Face à la montée des cyberattaques, le FBI et la CISA recommandent d’arrêter d’envoyer des SMS entre utilisateurs d'iPhone et d'Android. Un conseil qui ne vise pas seulement les Américains mais tous les...
"Tout mon soutien aux catholiques de notre pays après le dramatique assassinat d’un prêtre en Vendée", écrivait Gérald Darmanin sur Twitter, le lundi 9 août 2021. L’homme d’église qui a été tué s’appelait Olivier Maire et il officiait au diocèse local, dont il était le supérieur provincial, informe Europe 1. Il avait 60 ans et, à en croire les premiers rapports d’autopsie, il est décédé "après avoir reçu des coups". Les sources policières ont pu écarter la piste d’une attaque au couteau, mais les causes de la mort n’ont pas encore été établies de manière très précise. L’autopsie doit permettre de les identifier. Dans l’immédiat, rien ne permet de penser que c’est l'œuvre d’un terroriste ou qu’un tel acte porte un message politique.
En effet, le principal suspect est un homme de nationalité rwandaise, déjà placé sous contrôle judiciaire dans le cadre de l’enquête sur l’incendie de la cathédrale de Nantes, survenu en juillet 2020. Il s’est lui-même présenté à la gendarmerie et souffre de troubles psychiatriques nécessitant la levée de sa garde à vue, jugée "incompatible avec son état de santé". Il est depuis à l’hôpital, où il doit être soigné.
Meurtres, assassinats, attentats : les prêtres font-ils office de cible ?
C’est loin d’être la première fois qu’un prêtre devient la cible de tels gestes. Quand bien même les affaires diffèrent en tout point, il demeure difficile de ne pas penser à l’affaire Jacques Hamel, un sacerdoce égorgé dans sa propre église en 2016. A l’époque, les deux tueurs avaient été abattus par la police et leur geste revendiqué par l’Etat Islamique.
Plus récemment, le père Roger Matassoli était retrouvé mort dans l’Oise en 2019. Tué par asphyxie, il faisait l’objet d’une plainte pour "comportements inappropriés sur mineur". Sans oublier, bien sûr, le meurtre du sacristian de la basilique de Notre-Dame-de-l’Assomption à Nice, survenu en octobre 2020. Deux fidèles avaient aussi été tués au couteau.
De quoi poser une question : les prêtres ont-ils une cible peinte sur le dos ?
Le djihad mène-t-il une guerre contre nos prêtres ?
"Rappelons d’abord que l’assasinat du père Maire n’est pas comparable à celui de Saint-Etienne-du-Rouvray. Il ne porte pas de message politique et n’aurait probablement pas pu être anticipé", énonce d’entrée de jeu Alain Chouet, ancien officier de renseignement français (DGSE), co-auteur de nombreux ouvrages relatifs à l’islamisme et au terrorisme parmi lesquels Au coeur des services spéciaux, La menace islamiste : fausses pistes et vrais dangers (ed. La Découverte).
La question demeure néanmoins. "Un homme de religion est mécaniquement porteur de valeurs culturelles, spirituelles et religieuses qui peuvent être opposées à d’autres valeurs du même ordre. En ce sens, ils peuvent être ciblés pour ce qu’ils incarnent par ceux qui souhaiteraient surpasser les valeurs en question. Cependant, on ne constate pas, dans toute l’expression de l’action terroriste salafiste, un ciblage particulier des hommes de religion. Quand ils sont attaqués, ce qui arrive bien évidemment comme en témoigne l’affaire Jacques Hamel, c’est surtout par des jeunes Français qui ne connaissent pas la religion musulmane, sa culture et fantasment la doctrine des terroristes", juge l’expert.
Pour François-Bernard Huyghe, politologue, directeur de recherche à l’IRIS et président de l’Observatoire stratégique de l’information, un autre facteur permet d’identifier les hommes de foi comme des cibles très spécifiques.Lui aussi tient cependant à faire la nuance avec la mort du Père Maire. "Entendons nous bien sur le mot terroriste. Force est de constater, néanmoins, qu’il y a eu plusieurs assauts dirigés contre les prêtres parmi les actions djihadistes qui ont ensanglanté notre pays depuis 2012. Cependant, un plus grand nombre d’attentat ont été tentés - et parfois réussis - contre des lieux de culte", rappelle-t-il, égrenant tristement attaque après attaque, parmi lesquelles la basilique de Nice, Montpellier ou Notre-Dame de Paris.
"On compte environ 40 000 églises sur le sol français. Et tous les ans, on dénombre entre 1 000 et 1 500 attentats ou tentatives d’attentats contre elles", complète Alain Chouet. Un nombre important et pourtant peu communiqué.
Pourquoi s’attaquer aux prêtres plutôt qu’aux autres ?
"Tous les djihadismes ne s’attaquent pas de la même façon aux prêtres ou aux lieux de cultes chrétiens. C’est surtout celui d’obédience Daesh qui semble les cibler avec prédilection", observe sans ambages François-Bernard Huyghe, qui signait récemment L'art de la guerre idéologique aux éditions du Cerf.
"Le principe même du terrorisme, c’est de s’attaquer à des cibles symboliques. Chaque mouvement met le curseur à une certaine hauteur. Les nihilistes socialistes russes s’attaquaient pour l’essentiel à des individus directement liés à l'appareil d’Etat. Aujourd’hui, les djihadistes s’en prennent généralement aux policiers ou aux militaires — qui incarnent eux aussi l’ordre à la Française ou à l’occidentale et qui constituent des cibles ‘viriles’", poursuit le politologue, non sans rappeler que "le ministre de la propagande de l’Etat Islamique s’est attelé à justifier théologiquement et politiquement l’attentat terroriste perpétré contre n’importe qui". Alors dans ce cas, pourquoi les hommes de foi ? Pourquoi les lieux de cultes ?
"Les prêtres constituent des cibles faciles : ils sont reconnaissables et ne sont pas armés. En outre, la littérature de l’Etat Islamique est très anti-catholique : les curés représentent à leurs yeux l’extension de la période des croisades. Enfin, cela reste plus impactant qu’un assaut mené sur un inconnu tout juste vêtu d’un t-shirt", tranche le directeur de l’Observatoire stratégique de l’information.