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Le meurtrier s'en est allé, il ne reste plus que la complice. Pour la première fois, Monique Olivier, ex-épouse du tueur en série Michel Fourniret, comparaît seule face à la Cour. L'homme surnommé "l'Ogre des Ardennes", décédé en mai 2021, a laissé derrière lui une femme complice, désormais seul être vivant à pouvoir répondre aux questions des familles des victimes. Déjà condamnée à la réclusion criminelle à perpétuité, pour complicité d’enlèvement, de viols et de meurtres de sept jeunes femmes, elle est renvoyée devant les Assises des Hauts-de-Seine à partir de ce mardi 28 novembre pour un procès qui doit durer trois semaines. L'audience doit permettre de mesurer son degré de responsabilité sur trois affaires dans lesquelles des zones d'ombre persistent : l’enlèvement d’Estelle Mouzin en 2003, et les enlèvements et les meurtres de Marie-Angèle Domèce en 1988 et de Joanna Parrish en 1990.
Où sont les corps des victimes ?
Dans l'affaire de la disparition de Marie-Angèle Domèce, la principale question est ainsi de savoir où a été dissimulé le corps de la victime. La jeune femme de 19 ans, handicapée mentale, a disparu devant la gare d'Auxerre 8 juillet 1988. Avant son décès en 2021, Michel Fourniret a reconnu l'avoir tuée mais les fouilles menées à Saint-Cyr-les Colons, près d'Auxerre, où habitait le meurtrier en 1988, n'ont jamais permis la découverte de la dépouille.
Introuvable également, le corps de la petite Estelle Mouzin, 9 ans, disparue en rentrant de l’école le 9 janvier 2003. Un témoin dans l'affaire a évoqué la présence d'une fourgonnette blanche le jour de l'enlèvement, véhicule utilisé par Michel Founirat dans ses quêtes meurtrières. Michel Fourniret avait pourtant un alibi : il était chez lui avec Monique Olivier, selon cette dernière. Celle-ci ne révèlera qu'en 2019 avoir menti pour le couvrir. Son mari n'était pas à son domicile lors de la disparition de l'enfant. Le tueur en série reconnaîtra alors qu'il a "pris la vie d'Estelle".
Enfin, le procès doit permettre de connaître les circonstances du meurtre, reconnu par Michel Fourniret, de Joanna Parrish en 1990. Le corps de la jeune femme avait été découvert dans l'Yonne, mais nul ne sait comment le meurtrier a approché la Britannique de 20 ans, ou par quel procédé il l'a assassinée par asphyxie. Les parents de Joanna sont présents au procès. Roger Parrish, le père de Joanna a toujours été clair avec les enquêteurs sur le rôle de Monique Olivier : "Joanna ne serait jamais partie seule avec un homme, mais elle aurait pu faire confiance à une femme."
Monique Olivier : femme manipulatrice ou manipulée ?
C'est là l'autre grande question du procès : Monique Olivier était-elle sous l'influence de Michel Fourniret, complice contrainte des crimes de son mari, ou était-elle moteur des sévices subis par les trois jeunes femmes ? Dans ce procès, épilogue de décennies de souffrances et d'incertitudes pour les famille des victimes, Monique Olivier est la clé de voute. Personnage ambigu, celle qui a rencontré Michel Fourniret en 1987 et partagé sa vie jusqu'en 2010 a tout à tour protégé l'assassin et désigné l'Ogre comme coupable.
Durant des années, la tête baissée dans le box des accusés, Monique Olivier a opté pour le silence et la dénégation. Au compte-goutte et avec difficulté, elle a finalement livré aux enquêteurs des éléments essentiels sur les affaires, amenant son ex-époux à se dénoncer, quoiqu'à demi-mot. Sans Monique Olivier, pas de procès, explique sa défense. Sans Monique Olivier, pas de crimes, réplique l'accusation, qui pointe des éléments attestant de son rôle actif dans les atrocités commises. Ainsi l'épouse complice aurait non seulement aidé son mari à capturer ses victimes mais aussi à les "préparer" pour son mari et enfin à faire disparaître les preuves.
Monique Olivier parlera-t-elle ?
Libérée de lui, Monique Olivier serait-elle prête à parler librement au procès ? Le père d’Estelle Mouzin n'y croit pas. "Se placer en position de demandeur vis-à-vis de la bonne parole qu'elle voudra bien nous donner, c'est se faire du mal" explique-t-il à France Bleu. Il attend donc principalement du procès que Monique Olivier "soit condamnée à la hauteur du crime commis". L’ancien magistrat Francis Nachar, lui non plus, ne veut rien espérer. "J'espère 10 000 fois me tromper, mais je suis convaincu qu'elle ne dira rien de plus. Elle se contentera du bout des lèvres de confirmer ses déclarations et on n'apprendra rien de plus" explique-t-il, interrogé par France Bleu Champagne-Ardenne. Le verdict tombera le 15 décembre.