Gérard Collomb : pourquoi sa citation sur les banlieues refait surface après sa mortAFP
Après la mort de l'ancien maire de Lyon, ce samedi 25 novembre, et dans un contexte de fortes tensions depuis le décès de Thomas lors d'un bal à Crépol, sa citation sur les banlieues a été reprise par de nombreux politiques de l'extrême droite à l'ultra gauche... Non sans malaise.
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"Aujourd'hui on vit côte à côte, je crains que demain on ne vive face à face". Dès l’annonce de sa disparition ce samedi 25 novembre, de très nombreux politiques ont exhumé une citation de Gérard Collomb. Soit pour souligner la lucidité de l’ancien maire de Lyon, soit pour lui attribuer une signification prophétique, assez éloignée du contexte dans lequel celle-ci a été prononcée.

A nnonciateur de bien des drames ?

Une déclaration que l’ancien ministre de l’Intérieur avait faite au moment où il remettait les clés de Beauvau à son successeur, Christophe Castaner. Il y a cinq ans précisément, le 3 octobre 2018. Gérard Collomb alertait alors sur l’état des banlieues, rappelle un article du Huffington Post.

"C’est la loi du plus fort qui s’impose, des narcotrafiquants, des islamistes radicaux, qui a pris la place de la République", prévenait-il, appelant à adopter "une vision d’ensemble" pour sortir les quartiers de la ghettoïsation et ainsi "recréer de la mixité sociale". Un constat, déjà énoncé en 2015 dans l’indifférence générale, qui est partiellement repris par ses anciens adversaires politiques.

Notamment à droite et à l’extrême droite, où celui-ci est perçu comme annonciateur de bien des drames, des émeutes qui ont éclaté après la mort de Nahel au meurtre du jeune Thomas. Éric Zemmour, Éric Ciotti, Jordan Bardella, Valérie Pécresse, Marine Le Pen…

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Tous citent ce constat, ou y font allusion. "Les prémices de sa terrible prophétie se réalisent le soir de sa mort, à Romans-sur-Isère ", s'accapare sur le réseau social X Marion Maréchal, faisant ainsi un lien entre son discours et la descente de militants d’extrême droite dans le quartier de la Monnaie, d’où viennent une partie des agresseurs de Crépol.

Une clairvoyance tout récemment attribuée par ses anciens adversaires politiques, à l’image de Marine Le Pen qui a plusieurs fois réclamé sa démission du ministère de l’Intérieur du temps où il était en poste. En janvier 2018, la même l’accusait d’être dans la "culture du déni" et le décrivait en représentant de "l’angélisme de la vieille gauche". De quoi relativiser la soudaine conversion au "collombisme" de la part de la droite et de l’extrême droite, qui omettent de citer l’aspect "mixité sociale " défendu par l’intéressée dans ce même discours... nuance le Huffington Post.  Du côté de ses anciens compagnons de route un autre son de clôche.

"Au-delà de ce que certains lui font dire"

Une mixité sociale retrouvée en revanche chez les anciens compagnons de route de Gérard Collomb. "Comme ministre, il n’eut pas le temps de traduire en actes sa lucidité sur les risques de fracturation de notre société. Gérard était doté d’une inépuisable ténacité, d’un rare courage et d’une vive intelligence", a salué François Hollande, qui l’a longtemps côtoyé du temps où ils étaient au Parti socialiste. Interrogé sur cette citation ce dimanche 26 novembre sur  franceinfo, le président Renaissance de la Commission des Lois, Sacha Houlié, a loué une sortie qui "va au-delà de ce que certains, à droite ou à l’extrême droite, voudraient lui faire dire ".

"il semblait déjà avoir conscience de l’instrumentalisation de ses propos"

Pour Louis Pelaez, conseiller métropolitain d'opposition, cette récupération par l'extrême droite ne fait pas sens. "Il s'est toujours considéré comme un homme de gauche", atteste-t-il sur le plateau de BFM Lyon. Et de développer: "J'ai été blessé hier de voir par exemple les journaux reprendre les réactions de Marine Le Pen, de Zemmour, de Marion Maréchal Le Pen. Ils utilisent sa mort ou la phrase qu'il a pu dire..." Pour Louis Pelaez, l'ancien maire de Lyon "avait profondément peur de ce qui allait se passer dans ce pays et notamment peut-être de l'arrivée de l'extrême droite" et craignait que la société ne "se fracture".

D'autant qu'il semblait avoir conscience de l’instrumentalisation de ses propos. Contacté par Le HuffPost  fin juin, deux jours après le début des émeutes, il n’avait pas voulu "s’engager dans le débat politique" estimant simplement que sa citation de l’époque "n’était pas sans fondement". Comme si, conscient du poids et du caractère sensible de ses mots, il refusait d’endosser le rôle du prophète, pointe le journal.