La marge vous permettant de ne pas être flashé sur l’autoroute par les voitures radar serait bien supérieure à 130 km/h. Et c’est la sécurité routière qui le dit.
Dérive. Depuis quelques années, un groupe musical se faisant appeler Les Brigandes connaît un relatif succès sur Youtube. Masquées dans leurs clips vidéos, les chanteuses font mouche avec des textes marquées à l’extrême-droite. Un de leur plus grands succès ? Leur chanson Foutez le camp, qui cumule 900 000 vues et dans laquelle on peut notamment entendre : "Chacun chez soi, si vous n’aimez pas la France, ça n’a pas d’importance. Foutez le camp (…) Prenez un bateau".
Derrière ces paroles se cache un parolier du nom de Joël Labruyère. Dans le collimateur de la Miviludes (Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires), l’homme en question est à la tête d’un mouvement considéré comme sectaire appelé La Nation libre, "croisement d’un royaume elfique et d’une loge maçonnique, se nourrissant de thèses complotistes, écrit la journaliste du Nouvel Obs, Nolwenn Le Blevennec, qui y a passé deux jours. Parmi les préceptes, un rejet de la médecine, entre autres.
La Nation Libre, très basée sur le complotisme dénonce par ailleurs les loges maçonniques, ce qui ne l’empêche pas d’en reprendre certains codes. Elle a aussi des liens avec l’anthroposophie, un mouvement créé par Rudolf Steiner qui soutenait des théories "proto-nazies", comme le souligne le président de la Miviludes, Serge Blisko, contacté par Planet.
Organisation et hiérarchie
Il y aurait aujourd’hui entre une vingtaine et une trentaine de membres qui vivraient autour du gourou, à la Salvetat-sur-Agout dans l’Hérault. Le groupe est décrit par la Miviludes comme un mouvement sectaire "comme on en faisait autrefois". Il s’agit d’un style de vie en communauté autour de Joël Labruyère qui, "très directif, donne le la, et prend les décisions (…) On sent vraiment une espèce de coercition psychologique, morale et mentale". Si le groupe hiérarchisé dénote, c’est parce qu’il est "aujourd’hui battu en brèche par nouveaux modèles sur internet avec des gens qui se forment en groupe et où il y a moins de hiérarchie", précise Serge Blisko. Ce qui n’empêche pas les Brigandes d’avoir investi le web par ailleurs.
Avec son groupe musical et la Nation Libre, Joël Labruyère, n’en est pas à son coup d’essai. Il est dans le collimateur de la Miviludes depuis plusieurs années. "C’est un personnage connu, assez habile pour ne jamais tomber sous le coup de la justice. Il a fondé un certain nombre de mouvements dans le passé, précise Serge Blisko. dont l’Omnium des libertés, avec d’autres mouvements sectaires, qui visait justement à défendre les mouvements sectaires". A Nolwenn Le Blevennec, le gourou a livré quelques éléments de son enfance, et notamment la faillite de l’entreprise de son père qui a conduit sa mère à aller faire des ménages.
S’il n’y a pas de "droit de cuissage" a-t-il assuré, Joël Labruyère a cependant eu plusieurs compagnes, dont l’une est morte d’un cancer en 2011. Le trouble entourant l’affaire a fait l’objet d’un nouvel article du Nouvel Obs et a de nouveau braqué la lumière sur la petite communauté.
Face à la justice
Manipulateur avec les membres de son mouvement, Joël Labruyère peut aussi être virulent envers ceux qui le quittent. "Il y a eu ce documentaire sur M6, où l’on peut voir Joël Labruyère tenir des propos très méprisant sur cette dame qui est décédée dans des circonstances troublantes, abandonnée par le groupe, alors que ce fût sa maîtresse. Il n’y a pas de limites", détaille Serge Blisko.
Nolwenn Le Blevennec en a d’ailleurs fait les frais ayant elle-même reçu des "menaces larvées", et pour lesquelles elle a déposé une main courante. Par ailleurs, entre cinq à sept plaintes sont en cours, dont pour certaines il est question d’emprise, d’abus de faiblesse ou d’enfants. "Les choses se compliquent quand des couples se séparent et que l’un des parents quitte le mouvement", précise Serge Blisko qui a lui aussi reçu des emails parfois salés.
Après sept ans sans avancement, le dossier contenant les plaintes a finalement été transféré au Tribunal de Grande Instance de Paris par le procureur général.