Droits de succession héritage réduction impôtsIllustrationIstock
Dans un contexte où la situation des finances publiques est "extrêmement" grave a déclaré le Premier ministre Michel Barnier, qui envisage d'augmenter les impôts de certains contribuables, d'autres vont au contraire peut-être bénéficier d'une baisse : les héritiers. La Cour des comptes vient de rendre un rapport dans lequel elle envisage une baisse des droits de succession, taxe mal-aimée des Français.
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Augmenteront, augmenteront pas ? Les impôts sont depuis plusieurs jours au centre du débat politique. Le Premier ministre Michel Barnier avait dans un premier temps déclaré qu'une hausse était envisageable.

Puis, repris vraisemblablement par Emmanuel Macron, il a précisé qu'il n'y aurait pas de hausses "pour ceux qui travaillent". L'hypothèse actuelle serait plutôt de taxer les entreprises les plus riches à hauteur de 33% contre 25%. Le rétablissement de l'ISF (Impôt de solidarité sur la fortune) semble écarté.

Mais Michel Barnier, lors d'un discours donné samedi 28 septembre au congrès des sapeurs-pompiers, à Mâcon, n'a pu que constater : "jamais un Premier ministre, depuis 60 ans, n'a été contraint de présenter un budget en 15 jours et ce que je trouve, je le dis sans polémique, est extrêmement grave."

Une baisse des droits de succession en envisagée mais...

Commandité par le président de la commission des finances de l’Assemblée nationale Eric Coquerel (LFI), un rapport publié le 25 septembre par la Cour des comptes a pourtant émis l'hypothèse d'une baisse des droits de succession dans certains cas bien précis. Mais ça ne se fera pas sans contrepartie. Il est précisé en introduction :

"Dans un contexte de finances publiques qui interdit toute baisse d’impôt non financée par des économies en dépense, la Cour a analysé les règles applicables aux droits de succession ainsi que le contrôle des déclarations de succession. Elle estime qu’il est possible de mener une réforme des droits de succession à rendement constant fondée sur un resserrement des dispositifs dérogatoires et une baisse ciblée des taux, permettant d’améliorer l’équité de cet impôt dont l’avantage procuré par l’application des dispositifs dérogatoires croit avec le montant de la succession."

Pour les novices en économie, voilà qui est bien compliqué. Le magazine Capital a ainsi decrypté le rapport pour le vulgariser. Alors qu'actuellement seuls les héritiers en "ligne directe", à savoir enfants et petits-enfants, bénéficient d'un abattement fiscal de 100 000 eurosl'imposition des héritiers en "ligne collatérale" pourrait être revue à la baisse.

Une baisse des droits de succession mais pour qui ?

Ceux qui sont désignés comme héritiers en "ligne collatérale" sont les personnes comme les frères et sœurs, neveux et nièces, cousins et cousines ou oncles et tantes. Seraient aussi concernés par cette baisse "les enfants du conjoint survivant dans les familles recomposées" explique le mensuel économique, pour "mieux prendre en compte les évolutions familiales et sociétales" rapporte la Cour des comptes.

Comme évoqué plus haut, les héritiers en ligne directe profitent d'un abattement jusqu'à 100 000 euros puis sont imposés proportionnelement au-délà : 5 % si la somme taxable est inférieure à 8 072 euros et jusqu'à 45 % si elle est supérieure à 1 805 677 euros.

Les héritiers en ligne collatérale sont eux très défavorisés par le système actuel rappelle Capital : 

  • jusqu'à 15 932 euros d'abattement pour les frères et sœurs et un taux d’imposition de 45 % dès 24 430 euros ;
  • jusqu'à 7 967 euros d’abattement pour les neveux et nièces et un taux d'imposition de 55 % au-delà ;
  • jusqu'à 1 594 euros d'abattement pour les parents éloignés ou les tiers à la famille et un taux d’imposition de 60% au-delà.

Cette dernière situation étant celle qui touche les enfants du conjoint survivant (soit les beaux-enfants du légataire). Autant dire que la succession profite avant tout à l'Etat...

L'assurance-vie des riches comme point d'équilibre ?

Pour financer cette mesure, qui n'a pas été chiffrée, ni au niveau du coût global, ni au niveau des nouveaux abattements en fonction des cas, la Cour des comptes va devoir s'attaquer à certains avantages fiscaux ou "dispositifs fiscaux dérogatoires". C'est l'assurance-vie de certains qui est particulièrement dans le viseur des Sages.

En effet, elle profiterait au final aux plus aisés car elle diminue l'imposition des successions. Chaque bénéficiaire du contrat peut ainsi avoir droit à un abattement de 152 000 euros, et profiter ensuite d'une fiscalité qui sort du giron des droits de succession : 20 % pour les 700 000 premiers euros imposables, 31,25 % au-delà.

Il y a toutefois une limite à ces avantages : tous les versements doivent avoir été effectués avant les 70 ans du défunt. Après cet âge butoir, "un abattement de 30 500 euros est partagé entre tous les bénéficiaires du ou des contrats, le solde éventuel étant soumis aux droits de succession", souligne Capital.

Autre levier, revoir les conditions du Pacte Dutreil. Ce dispositif permet sous conditions d’exonérer les héritiers d’une société familiale de 75 % des droits de donation et succession.

"Les avantages fiscaux procurés par les dispositifs dérogatoires croissent avec le montant de la succession : pour les successions en ligne directe de plus de 2,5 millions d’euros, ils seraient équivalents à une baisse de 15 points du taux moyen de taxation. Cette incidence régressive est liée à la concentration des actifs professionnels et des contrats d’assurance vie parmi les ménages les plus aisés," se justifie la Cour des comptes.