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Que faire quand le désir n'est plus au rendez-vous comme avant ? La sexualité d'une personne n'est plus la même à 50 ans qu'à 25. Alors que certains espèrent pouvoir maintenir des rapports inchangés, d'autres se confrontent à la réalité de l'âge, parfois avec difficulté. Jacques Waynberg est docteur en Médecine et sexologue, fondateur de l'Institut de sexologie en 1977. Pour Planet, il revient sur la spécificité des rapports sexuels chez les personnes âgées de 50 ans et plus.
"Il y a une routine et une certaine pénibilité qui est liée au vieillissement"
La sexualité des personnes entre 50 et 70 ans a-t-elle quelque chose de particulier ?
Jacques Waynberg : Cette tranche d’âge est exposée à la découverte d’une certaine pénibilité de la vie privée, qui perd son aura, son style amusant, un peu lyrique, un peu dévoyé, qui perd sa dimension amusante et sentimentale. Pourquoi la perd-elle ? Parce que ça devient un exercice qui n’est plus aussi rentable qu’il a pu l’être plus jeune, en termes de plaisir. Il n’est plus aussi rentable du tout en termes d’aventure car on se retrouve avec des couples qui ont 30 ou 40 ans de vie commune. Il y a une routine et une certaine pénibilité qui est liée au vieillissement, déjà de la femme post-ménopause. Pénibilité aussi pour les hommes, parce qu’ils sont en train de passer un peu à la caisse vers soixante ans : ceux qui ont fumé, qui n’ont pas eu d’hygiène de vie raisonnable, qui sont dans un état de santé qui commence à flancher, qui vont avoir de grandes dispositions physiques. Donc c’est une tranche d’âge critique, c’est l’âge critique de la sexualité en Occident, dans des sociétés qui ne veulent pas tenir compte des réalités.
A quoi est dû ce refus de voir la vérité en face ?
Jacques Waynberg : On veut toujours rester jeune. Il y a une espèce de phobie du vieillissement qui fait qu’il faut toujours être performant, capable d’avoir des rapports et de ne pas s’ennuyer. On rêve là ! On a une sorte d’opinion publique qui est un véritable piège à performance. On a une vision un peu sombre de la situation : si on veut maintenir après 60 ans les performances qu’on connaissait 30 ans plus tôt, on va avoir du mal et on va être ridicule.
"L'objectif n'est plus l'érection, n'est plus l'orgasme coïtal"
Quel est l’objectif de cette tranche d’âge ?
Jacques Waynberg : Ce n’est plus une sexologie de performance mais ce que j’ai appelé une sexologie humaniste, où l’objectif n’est plus l’érection, n’est plus l’orgasme coïtal, mais le bonheur. Il faut donc élargir la discussion, l’accompagnement et être dans l’écoute de la totalité de la vie de nos interlocuteurs. Il faut poser les bonnes questions. Où en sommes-nous du temps passé ensemble ? Combien d’heures ce couple de 60 à 65 ans passe-t-il en tête à tête par semaine à faire des choses qui l’intéresse ? Est ce qu’on dort encore ensemble ? Est ce qu’on dort nu ensemble ? Est ce qu’il y a des contacts physiques, amoureux, qui ne sont plus forcément des contacts sexuels génitaux ? Ce type de questions ne met plus personne en danger, elles évitent d’être complexé parce qu’on n’arrive plus à bander, parce qu’on n’arrive plus à avoir la même séduction de l’autre qu’auparavant. On est plus dans la performance, on est dans l’équilibre.
"On doit faire le deuil des fantasmes artificiels"
Comment faire le deuil de ses expériences passées pour avoir un nouveau rapport à cette vie intime ?
Jacques Waynberg : On n’en fait pas le deuil, on grandit. C’est comme si vous me disiez "Comment va-t-on faire à 25 ans pour faire le deuil de son adolescence ?". C’est notre boulot de sexologue de faciliter ce passage. On doit faire le deuil des fantasmes artificiels, qui circulent notamment dans les médias. C’est ça le véritable danger, et ce que nous devons dénoncer. Ce qu’il faut c’est grandir et se détacher progressivement des représentations utopiques des performances purement sexuelles. Lorsqu’on a 25 ans, on est dans une tranche d’âge où la sexualité a un sens, elle est une recherche de soi et une transaction, un échange amoureux. Dans le couple qui a déjà tout vécu on ne rénove pas, on ne repart pas de zéro, on est dans une continuité. Cette continuité, il faut lui donner du sens. Ce n’est plus l’orgasme du samedi soir qui va être important c’est comment on se cultive l’un l’autre, comment on s’enrichit l’un l’autre.
"Il faut faire des choses ensemble, il faut s'enrichir"
Quel est votre rôle auprès de ces personnes, en tant que sexologue ?
Jacques Waynberg : Pour moi il n’y a pas de thérapie, il y a un accompagnement. On doit comprendre des choses de la vie, il n’y a pas à soigner quelque chose. Par contre, il y a des gens qui ont besoin d’être soignés, ce n’est plus pour le sexologue. Le sexologue va être confronté à des personnes de 60 ans qui sont un peu perdues, il va falloir qu’il soit la boussole. On voit bien que l’aspect purement sexuel doit être minimisé, sinon on fout des complexes à tout le monde. Il faut rassurer les gens qui ne sont plus, se disent-ils, conformes. Ils me disent qu’ils ont peur de ne plus être normaux, conformes, mais à quoi ? A quelle image ? Par contre, on ne se croise pas les bras, il faut faire des choses ensemble, il faut s’enrichir.