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Mai 68 : quand le mouvement s'est-il vraiment terminé ?
"Il est interdit d’interdire". Mai 68, c’est un mouvement dont les combats, les idées et mêmes les slogans continuent d’imprégner la vie politique française… 50 ans après la fin des manifestations.
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Pour de nombreux historiens, c’est précisément pour cela qu’il est difficile de dater la fin de Mai 68. C’est une période qui fait moins souvent l’objet de récits que d’autres moments emblématiques du mouvement comme la célèbre nuit des barricades, par exemple. Pour Sylvain Boulouque, historien spécialiste du communisme, de l’anarchisme, du syndicalsime et de l’extrême gauche, la fin de Mai 68 varie selon la façon dont on observe le mouvement. "Si on analyse le temps court, Mai 68 c’est trois semaines, un mois. C’est une espèce de parenthèse enchantée, en dehors du temps, après laquelle les choses semblent reprendre leur place. Daniel Cohn-Bendit disparait tout un temps de la scène politique après la fin du mouvement, par exemple", commence l’historien. "Si, en revanche, on pose la question du temps long, Mai 68 c’est au moins une décennie. Ca va du mois de mai 1968 jusqu’en 1983. Dans les années 70 de nombreux mouvements féministes, contestataires, homosexuels naissent. Ils sont résolument politiques", poursuit-il, estimant que dans ce cadre là, Mai 68 perdure "jusqu’à Pierre Mauroy et la désillusion de la gauche sur le plan économique".
Pour Laurent Avezou, docteur agrégé en histoire et professeur en classes préparatoire qui travaille sur les mythes politiques de l’histoire de France, le mouvement a pris fin entre les 11 et 13 juin 1968. "A la suite de la mort de Gilles Tautin, un militant maoïste qui s’est noyé dans la Seine le 10 juin, de nouvelles manifestations sont décidées. Elles sont suivies de nuits d’émeutes au cours desquelles, certains manifestants tentent de reprendre les hauts-lieux des débuts de Mai 68. Mais ils ne sont pas assez suivis ou épaulés par le reste de la population", raconte l’enseignant-chercheur.
Mai 68 : De Gaulle reprend la main
Ce n’est pas le seul élément qui vient émailler la mobilisation et mettre un coup d’arrêt à Mai 68. "L’une des raisons pour lesquelles le mouvent s’est arrêté c’est l’obtention des accords sociaux. Après cela, il n’y avait plus nécessairement besoin de poursuivre la grève", indique Sylvain Boulouque. "Pour le reste, le maintien de la position gaulliste joue beaucoup dans l’arrêt du mouvement. Le parti gaulliste remporte assez largement les élections qui suivent et même avant, le pouvoir fait preuve d’assez d’autorité pour décourager les manifestants", estime-t-il. Une analyse partagée par Laurent Avezou, selon qui le général De Gaulle est grandement responsable de la fin de Mai 68. "Charles de Gaulle n’a jamais pris au sérieux l’aspect purement estudiantin de Mai 68. Il ne les considérait pas comme une force politique à part entière. En revanche, il craignait beaucoup plus la prise de parole de François Mitterrand, au stade Charletty. Il redoutait une potentielle guerre civile ou une mise en danger de la République. Ce n’est pas pour rien qu’il était parti s’assurer de la loyauté des troupes stationnées à Baden-Baden", précise le chercheur.
L’intervention du socialiste aura sur De Gaulle l’effet d’un coup de fouet. "Il revient gonflé à bloc de Baden-Baden. A la radio, il déclare très fermement que la fête est finie, ce qui génère un véritable électrochoc dans le peuple gaulliste. Au passage, il dissout l’Assemblée et annonce des élections législatives. Le lendemain, l’électorat gaulliste déferle sur les Champs-Elysées et la place de la Concorde dans une contre manifestation qui rassemble 200 000 personnes et renvoie à sa juste représentativité le mouvement étudiant", décrit Laurent Avezou.
L'imagerie de Mai 68 désormais ancrée dans la culture populaire ?
"Toutefois certains diraient de Mai 68 qu’il n’a pas encore pris fin. Les idées restent dans l’ère du temps et les slogans refleurrissent. Certains sont mêmes réutilisé par des publicitaires, ce qui est assez paradoxal mais dit combien le mouvement est ancré dans les esprits", analyse Sylvain Boulouque. A l’issue du mouvement, selon lui, la France "ne se porte pas mal sur les plans politique, économique, et social". "Mai 68 restait globalement bon enfant. Cela a permis énormément d’échange entre différentes facettes de la France et les changements de mode de vie ont été de court-terme", souligne-t-il. Pour Laurent Avezou, le pays e, est ressorti "psychologiquement dépoussiéré". "Avec Mai 68, la France sort de la torpeur culturelle dans laquelle elle était plongée depuis la libération", estime-t-il, non sans rappeler que comme pour tous les événements historiques "chacun voit en Mai 68 ce qu’il souhaite, en fonction des sensibilités qui sont propres à chacun". "Si Mai 68 est récupéré aujourd’hui par tant de personnes, c’est aussi parce que c’était un mouvement très contradictoire. C’est la rencontre entre une France ouvrière et celle déjà post-industrielle, c’est l’aspiration à un fort collectivisme qui s’accompagne d’un farouche appétit d’hyperindividualisme", conclut l’enseignant.