De nouvelles règles d’indemnisation entreront en vigueur en avril 2025 et impacteront durement les plus âgés.
On estime qu’en France, environ 200 000 personnes sont victimes d’une usurpation d’identité chaque année. Sophie, 28 ans, a récemment déposé plainte pour "utilisation du nom d’un tiers à des fins de poursuite", pour des faits qui ont débuté en 2015 et qui continuent à avoir des conséquences sur son quotidien.
"J’ai vendu ma Fiat 500 en août 2015 et j’ai envoyé les papiers à la préfecture en recommandé, mais la femme à qui j’ai vendu mon véhicule ne l’a pas fait, explique-t-elle. La préfecture n’a jamais enregistré ma vente malgré mes envois de recommandés. Cette femme a continué à rouler avec ma carte grise barrée, mais elle n’a jamais changé les papiers à son nom, ne s’est jamais assurée avec la voiture".
À partir de la fin de l’année 2016, Sophie commence à recevoir des contraventions : "J’ai aussi reçu le courrier d’une assurance disant que j’avais causé un accident avec une personne, qui était leur assuré, que j’avais fait un délit de fuite et qu’il fallait que je prenne contact avec eux, qu’ils allaient me poursuivre si je ne le faisais pas". Pourtant, aucun doute, Sophie ne conduit plus ce véhicule depuis longtemps et n’a donc pas pu causer cet accident.
Usurpation d’identité : "J’ai reçu des amendes majorées jusqu’à 2000 euros"
Depuis 2016, elle a reçu 24 contraventions, pour des stationnements gênants ou interdits, des accidents et même un délit de fuite. "Comme j’ai déménagé entre temps, elles n’arrivaient plus à la même adresse, donc j’ai reçu des amendes majorées jusqu’à 2000 euros", précise la jeune femme. Mais les problèmes ne s’arrêtent pas là, puisque Sophie a également eu quatre saisies administratives à tiers détenteur (SATD), qui permettent au Trésor public de se faire payer à partir d’un compte bancaire. Deux ont été faits au sein de sa banque actuelle, alors qu’elle n’a "jamais eu un centime de découvert". Par chance, elle a obtenu son crédit immobilier "une semaine avant le premier SATD", mais elle sait désormais que ceux qui sont passés sur son compte en banque l’empêcheront, pour le moment, d’obtenir d’autres prêts. Le seul moyen dont Sophie dispose est d’obtenir une mainlevée, qui est envoyée par les tribunaux. Elle a déjà réussi à faire annuler trois SATD : "Le problème c’est que l’officier du ministère public lit le courrier dans un délai de six mois et apporte une réponse encore trois mois après. Il faut donc attendre neuf mois pour avoir une mainlevée".
Pour régler ce problème, Sophie n’a d’autre choix que de prendre des journées à son travail pour "passer dans les tribunaux afin d’obtenir des mainlevées sur les amendes". "J’ai passé cinq heures à la trésorerie des amendes le mois dernier, j’ai dû prendre des journées et passer des heures entières dans certains services pour pas avoir grand-chose", ajoute-t-elle. Pourtant, dès le début, Sophie prend les choses en main afin de régler cette histoire au plus vite. Dès le courrier de l’assurance reçu, elle se rend au commissariat pour déposer plainte, mais la police refuse de prendre en compte sa demande : "Elle a dit que ce n’était pas une usurpation d’identité parce que cette femme n’avait pas pris ma carte d’identité". La jeune femme finira par pouvoir déposer plainte… En octobre dernier, soit trois ans après avoir reçu les premières contraventions.
Usurpation d’identité : "Ça demande du temps, de l’argent"
Pourtant, les problèmes de Sophie auraient pu s’arrêter beaucoup plus tôt si la femme à qui elle a vendu le véhicule n’avait pas eu autant de chance. "Moins d’un an après la vente, cette femme a eu un petit accident avec la voiture et la police a bien vu qu’elle n’avait pas fait les papiers, qu’elle n’était pas assurée, explique Sophie. Elle a subi une immobilisation administrative du véhicule, c’est-à-dire qu’il est bloqué, il ne doit plus du tout rouler". Seulement, après cette arrestation, la femme repart avec son véhicule et continue donc aujourd'hui de rouler avec : "À cause de cette immobilisation administrative du véhicule, on ne peut plus changer le nom de la carte grise parce que la voiture ne peut plus être en circulation". Cela signifie que cette femme peut continuer à rouler à vie avec une carte grise barrée et qu’aucun changement ne pourra plus jamais être effectué. Quand elle leur a demandé pourquoi ils n’avaient pas pu immobiliser le véhicule, les policiers ont répondu à Sophie "qu’ils manquaient de moyens et qu’ils ne pouvaient pas tout contrôler".
Une situation ubuesque, à laquelle la jeune femme n’a toujours pas trouvé de solution. Elle a pris les services d’un avocat, mais lui non plus n’a aucun moyen de faire accélérer les choses. "La prochaine étape, mais je n’ai vraiment pas envie de le faire, c’est de porter plainte au tribunal civil et de demander des dommages et intérêts car ça demande du temps, de l’argent…", précise Sophie. Son unique chance dans cette affaire est d’avoir obtenu de la part de la préfecture de police un courrier disant que c’était bien une autre femme qui conduisait son véhicule et qu’elle n’avait pas fait changer la carte grise : "Heureusement que la police a attesté de ça, sinon je n’aurais pas de preuve".
Usurpation d’identité : "J’ai écrit un courrier au président de la République"
Aujourd’hui, pourtant, Sophie se trouve dans l’impasse et continue de tout faire pour régler la situation. Elle affirme ne s’être "pas du tout" sentie aidée dans ses démarches : "J’ai envoyé plus d’une centaine de recommandés et je ne les ai pas envoyés à un cabinet d’huissiers, je les ai envoyés aux tribunaux, à tous les préfets de police possible… À des endroits où ils doivent, normalement, s’occuper de cela". Elle a toutes les preuves, tous les papiers pour prouver la vente de 2015, mais elle confie ne plus savoir "quoi faire" de plus : "Le mois dernier j’ai écrit un courrier au président de la République. J’ai eu une réponse disant qu’ils avaient bien pris en compte ma demande".
Quatre ans après avoir vendu sa voiture, elle estime que "ce n’est pas normal" qu’elle soit encore poursuivie pour ces amendes dont elle n’est pas responsable. "Je suis quelqu’un de tout à fait en règle, j’envoie tous les papiers, je ne comprends pas qu'on me laisse comme ça. J’envoie sa carte d’identité, son adresse, ils ont tout, les papiers de vente… Pourquoi ils ne vont pas la poursuivre, pourquoi ils continuent de me poursuivre ?", s’interroge Sophie. "Quand ils font des mainlevées, ils ne la poursuivent pas derrière pour obtenir l’argent. Elle fait tout ça et elle n’est aucunement poursuivie, c’est complètement injuste", ajoute la jeune femme. "Je sais qu’il y a plus grave, que la santé c’est le plus important", tempère Sophie, mais elle ne compte pas arrêter de se battre tant qu’elle n’aura pas obtenu gain de cause.