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Planet.fr : Au premier tour de la présidentielle, Emmanuel Macron réalisait un score de 27% auprès des retraités, soit un résultat supérieur à son score sur l’ensemble de la population. Aujourd’hui l’idylle semble terminée. Quels sont les reproches que formulent les manifestants à l’égard d’Emmanuel Macron et de sa politique, au delà de la seule hausse de la CSG ?
François Bellanger : Tout d’abord les retraités souffrent de ne pas être traités équitablement. Il y a une certaine forme de dédain que nous avons aussi ressenti à la CFR quand nous avons contacté le président de la République au sujet de la hausse de la CSG, qui nous a renvoyé vers son ministre du budget, Gérald Darmanin. Ce dernier ne nous a jamais répondu.
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Ensuite, les manifestants nourrissent plusieurs reproches à l’encontre d’Emmanuel Macron et de la politique qu’il mène.
- Ils estiment que le taux d’imposition à la CSG (environ 1200 euros net par mois) est très faible. Quoiqu’en dise le président, et même si c’est lui qui le dit, avec 1200 euros par mois on est pas aisés.
- Toujours sur la CSG, l’exonération pour les retraités touchant moins de 1200 euros mensuels n’estpas systématique : un ménage de deux individus est exonéré s’il touche moins de 1800 euros par mois en cumulé environ. Ce faisant, si chaque partie du ménage touche 1000 euros par mois, par exemple, le ménage n’est pas exonéré.
En outre Emmanuel Macron est victime de l’exaspération des retraités qui ont très souvent été mis à contribution ces dernières années. Il y a d’abord eu la contribution d’assurance solidarité autonomie (CASA), prélevée au taux de 0,3 % sur différents revenus bruts (retraites, mais aussi pension d’invalidité et allocations de préretraite) instituée en 2004. Depuis 2013, les suppléments familiaux des retraites sont devenus imposables. Enfin, cela va faire cinq ans que les retraites sont gelées ! Il y a de quoi comprendre un certain le ras-le-bol, qui retombe aujourd’hui sur Emmanuel Macron. Une autre attitude aurait pu améliorer les choses.
De notre côté à la Confédération Française des Retraités (CFR), nous ne sommes pas opposés à une hausse de la CSG. Néanmoins, il nous semble légitime qu’elle génère des contreparties, au nombre de deux :
- La suppression de la cotisation d’assurance maladie retraite complémentaire du secteur privé. Prélevée au taux de 1%, elle ne fait plus sens aujourd’hui.
- La déductibilité fiscale des complémentaires santés, au même titre que les actifs, mais que les retraités payent en moyenne 3 à 4 fois plus cher.
Si Emmanuel Macron entreprend au moins l’une ou l’autre de ces deux contreparties la situation avec les retraités devrait à coup sûr s’améliorer. Dans le cas contraire, il est difficile d’affirmer que la situation laisserait des traces durables sur tout le quinquennat, mais il est certain que cela génèrerait une vraie déception chez les retraités.
Planet.fr : Emmanuel Macron entendait, durant sa campagne, demander un effort aux retraités les plus aisés. Aujourd’hui il adoucit son propos. Au gouvernement, on explique que la “culpabilisation des retraités, ça ne marche pas”. Comment accueillez-vous ces discours ?
François Bellanger : Emmanuel Macron a été investi sur un programme qu’il a eu l’occasion de présenter et de défendre à l’occasion de l’élection présidentielle. La hausse de la CSG était annoncée et les Français ont voté en connaissance de cause. Les retraités, probablement plus encore. Il s’agit d’un des fragments de la population qui s’abstient le moins et qui a voté fortement en faveur du candidat LREM. Nous le savions.
Toutefois, certains discours ont du mal à passer. On entend parfois, par exemple, que les retraités ont eu leur cadeau avec la réforme de la taxe d’habitation. C’est faux ! Cette réforme n’est pas un cadeau pour les retraités, c’est un cadeau pour tout le monde, sous condition d’éligibilité. En outre la suppression potentielle de la taxe d’habitation annoncée par le président de la République entraîne de nombreuses interrogations.
Autre point : cette volonté de présenter les retraités comme des nantis, issus d’une génération dorée. A mon sens, c’est un scandale. Récemment un député LREM dont je tairais le nom a tenu des propos comparables, avant de subir un sermon et de s’excuser. Il a demandé à rencontrer les dirigeants de la CFR, ce que nous avons accepté. Après lui avoir présenté notre argumentaire, nous avons pu trouver certains terrains d’entente, notamment sur la suppression de la cotisation d’assurance maladie retraite complémentaire du secteur privé. Dans la mesure où il occupe un poste important, nous nourrissons l’espoir d’une amélioration.
Planet.fr : En dehors des contreparties déjà évoquées, quelle est la direction qu'Emmanuel Macron devrait prendre pour réformer le système des retraites, selon vous ?
François Bellanger : La CFR a longtemps travaillé sur une réforme systémique des retraites vers un modèle universel, par définition plus juste et donc plus rassurant. Nous avions envoyé, alors que le candidat Macron était encore en campagne, un projet de loi comprenant ce système de retraite universelle par point qui a été repris dans son programme ensuite. Nous serions heureux de le voir développer plus avant de telles idées.