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Tempête sur le monde politique. L'ancien président de la République Nicolas Sarkozy a profité de l'accalmie estivale qui précède la sortie de son livre "Le Temps des combats"(Éditions Fayard) ce 22 août pour accorder au Figaro une interview fleuve dans laquelle il expose et étrille, depuis son opinion sur l'immigration (brulôt à quelques semaines de débat sur une future loi) jusqu'à la politique d'Emmanuel Macron. Si l'homme politique s'est astreint tant dans l'interview que dans son ouvrage à balayer de très nombreux sujets sensibles, ce sont ses propos sur le conflit ukrainien qui suscitent les critiques d'une partie de la classe politique française et étrangères et les louanges de Moscou.
Une Ukraine "neutre"
Ainsi l'ancien président appelle-t-il notamment l’Ukraine à "rester neutre" en ne rejoignant ni l’Union européenne ni l’Otan. "L’Ukraine est un trait d’union entre l’Ouest et l’Est, il faut qu’elle le reste", estime-t-il, estimant que le pays "a une vocation de pont entre l’Europe et la Russie". Une Russie avec laquelle l'Europe ferait bien de garder des liens. Nicolas Sarkozy pointe aussi les "promesses fallacieuses" faites, selon lui, par les Occidentaux à Kyiv, en particulier sur une éventuelle adhésion à l’Union européenne et à l’Otan. Quant à la Crimée, territoire ukrainien annexé en 2014 par la Russie, il est trop tard : Nicolas Sarkozy estime que "tout retour en arrière serait illusoire". Il appelle pour sa part Moscou à organiser dans cette région "un référendum incontestable" pour "entériner l’état de fait actuel". Nicolas Sarkozy souhaite une "sortie par le haut" du conflit, si tenté que les protagonistes du conflit puissent s'accorder sur cette notion de "haut".
Des propos qui, s'ils ne choquent pas de la part de celui qui a déclaré en 2018 lors d'une interview pour Moscou avoir "toujours été un ami de Vladimir Poutine", ont été perçu par beaucoup comme une négation de la liberté du peuple ukrainien et de la gravité de l'invasion de l'Ukraine par la Russie. L’article 1-2 de la Charte des Nations unies, ne consacre-t-il pas le "principe de l’égalité de droits des peuples et de leur droit à disposer d’eux-mêmes" ?
Flot de critiques
Les critiques n'ont pas tardé à pleuvoir à gauche et dans la majorité. Sur LCI jeudi, le député écologistes Julien Bayou a tranché : "un ancien président ne devrait pas dire ça", a-t-il estimé, fustigeant une interview "lunaire" et "choquante". Et de rappeller les liens entre Nicolas Sarkozy et une société d'assurance russe, objet d'une enquête depuis 2021. L'analyse de Nicolas Sarkozy "illustre puissamment la confusion des élites françaises sur la Russie et affaiblit encore une fois la voix de notre nation en Europe. Pathétique", a déploré pour sa part l'eurodéputé Raphaël Glucksmann.
Dans la majorité, c'est l'eurodéputée Nathalie Loiseau qui a ouvert le feu et déploré "la dépendance d'une partie de la classe politique européenne aux vues de Vladimir Poutine". "Aussi longtemps que nécessaire, la France et l'Union européenne seront présentes aux côtés des Ukrainiens", a embrayé Pierre-Alexandre Anglade, président de la commission des Affaires européennes du Palais Bourbon.
Moscou traite Sarkozy en "bon élève"
La tonalité est bien différente à Moscou, où l'ancien président russe Dmitri Medvedev a salué ces "déclarations à la fois audacieuses et justes". Un petite ritournelle de "prenez exemple sur lui" reprise par les agences de presse Tass et RIA Novosti russes qui ont, elles, titré ainsi : "Sarkozy estime que la situation avec la fourniture d’armes à Kiev pourrait devenir ingérables", et "Sarkozy a proposé d’organiser un référendum en Crimée". Les déclarations de Nicolas Sarkozy ont franchi jusqu'aux portes du Parlement russe, où un député de Sébastopol, Dmitry Belik, a proposé à Nicolas Sarkozy de mener une mission de surveillance en Crimée. Lui seul, dit-il peut "amener au monde occidental la solution de la sagesse : laisser la Crimée derrière et oublier à jamais son retour à l’Ukraine". Ainsi chaque camp appelle-t-il l'autre à la raison mais la question du jour demeure : un ancien président doit-il s'astreindre encore à un devoir de réserve ?