Yannick Neuder est un nom quasi inconnu des Français comme il l'était des médias. Et pourtant il vient d'être nommé au ministère du Travail, de la Santé, des Solidarités et des Familles en renfort de...
C’est à Paris que s’ouvre ce jeudi 5 avril le procès de cinq hommes arrêtés le 27 janvier 2015 dans l’Hérault. Originaires de Lunel, une petite commune occitane, ils sont présumés membres de la filière djihadiste locale. Tous vont être jugés jusqu’au 11 avril.
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La modeste ville de Lunel a fourni bien involontairement un impressionnant bataillon de combattants : 20 jeunes sont partis pour la Syrie. Au total, 8 sont présumés morts et 7 autres continuent supposément de guerroyer. Le procès des survivants rentrés en France jette sur l’agglomération une triste lumière. Mais elle est loin d’être la seule ville concernée par la radicalisation et la montée du salafisme. "Il est assez difficile de chiffrer avec précision le nombre de filières terroristes qui existent en France. Mais il y en a évidemment d’autres", indique Pierre Conesa, ancien haut fonctionnaire au ministère de la Défense, énarque, spécialiste des questions stratégiques internationales et militaires. Il est également l’auteur de plusieurs ouvrages sur le terrorisme (La fabrication de l’ennemi, Docteur Saoud et Mr. Djihad, la diplomatie religieuse de l’Arabie Saoudite, éditions Robert Laffont).
Ces enclaves salafistes se construisent et se concentrent la plupart du temps dans des quartiers plutôt que des villes à proprement parler. Il s'agit de cellules dormantes qui contribuent à l'action terroriste sans tomber sous le coup de la loi (prêt de véhicule, de logement, etc). "On pourrait parler de la filière de la Meinau, à Strasbourg dont sept membres ont été jugés en appel en 2017. A Toulouse on sait l’existence d’une filière dans le quartier du Mirail. On en retrouve une autre à Paris, dans le XIXème arrondissement. C’est la filière des Buttes-Chaumont", précise le spécialiste. Les Yvelines ne seraient pas non plus épargnées : Trappes compterait également sa propre filière djihadiste. Sans oublier le "Gang de Roubaix" qui a défrayé la chronique à plus d’une occasion.
L'Etat a-t-il laissé faire ?
Pour Pierre Conesa, le développement de ces enclaves salafistes est multifactoriel. "A Lunel, l’Etat a laissé la situation se putréfier. La ville cumule : elle a un taux de chômage très élevé (au dessus des 20% en 2014) et la poussée des salafistes n’a jamais été sanctionnée par les pouvoirs publics malgré les appels à l’aide d’associations musulmanes. L’Etat s’est désintéressé de la situation." Il estime qu’avant les attentats qui ont frappé la rédaction de Charlie Hebdo, l’exécutif refusait d’intervenir et ne faisait pas de distinction entre salafisme et Islam de France.
Toutefois, en dehors des zones de déshérence et d’abandon étatique, Pierre Conesa souligne aussi l’Arabie Saoudite. "Toute cette situation est directement imputable à la diplomatie de l’Arabie Saoudite, qui diffuse l’Islam wahhabite à échelle globale. Pendant la guerre froide, nous avons laissé faire car il apparaissait comme un moindre mal. Depuis 1973 cette diplomatie est soutenue par une fortune financière qui permet au pays de créer des écoles coraniques, de nommer des imams et de former des prédicateurs salafistes", explique l’analyste.
En France, la véritable avancée du salafisme concorde avec la création de l’Etat Islamique. Pour l’énarque c’est lié à la naissance d’un projet géopolitique, potentiellement capable d’accoucher d’un nouveau calife.