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La France insoumise (LFI) a récemment menacé de lancer une procédure de destitution contre Emmanuel Macron, accusant le président de “coup de force institutionnel contre la démocratie”. Mais une telle sanction est-elle possible ?
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Emmanuel Macron bientôt destitué ? Dans un texte publié ce dimanche 18 août dans La Tribune Dimanche, La France insoumise (LFI) menace d’engager une procédure de destitution contre Emmanuel Macron, accusé de “coup de force institutionnel contre la démocratie”.

Selon eux, Macron envisagerait de nommer un Premier ministre sans tenir compte du résultat des élections législatives anticipées, où la gauche unie du Nouveau Front populaire (NFP) est arrivée en tête, mais sans obtenir de majorité absolue. Cependant, cette menace de destitution semble vouée à l’échec en raison des équilibres parlementaires actuels, rendant la démarche quasi impossible.

L'obstacle de l'article 68

LFI s’appuie sur l’article 68 de la Constitution, qui stipule que le président ne peut être destitué qu’en cas de manquement grave à ses devoirs, incompatible avec l’exercice de son mandat.

Selon les Insoumis, le refus de Macron de reconnaître la victoire de la gauche et son intention de nommer un Premier ministre sans majorité seraient des manquements graves. 

Thomas Guénolé, politologue, a accepté de répondre à nos questions pour Planet.

Planet : Ce scénario de destitution est-il possible ? 

Thomas Guénolé : Oui, la France insoumise a suffisamment de députés pour remplir les conditions de dépôt d’une proposition de procès en destitution du président de la République. Il faut ensuite que l’Assemblée adopte cette proposition à la majorité simple. Cela aussi, c’est possible. 

Mais après, il faut encore d’autres étapes, notamment que la destitution soit votée à la majorité des deux tiers, et ça, c’est beaucoup moins faisable. De toute façon, l’Assemblée est fermée depuis le 2 août et jusqu’à début octobre. Donc je ne vois pas comment LFI pourrait déposer une proposition de procès en destitution du président de la République à l’Assemblée, alors qu’elle est fermée. 

Une procédure complexe

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Pour que la procédure de destitution aboutisse, plusieurs cases doivent être cochées. D’abord, il faudrait convaincre l’Assemblée nationale et le Sénat de se constituer en Haute Cour, une instance spéciale chargée de juger le président. Pour ce faire, une résolution doit être adoptée à la majorité des deux tiers dans chaque chambre. Or, LFI, avec ses 70 à 80 députés, peut déposer seule cette résolution, mais il est presque impossible de réunir les 384 voix nécessaires à l’Assemblée. 

L'article 68 déjà activé en 2016

L’article 68 n’a été activé qu’une seule fois dans l’histoire récente. En 2016, des députés Les Républicains avaient tenté de destituer François Hollande pour des révélations sensibles faites dans le livre Un président ne devrait pas dire ça. Cette tentative avait été rapidement écartée, montrant à quel point la procédure est difficile à mettre en œuvre. Le cas présent, avec un soutien limité au sein de l’opposition, semble condamné au même sort. 

Ainsi, bien que la menace de destitution soit médiatiquement forte, elle reste, dans les faits, pratiquement impossible à réaliser.