De nouvelles règles d’indemnisation entreront en vigueur en avril 2025 et impacteront durement les plus âgés.
Le collège-lycée Cévénol, un pensionnat du Chambon-sur-Lignon (Haute-Loire), est réputé dans tout l’Hexagone pour son programme international et sa pédagogie aux antipodes des traditions. Dans l’établissement, il n’y a ni grilles, ni portes, ni murs séparant le lycée du reste du monde. Les élèves sont amenés à se responsabiliser eux-mêmes.
Mais en 2011, c’est pour un tout autre fait que l’école va faire la Une des journaux. Le 16 novembre, la jeune Agnès Marin, une pensionnaire de 13 ans, ne se présente pas à l’étude du jour. Ni au dîner, ni dans son dortoir…
Pendant deux jours, plus d’une centaine de gendarmes la cherchent, en vain. Ses camarades et les professeurs de l’école organisent, à leur tour, de nombreuses battues. Mais aucune trace d’Agnès.
Ce jour-là, la jeune fille profitait d’une après-midi « libre », et prévoyait de sortir à l’extérieur.
Sorti des bois le visage caché par une écharpe
Les enquêteurs enchaînent les auditions pour tenter de reconstituer son emploi du temps à la seconde près. Mais entre les dires des uns et des autres adolescents, ils peinent à déterminer où a vraiment pu se rendre Agnès.
Jusqu’à ce que des camarades de la jeune fille racontent avoir aperçu, le soir de sa disparition, alors qu’ils s’étaient rendus dans la forêt voisine malgré l’interdiction des surveillants, un des pensionnaires, un certain Matthieu, âgé de 18 ans, sortir du bois, le visage caché par une écharpe.
Entendu, le jeune homme fait de troublantes déclarations. Il décrit même aux enquêteurs l’endroit où pourrait se trouver Agnès.
Le 18 novembre, deux jours après la disparition de la pensionnaire, on retrouve son corps carbonisé au beau milieu de la forêt, à plus de 3 kilomètres de l’établissement scolaire.
Elle a violée, battue et poignardée à 17 reprises. Sur le jean porté par Matthieu ce jour-là, on retrouve également, sur une trace de sang, l’ADN de la disparue.
Affaire Agnès Marin : le terrible calvaire de la jeune pensionnaire
Passé aux aveux, le suspect raconte par le menu le détail de son crime atroce.
Dans l’après-midi du 16 novembre, il propose à Agnès d’aller chercher des champignons hallucinogènes dans le bois. L’adolescente le suit sans se douter de ce qui l’attend. Matthieu l’attire dans un ravin, l’attache à un arbre, et la viole. Elle tente, en vain de se défendre, mais le jeune homme la roue de coups, avant de lui asséner plusieurs coups de couteau. Agnès succombe. Matthieu trouve, dans ses affaires, un bidon d’essence pour briquet. Il en asperge son cadavre, rassemble quelques brindilles, et y met le feu.
Au lycée Cévénol, le choc est de taille. Surtout que, dans les heures suivant la disparition d’Agnès, Matthieu avait fait mine de participer aux recherches, aux côtés des amis de la jeune femme.
Le 20 novembre, une marche blanche rassemblant près de 4000 personnes est organisée, en mémoire de la jeune femme.
Affaire Agnès Marin : Le portrait « noir » de Matthieu, ado récidiviste
Pendant ce temps, les enquêteurs s’intéressent au passé de Matthieu. Ils découvrent alors avec stupeur que le garçon de 18 ans, admis en début d’année au pensionnat du Chambon-sur-Lignon, est accusé d’un autre fait.
En août 2010, près de son village natal dans le Gard, il séquestre et viole sous la menace d’une arme une ancienne camarade d’école, Julie. Là aussi, il avait attiré sa victime dans un bois sous un faux prétexte, avant de l’attacher aux branches d’un arbre et de la violer en brandissant son couteau.
Julie avait réussi à s’enfuir après les sévices, prétextant à son agresseur que sa mère allait arriver d’une minute à l’autre.
Elle porte plainte, et Matthieu est mis en examen et placé en détention provisoire. Mais seulement trois mois après son crime, il bénéfice d’une libération conditionnelle.
Ses parents ont fait jouer, auprès de l’administration pénitentiaire, le fait qu’il venait alors d’être admis, justement, au lycée Cévénol.
Le personnel de l’établissement, de son côté, assurera qu’il n’avait pas été mis au courant de la gravité des faits : tout juste pensaient-ils qu’il s’agissait d’une agression sexuelle, et non d’un viol commis sous la menace d’une arme.
« Nous ne savions pas qu'il était sous contrôle judiciaire, nous n'avons pas eu le moindre contact avec les autorités jusqu'au drame (…) 4 mois de prison préventive, nous savions. Mais que c'était pour viol, non », dira Jean-Michel Hieaux, le vice-président du lycée.
Mais il est trop tard : le scandale a déjà éclaté, et la réputation de l'établissement accuse le coup.
« Elle ne devait pas mourir » , clamera le père d’Agnès quelques jours après le drame.
Affaire Agnès Marin : « Il prenait du plaisir à la faire souffrir »
Mis en examen pour le viol et le meurtre d’Agnès, Matthieu comparait devant les assises de la Haute-Loire en juin 2013. Le viol de Julie a été joint au dossier, et il est donc jugé pour les deux affaires.
Les audiences se déroulent à huis-clos, l’ambiance est lourde, la douleur ravivée.
Depuis son box, le jeune homme aurait affirmé que « tout ce qu'il avait dit jusqu'à présent était mensonger, et avoir agi à l'encontre de Julie par haine, même si elle ne l'avait jamais humilié ni rejeté. Il a dit aussi avoir pris du plaisir à la faire souffrir », relatera l’avocat de la famille Marin, Me Francis Spizner.
De leur côté, les experts psychiatres l’ayant examiné feront état d'une personnalité « psychotique de type schizoïde », avec une « perversité étonnante et une dangerosité effrayante.
Au terme des débats, Matthieu est condamné à la réclusion criminelle à perpétuité. En octobre 2014, la peine sera confirmée à l’issue d’un procès en appel.
Depuis, Matthieu purge sa peine à la maison centrale d’Ensisheim, dans le Haut-Rhin. Selon son avocate, Me Joëlle Diez, il suivrait de nombreux soins en prison. "Il faut savoir que Matthieu n'a pas l'intention de sortir. Il a l'impression qu'au contraire, il faut qu'il soit soigné, cadré", expliquait le conseil à RTL.
En 2016, ses parents publient un livre, Parents à perpétuité, racontant leur peine et la vie de leur fils. L’évènement provoquera un tollé, notamment du côté de la famille d’Agnès, meurtrie par cette « campagne de showbiz », quand eux restent les vraies victimes de ce drame.
Marqué à vie, et peinant à se relever du scandale, le collège Cévénol a fermé ses portes définitivement le 11 juillet 2014.