Une conductrice a saisi le Conseil d'État après avoir reçu une contravention pour stationnement. Et la juridiction lui a donné raison. Explications.
Le sujet ardent de la réforme des retraites s’embrase de nouveau. Malgré une forte opposition de tous bords, le texte a été adopté en première lecture, sans vote des députés. En pleine crise du coronavirus, l’exécutif a en effet, ce samedi 29 février, utilisé le 49-3 en catimini, après un conseil des ministres extraordinaire.
Les deux motions de censure déposées ce mardi 3 mars n’ont pas abouti. Ce passage "en force" va à l’encontre des précédentes annonces du gouvernement, qui se disait à l’écoute des Français et des partenaires sociaux.
Promesse initiale pour endiguer le déficit du régime ? "Un euro cotisé donnera les mêmes droits pour tous", assurait Emmanuel Macron lors de la présidentielle 2017. Comme le rapporte Alternatives Economiques, l’objectif était seulement de rendre le système plus équitable et plus transparent.
Déficit du système des retraites : "Le gouvernement a construit un storytelling"
Or, cette réforme, bien plus complexe qu’annoncée, n’a cessé d’être contestée (étude d’impact, Conseil d’Etat, grèves…). La mise en avant du déficit du système n’était-elle pas par ailleurs, dès le départ, instrumentalisée pour réduire les pensions ?
"Plus de justice, de l’universalité… En mettant en avant un régime universel, le gouvernement a construit un storytelling en tentant de dresser les salariés les uns contre les autres", indique l’économiste Frédéric Farah à Planet.
Selon lui, "le déficit évoqué participe à une stratégie de communication qui consiste à utiliser une politique d’urgence : l’urgence de réformer le régime de retraites de façon comptable". Le professeur de sciences économiques et sociales, précise d’ailleurs que d’autres l’ont utilisé dans le passé.
"L’utilisation du 49-3 montre que c’est du pipeau. Le projet est mal pensé et laisse les individus dans l’incertitude et l’approximation", décrit-il.
Réformes des retraites : toujours moins favorables aux retraités ?
"Depuis 1993, avec les successions des réformes de retraites d’Edouard Balladur et de François Fillon, le calcul des retraites s’est avéré moins favorables aux retraités. Les durées de cotisations se sont, elles, allongées. Au fur et à mesure du temps, les pensions de retraite vont ainsi devenir de moins en moins généreuses", assure Frédéric Farah.
Et d’ajouter : "En faisant appel au Cor, le gouvernement s’est fourvoyé. Le problème ne vient pas de dépenses excessives venant d’un système généreux et incontrôlable mais de la perte de ressources (non compensation de la baisse des cotisations sociales…)". Pour lui, "cette histoire est toute fabriquée. Le gouvernement se sert d’un déficit imaginaire pour accélérer la réforme. Ce qui est programmé et le plus préoccupant, c’est l’appauvrissement des retraités". En effet, avec le passage au système à points, l’abandon du calcul sur les 25 meilleures années, et une enveloppe maximale de 14% du PIB consacrée aux pensions retraites, "les pensions sont vouées à baisser. D’autant que le nombre de retraités va augmenter".
Comme annoncé, "depuis les réformes paramétriques de 1993 à nos jours, le système des retraites est devenu de moins en moins généreux et son mode de calcul est de moins en moins favorable aux retraités", reprécise l’expert. Il assure que c’est la conséquence de la politique moderne. "Ce sont toujours les mêmes qui vont trinqués." Qui sont-ils ?
Régime universel : qui sont ceux qui perdront le plus ?
"Avec l’Euro, les dépenses publiques doivent être contenus (maladie, retraite). L’effort est alors porté sur la réforme sociale. Ainsi, ceux qui auront les carrières précaires et les plus hachées (dont majoritairement les femmes), en somme les plus vulnérables, seront les grands perdants", analyse l’économiste.
Pour lui, les très hauts cadres compenseront avec une retraite par capitalisation.
"La dynamique inégalitaire, avec les travailleurs pauvres, va ainsi faire son grand retour. La pauvreté a d’ailleurs rajeuni aujourd’hui", constate Frédéric Farah.
Pour s’assurer par exemple une retraite à 1000 euros, promise par le gouvernement, il faudra avoir une carrière complète.
Le gouvernement entend-il pour autant précipiter la baisse des pensions ? "Oui, mais ce sera plus tard qu’on le verra. Il y a la phase de transition qui donnera déjà un premier aperçu de la déstabilisation de notre système de retraites. Macron pourra s’emparer de la réforme pour négocier avec Bruxelles des assouplissements budgétaires, en affirmant qu’il a fait la réforme structurelle tant attendue de la part de l’UE", conclut Frédéric Farah.