De nouvelles règles d’indemnisation entreront en vigueur en avril 2025 et impacteront durement les plus âgés.
Un petit verre de rouge à la cantine ? Si aujourd’hui l’idée paraît complètement absurde, jusque dans les années 50, servir du vin aux enfants dans les établissements scolaires était la norme. Le vin était alors considéré comme une boisson nutritive, fortifiante et avec d’indéniables vertus pour la santé.
Plus encore, "durant l’entre-deux-guerres, les partisans de la pseudoscience affirmaient que le vin était un rempart contre l’alcoolisme, car dans les régions non-viticoles, le taux d’alcoolisme était plus élevé que dans les régions productrices", explique Stéphane Le Bras, maître de conférences en histoire contemporaine et spécialiste des pratiques viticoles, à Planet.
Des enfants arrivaient saouls à l'école primaire
À l’époque, le vin faisait partie du quotidien des Français, et ce, dès le plus jeune âge. "Le comité national de propagande en faveur du vin, qui était placé sous l’égide de l’État, faisait tout pour promouvoir la consommation de vin dans les écoles et l’une de ses cibles prioritaires était les enfants", raconte Stéphane Le Bras.
Pour autant, les plus jeunes n’attendaient pas forcément l’heure du déjeuner pour boire leur premier verre. "Des cas d’enfants arrivant saouls à l’école primaire ont été répertoriés. Leurs parents leur servaient généralement du vin aux alentours de 8 ou 9 degrés coupé à l’eau au petit-déjeuner", relate l’historien.
Quel a été le déclic pour mettre fin à cette pratique ?
"Les alcooliques coûtaient trop cher à l’État"
Les enfants n’étaient toutefois pas les seuls à subir ce lavage de cerveau. "En plus de leur salaire, les ouvriers avaient droit, tous les jours, à deux ou trois litres de vin dans leur panier-repas, détaille Stephane Le Bras.
"La France était considérée comme la nation du vin dans le monde. En dehors de l’aspect culturel, cela suppose qu’il y avait de forts enjeux économiques derrière la consommation de cet alcool", poursuit-il.
Il faudra attendre l’arrivée au pouvoir de Pierre Mendès France pour que le vin soit interdit, en 1956, aux enfants de moins de 14 ans dans les établissements scolaires. "Au début des années 50, il y a eu un renouveau du mouvement antialcoolique", explique le spécialiste.
Au même moment, une nouvelle génération de médecins a émergé et a mis en garde contre l’alcoolisme. L’argument majeur était que soigner les alcooliques coûtaient trop cher à l’État", explique Stéphane Le Bras. Comment s'est opéré le retrait du vin dans les cantines scolaires ? En douceur...
Remplacer le vin par le lait à la cantine : une petite révolution
Afin d’habituer les plus jeunes à une autre boisson, Pierre Mendès France a eu l’idée de remplacer le vin par le lait dans les établissements scolaires. "Les enfants devaient développer de nouveaux goûts afin de se tourner vers le lait plutôt que le vin lorsque leurs parents servaient le petit-déjeuner.
Le lait était également censé permettre un meilleur développement physique. De plus, la filière laitière produisait énormément de lait et il fallait en écouler les stocks", développe l’historien.
Ce n’est toutefois qu’en 1981 que le vin fut interdit dans tous les établissements scolaires pour les mineurs. Jusqu’au début des années 2000, les élèves majeurs pouvaient, eux, encore boire du vin dans certains internats.
"De son côté, la filière viticole a opéré une montée en gamme en passant du gros rouge à des vins de qualité, précise Stephane Le Bras. Aujourd’hui, les Français en boivent environ 40 litres par an et par habitant contre 130 dans les années 50". Une petite révolution.