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Le projet de loi relatif au mariage pour tous est présenté ce mercredi matin en Conseil des ministres. Sauf coup de théâtre, il devrait être adopté par la majorité, malgré les oppositions qu'il rencontre. Mais, dans 5 ans, si la droite repasse au pouvoir et souhaite annuler le texte, que se passera-t-il ?

© abacapressCe mercredi matin, le projet de loi relatif au mariage et à l'adoption pour tous doit être présenté en Conseil des Ministres. Très bientôt, tous les couples, quelle que soit leur orientation sexuelle, devraient pouvoir se marier.

La droite s'y oppose farouchement et tente coûte que coûte de faire annuler le projet. Mais il devrait être voté par le Parlement. Dans ce cas, si dans 5 ans, la droite devait revenir au pouvoir, que se passerait-il ? Pourrait-elle faire annuler ce texte de loi ? Et quelles seraient les conséquences pour les couples mariés pendant ce temps ?

Interrogée lundi dernier sur LCI, l'ancienne ministre du Budget Valérie Pécresse a signalé que ça ne poserait pas de problème : "Bien sûr, on peut imaginer de mettre en place un statut d'union civile et de transférer les droits sur un statut d'union civile". François Fillon s'était lui aussi exprimé sur le sujet lors d'une intervention sur France 2 le 25 octobre dernier : "Sur un sujet comme celui-là, on ne peut pas considérer qu'une fois le texte voté, les choses sont acquises.

"Il faudrait l'abroger au moment de notre retour au pouvoir"
De son côté, Christian Jacob, chef de file du groupe UMP à l'Assemblée nationale, a déclaré au Journal du Dimanche : "Si [le projet] est adopté, il faudrait l'abroger au moment de notre retour au pouvoir".

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Seule à exprimer le contraire, Christine Boutin, ancienne ministre du Logement, pense que cela ne sera pas possible. Sur iTélé, lundi dernier, elle a déclaré qu'"on ne pourra pas revenir en arrière, on ne peut pas démarier des gens"

Interrogée par Le Monde, Agnès Tricoire, avocate, confirme les propose de Christine Boutin et avance "l'intangibilité de l'état-civil, grand principe du droit civil [....] C'est par exemple pour cela qu'il est si compliqué de changer de sexe. Et le statut marital fait partie des éléments que l'on décline pour donner son identité".

"Impossible d'anéantir rétroactivement les effets du mariage homosexuel"
Pour François Dekeuwer-Defossez, spécialiste en droit de la famille, on pourrait par contre changer le terme utilisé, et ne pas employer le mot "mariage". "Si cela consiste simplement en un changement de nom, la loi ne s'applique pas aux appellations", en précisant que "ce qui serait en revanche impossible, c'est d'anéantir rétroactivement les effets de l'époque où ce mariage homosexuel était en vigueur".

Bertrand Mathieu, professeur de Droit constitutionnel à Paris I a expliqué à LaCroix.fr qu'"il n'existe pas de cliquet anti-retour", mais "on imagine mal une loi rétroactive. [...] La Constitution dit qu'on ne peut remettre en cause, sauf intérêt général, les situations légalement acquises".

"Si la loi change, le Conseil constitutionnel pourrait se prononcer sur une rupture d'égalité devant la loi"
Cependant, qu'adviendra-t-il de ceux qui ne se sont pas mariés pendant cette période, et qui souhaiteraient le faire plus tard ? Cela pourrait bien ne pas être possible, et créer une différence face à la loi. Le Conseil constitutionnel pourrait alors bien être saisi. Serge Portelli, magistrat co-auteur de Désirs de familles, homosexualité et parentalité, estime dans Le Monde que "si la loi change d'ici quelques années, le Conseil constitutionnel pourrait être saisi et aurait à se prononcer sur une éventuelle rupture d'égalité devant la loi".

Mais la réponse ne serait peut-être pas satisfaisante... Le 28 janvier 2011, le Conseil constitutionnel avait déjà été saisi d'une question prioritaire de constitutionnalité concernant le mariage homosexuel, et il avait estimé qu'il n'était pas de son ressort "de se substituer son appréciation à celle du législateur sur ce point".