’ai voulu, dès lors, ne plus refaire les mêmes erreurs. Et surtout, j’ai senti une forme de liberté : enfin, je n’étais plus obligée de garder un job à temps plein.” Pour autant, Sonia sait qu’elle s’en sortirai difficilement, pour le moment, sans travail. “Mais ce qui est sûr, c’est que je veux prendre ma retraite plus tôt, prendre mon destin en main”.

“Peu importe ce que dit l’Etat, je n’ai pas besoin de lui” : les avantages et les inconvénients de la retraite avant 50 ans

Pour Sonia, la retraite avant 50 ans présente de nombreux avantages. “C’est surtout l'indépendance financière qui m'intéresse. Ça ne veut pas dire que je ne vais plus travailler, mais que je n'aurai plus besoin de travailler. Pour cela, il faut acquérir suffisamment de patrimoine, pour que mes intérêts deviennent mon revenu.” 

Pour l’heure, la jeune femme ne sait pas encore à combien s’élevera la “pension” qu’elle se versera elle-même au délà de 45, 50 ans. Mais elle est confiante, et pleine de motivation. 

Car arrêter de travailler aussi tôt, c’est surtout l’occasion pour elle de "profiter de sa vie, pendant qu’on est encore en pleine forme, et de ne pas attendre 65 ans pour faire les projets, que toute ta vie, tu te dis que tu feras à la retraite. Car Dieu sait dans quel état on sera à ce moment-là…” explique la jeune femme. 

Deuxième avantage, non négligeable pour Sonia : ne pas dépendre des institutions. “C’est rassurant, et même nécessaire, car quand on voit la direction que prend le système, on peut s’attendre à des retraites de plus en plus maigres. Et surtout quand on voit les projets de réforme, comme celui de Macron qui veut repousser l’âge à 65 ans... Moi, je veux pouvoir me dire “je peux partir quand je veux, peu importe ce que dit l’Etat, je n’ai pas besoin de lui”.

En revanche, un tel système comprend évidemment quelques sacrifices. Pour Sonia, il ne convient pas aux carriéristes, par exemple. “Si l’on veut aller loin dans sa carrière, grimper les échelons, c’est difficile quand on s’arrête de travailler tôt”. Elle fait la différence entre ceux pour qui “travailler, c’est toute leur vie” et les autres, pour qui leur emploi est avant un “gagne-pain”.

“Et puis, il faut avoir un tas de projets en tête, conseille-t-elle, pour ne pas s'ennuyer une fois la retraite venue.”

Les aléas de la vie, peuvent aussi changer la donne, selon la jeune femme. “On peut avoir des problèmes de santé, ou des aléas matériels, qui font qu’on va devoir liquider une partie de notre épargne, et ça peut ruiner le plan.”

“Une dizaine de comptes épargne” : le plan de Sonia pour partir à la retraite avant 50 ans

Pour arrêter de travailler à 45 ans, “50 ans maximum”, précise Sonia, elle a tout prévu. Elle s’inspire de la méthode VEI, mais aussi du mouvement FIRE, né aux Etats-Unis, qui consiste à mettre de côté 70% de son salaire. 

“Depuis la fin de l'année 2012, c'est-à-dire, depuis que j’ai remboursé mon prêt, je me suis donnée des objectifs d'évolution de valeur nette de mon patrimoine, parce que quand on est jeune, on notre taux d’épargne doit aller crescendo”. Elle s’est fixée des objectifs mensuels et annuels, et traque absolument chaque dépense, chaque centime épargné, dans un tableur excel “sacré”. 

"Je ne suis pas la plus économe, j’aime dépenser sur la nourriture, faire du shopping, mais comme tout est fixé, je sais à quel moment je dois ralentir et comment je peux équilibrer tout cela à la fin du mois”, explique Sonia, pour qui ce système représente tout de même “beaucoup d’organisation”

En tout et pour tout, elle possède une dizaine de comptes épargne, et cinq comptes épargne investissement (cryptomonnaires, trading, immobilier…).

Ces différents comptes épargne ont chacun un but précis : un pour les dépenses fixes, un compte voyages, un compte “famille et amis”, un compte pour les urgences, un compte pour financer l’année sabbatique qu’elle compte s’offrir bientôt, un compte pour payer ses impôts, et  un compte pour les loisirs, le shopping… 

“Dès que j'ai ma paie, je sais combien je vais mettre dans chacun des comptes”, explique t-elle, ajoutant que tous les mois, 40 à 45% de son salaire est ainsi investi à long terme. 

“Malheureusement, ce système n’est pas accessible à tous. Il faut avoir un certain salaire pour pouvoir épargner autant. J'ai de la chance de pouvoir le faire”. 

Pour épargner assez, il faut aussi beaucoup travailler, pour engranger un maximum de capital à réinvestir ensuite. “En plus de mon salariat, je travaille aussi en tant que freelance. Donc oui, il y a des sacrifices à faire de temps en temps, car à terme on va passer moins de temps avec ses amis, en famille, on va devoir faire l’impasse sur un voyage ou une sortie…”.

Il faut aussi être déterminé. “Je me dis que le moi d’aujourd’hui met de côté pour le moi du futur. Je ne suis pas prête à tous les sacrifices, mais presque. Je réduis les sorties, je ne fais qu’un seul voyage par année, je limite les transports… Mais je sais que l'issue en vaut la peine, car dans 20 temps, quand tous mes amis s'échineront encore à la tâche, je pourrais, moi, me reposer et faire de super projets.” 

Planifier la retraite à 50 ans : les conseils de Sonia

En s’arrêtant de travailler aussi “tôt”, Sonia n’a pas peur de s'ennuyer, encore moins que son travail lui manque. “La routine, et la strucutre du monde du travail ne vont clairement pas me manquer”, affirme la jeune femme. “En revanche, je pourrai très bien travailler bénévolement pour des ONGs, faire des voyages humanitaires, me rendre utile et faire quelque chose en alignement avec mes valeurs”. 

Elle s’est beaucoup renseignée en ligne pour établir sa stratégie. “Il y a beaucoup de comptes sur les réseaux sociaux, de podcasts et de sites sur internet qui vulgarisent la budgétisation et les systèmes financiers. Par exemple, The Financial Samouraï, Plan Cash, ElleInvestit…” 

Pour Sonia, il est impératif d’aller chercher les infos soi-même. “Les programmes scolaires et les institutions ne nous apprennent absolument pas à épargner et à investir tôt, alors que c’est très important”, souffle la jeune femme. Les femmes, en particulier, sont bien moins armées pour affronter le monde de l’argent et se créer un patrimoine. “Quand je m’en suis rendu compte, ça m’a révoltée. J’ai alors créé un groupe d’entraide et de littérature financière avec des amies, à qui je donne quelques conseils.” 

Dans tous les cas, s’entourer de personnes qui nous poussent, qui nous comprennent, et peuvent nous aider, “ça aide aussi beaucoup”, conclut Sonia.