De l'urine qui fait pousser des légumes : en quoi consiste ce projet écologique ? Istock
Le premier point de collecte volontaire d'urine en France a été inauguré le 18 septembre. Ce projet s'inscrit dans une démarche écologique ambitieuse qui vise à transformer un "déchet" du quotidien en ressource utile pour l'agriculture. Mais de quoi s'agit-il exactement ?
Sommaire

Et si notre urine pouvait sauver la planète ? À Châtillon dans les Hauts-de-Seine, une initiative audacieuse vise à transformer ce besoin quotidien en un bienfait pour l’agriculture

Une initiative pour réduire les engrais chimiques

Le projet EnVille, acronyme pour "engrais humain des villes", a pour objectif de valoriser l'urine en la transformant en engrais naturel pour l'agriculture. Cette alternative permet de réduire l'utilisation des engrais chimiques polluants. Financé à hauteur de 50 000 euros par l'Agence de la transition écologique (ADEME), ce programme a été mis en place par l'École nationale des Ponts et Chaussées dans le cadre de son programme OCAPI (Optimisation des cycles alimentaires par l’innovation).

Le point de collecte inauguré à Châtillon permet aux habitants de déposer leur urine dans une cuve de 300 litres. Depuis janvier 2024, 15 foyers de l'Association pour le maintien d'une agriculture paysanne locale (Amap)  ont déjà contribué à cette collecte, qui sert aujourd'hui à fertiliser les champs de la région.

Le système est conçu pour être simple : les donneurs reçoivent des bidons adaptés à leur morphologie, et une fois remplis, les déposent au point de collecte sans aucune nuisance (ni odeur, ni désagrément). L’urine est ensuite stockée pendant six mois pour être utilisée comme engrais sur des haies ou des cultures agricoles.

Le retour d'une vieille pratique 

Cette initiative n'est pourtant pas révolutionnaire ; au contraire, elle remonte à plusieurs siècles. En effet, jusqu'au milieu du XXᵉ siècle, cette pratique était courante en France avant d'être abandonnée avec l'apparition des engrais chimiques. Fabien Esculier, fondateur du programme OCAPI, rappelle d'ailleurs que "la dernière usine de transformation d’urine a fermé en 1975", auprès du Parisien. D'après lui, ce projet remet au goût du jour des solutions qui ont fonctionné pendant des des lustres.

Les avantages de l'urine comme engrais

Contrairement aux engrais chimiques qui nécessitent des ressources fossiles , l'urine est une ressource naturelle riche en nutriments comme l'azote, le phosphore et le potassium. En l'utilisant, on évite également de polluer les cours d'eau. De plus, le processus de collecte permet d'éliminer les éventuels résidus de médicaments présents dans l'urine grâce à l'augmentation du pH. 

Un autre avantage majeur est que l'urine comporte très peu de risques biologiques. "Contrairement aux matières fécales, les maladies ont du mal à se transmettre par l'urine, ce qui en fait un produit plus sûr pour l'agriculture", explique Louise Raguet, designer et porteuse du projet, au journal Le Parisien.

Un projet prometteur pour l’avenir

Si ce système était adopté à grande échelle à l'avenir, il pourrait avoir un impact considérable. En effet, rapporte CNews, si chaque Français contribuait à ce projet, cela permettrait de fertiliser 15 % des cultures nationales. En d'autres termes, les urines d'une seule personne pourraient suffire à fertiliser 500 m² de champs par an.

La mise en place progressive de ce type de collecte, tout comme les composteurs de déchets alimentaires, a pour but de s'intégrer progressivement dans la vie quotidienne des Français. "La transition écologique ne passe pas forcément par des solutions très compliquées ", mais par des technologies simples et accessibles, affirme Fabien Esculier au journal parisien.