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La Première ministre n’aura pas traîné. Alors que les députés retrouvent à peine l’inconfort des bancs de l’Assemblée nationale, Elisabeth Borne a dégainé ce mercredi 27 septembre en session extraordinaire le premier 49-3 de cette rentrée parlementaire, sur le projet de Loi de programmation des finances publiques (LPFP). “Premier de cette rentrée”, car ce n’est certainement pas le premier à l’actif de la Première ministre macronienne, et il existe un doute légitime à ce que cela soit le dernier.
L’article 49, alinéa 3 de la Constitution, qui, rappelons-le, permet au premier ministre, “après délibération du conseil des ministres, d'engager la responsabilité du gouvernement devant l’Assemblée nationale” sur le vote de certains textes, fait régulièrement office de bouclier pour le gouvernement d’Elisabeth Borne. Bouclier, ou bras armé : à 11 reprises déjà, il a permis à l’exécutif de faire passer un projet de loi sans vote devant les députés.
49-3 : le gouvernement (re)joue la sécurité
Ce mercredi encore, à minuit passé, la Première ministre a dû justifier l’utilisation du décrié article sur la LPFP. “Aucun groupe n’est prêt à voter ce texte essentiel à notre pays. Ce texte a déjà été rejeté en première lecture. Nous avons besoin de cette loi de programmation de nos finances publiques. Nous ne pouvons pas prendre le moindre risque”. Elisabeth Borne a argumenté sur un texte de “responsabilité”, en matière de “souveraineté”, de “clarté”, vis-à-vis de la “transition écologique” et des “engagements européens” de la France.
La LPFP doit fixer la trajectoire budgétaire du pays jusqu’en 2027, et ses objectifs sont aussi hauts que ses contraintes : elle doit permettre de faire baisser le poids de la dette (qui vaut à la France d’être fébrile sur les marchés financiers mondiaux) de 4 points pour atteindre 108,1% du PIB et de revenir sous les 3% de déficit public (à 2,7% du PIB) avant la fin du quinquennat. Dans un contexte d’inflation, “ce texte est fondamental pour la crédibilité budgétaire de la nation française”, a déclaré le ministre de l’économie, Bruno Le Maire, le 25 septembre, devant la commission des finances de l’Assemblée nationale. Comme si le gouvernement, sachant déjà aller au-devant de difficultés sur le vote des députés, avait cherché en amont à légitimer l’arrivée d’un douzième 49.3 elisabétain.
Des huées à l'Assemblée
Il faut dire qu’Elisabeth Borne a bien veillé à ne jamais fermer cette porte : en mars, la Première ministre avait assuré que “l’objectif qu’[elle se] fix[ait] pour l’avenir, c’est : pas de 49.3 en dehors des textes financiers” (Emmanuel Macron avait par la suite contredit cet engagement). Le 3 septembre, la patronne de Matignon affirmait, consciente de l’impopularité du gouvernement à l’Assemblée “les oppositions considèrent que voter un budget, c’est dire son appartenance à une majorité. Les oppositions ne voudront pas, c’est tout à fait respectable, et on aura à recourir certainement cet automne à des 49.3, car notre pays a besoin d’un budget.” Voilà la rhétorique du gouvernement : un contre tous, tous contre un. Ainsi le rapporteur général du Budget Jean-René Cazeneuve (Renaissance), dénonce des groupes, "diamétralement opposés" sur les questions financières, "mais (qui) s’allient uniquement pour battre le gouvernement".
L’annonce du 49.3 a déclenché,” comme d’habitude” diraient les cyniques, des protestations sur les bancs de l’Assemblée. Les élus “insoumis” présents en nombre malgré l’heure tardive, ont copieusement hué la Première ministre ce mercredi, accompagnés dans la colère par les élus du Rassemblement national (RN), dont certains ont claqué leur pupitre. Cette nouvelle utilisation du 49.3 a comme des relents d’amertume, alors que le gouvernement était parvenu à contrer la motion de rejet préalable au texte déposée par le groupe socialiste et votée par les groupes de la Nupes, le RN, et le groupe Liot.
Une motion de censure déposée
Dans la foulée de l’annonce de l’engagement de la responsabilité du gouvernement, les députés de la Nupes ont annoncé le dépôt d’un texte commun : “Nous ouvrons notre saison de la censure populaire en déposant une motion de censure”, a expliqué, depuis la salle des Quatre-Colonnes, la cheffe du groupe “insoumis”, Mathilde Panot, entourée de députés socialistes, communistes et écologistes. “Nous avons un pouvoir qui ne tient qu’à un fil”, a poursuivi Mme Panot. "On a un gouvernement qui est 49.3 dépendant", a fustigé son homologue socialiste Boris Vallaud. Le président LFI de la commission des finances, Eric Coquerel, a pointé “un constat d’échec de l’exécutif et de la démocratie parlementaire”.
Le gouvernement peut-il tomber ?
Se pourrait-il que ce 49.3 soit le dernier de ce gouvernement ? Se pourrait-il que les députés adoptent une motion de censure qui aurait pour effet la démission du gouvernement ? Pour cela, il faut a minima que les oppositions s’allient dans la contestation, car le succès de la motion de censure est conditionné à l'union de leurs voix. Coté Républicains, les députés se sont prononcés contre le projet de loi de l’exécutif. “Nous sommes en désaccord profond avec les choix du gouvernement. Puisque nous refusons de nous y associer, je pense qu’il n’y aura pas de vote. Le gouvernement sera obligé d’engager sa responsabilité”, prédisait d’ailleurs le président du groupe Les Républicains, Olivier Marleix, en amont des débats. Mais seraient-ils prêts à censurer le gouvernement pour autant? La réticence est forte jusqu’ici.
Le RN : inconnue du jeu
Côté RN, le doute plane encore, alors que le parti était le seul groupe parlementaire à s’être dit prêt à ne pas voter contre le texte proposé par le gouvernement. Le RN annoncera ce jeudi s’il dépose une motion de censure ou non. “Il faut que le gouvernement comprenne qu’il ne peut pas gérer la France par le 49-3, a déclaré de son côté le président du groupe indépendant Liot Bertrand Pancher. Si aucune motion de censure n’est adoptée cette semaine, le gouvernement ne soufflera qu’un temps. Pas moins de seize autres utilisations de 49-3 sont attendues dans les prochaines semaines sur les deux projets de loi de finances et de financement de la Sécurité sociale – présentés mercredi matin en conseil des ministres – ainsi que sur la loi de règlement.