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Viol de personnes âgées : un phénomène nouveau ?
A Lyon, une femme âgée de 87 ans a récemment été violée chez elle. Son martyre aura duré près de deux heures. Un inconnu, entré par effraction chez elle vers deux heures du matin l’a attaquée, armé d’un couteau. Il a depuis été appréhendé par la police et a fini par avouer le viol de cette femme dont le corps porte encore les marques physiques de cette agression, comme l’indique 20 minutes. Dans un premier temps, il a tenté d’expliquer que l’octogénaire était consentante avant d’être confronté à sa victime, encore traumatisée.
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C’est loin d’être la première fois qu’une femme âgée est agressée de la sorte. Pourtant aussi affreuses que puissent-être ces violences, on manque d’informations sur le sujet. "C’est un vrai problème", indique Muriel Salmona, psychiatre-psychotraumatologue, chercheuse et formatrice en psychotraumatologie. Elle est également la présidente-fondatrice de l’association Mémoire traumatique et victimologie, qui forme et informe les intervenants prenant en charge les victimes de violences, notamment sexuelles. "Il existe évidemment des études de victimologie sur le viol. Malheureusement passé 70-75 ans, nous n’avons pas de chiffres. On sait que le phénomène existe, mais nous n’en connaissant pas l’ampleur exacte", assure-t-elle. En 2016, 10 300 femmes de 50 à 69 ans ont été victimes de viols ou de tentatives de viol, selon l’enquête virage réalisée par l’Institut national d’études démographiques (Ined). Sans compter les 80 000 qui ont été victimes d’agressions sexuelles en tout genre. "De plus en plus de gérontopsychiatre s’intéressent au problème mais on manque encore de chiffres", ajoute-t-elle.
Mais pourquoi s’en prendre à des personnes âgées ? En 2017, France Info publiait une étude sur les violences sexuelles dans les Établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD). Le petit fils de Paulette, victime d’agression sexuelle, se posait la même question. "D’une façon générale, plus des personnes sont vulnérables plus elles deviennent des cibles. C’est le cas pour les personnes âgées ou handicapées comme pour celles en situation de minorité ou de discrimination. Plus elles sont dans une situation de faiblesse, plus elles sont susceptibles d’être victimes d’un viol", souligne Muriel Salmona pour Planet. Pour elle, il ne s’agit pas d’un phénomène neuf. "Ce n’est pas quelque chose dont on parlait par le passé mais cela existait déjà. Quand on parle de viol des personnes âgées, on fait face à un véritable déni", précise la praticienne. "C’est notamment pour cela que les symptômes du viol chez les personnes âgées sont mis sur le compte de la vieillesse, de troubles du comportement ou de la maladie. Quand une octogénaire en établissement médicalisé dit qu’un individu est entré dans sa chambre et l’a violée, on lui répond qu’elle délire."
Viol de personnes âgées : plus qu'un acte sexuel, un acte de domination
Pour la psychiatre-psychotraumatologue, ce déni est directement hérité de la perception qu’on peut avoir du viol. "On conçoit le viol comme un acte sexuel. Ce n’est pas le cas. C’est avant tout un acte de domination, de destruction, de cruauté, de torture même. Il s’exerce dans un rapport de force", explique Muriel Salmona. Penser le viol en seul acte sexuel empêche donc de comprendre pourquoi des enfants ou des personnes âgées en souffrent également. "Les principales victimes sont les enfants", résume d’ailleurs la chercheuse. "On connaît le dénominateur commun de la plupart des violeurs", poursuit-elle, détaillant les raisons qui les poussent généralement à passer à l’acte. "Les agresseurs ont le plus souvent été exposés à des violences dans l’enfance et sont maintenant en mesure d’exercer une position dominante. C’est une combinaison qui constitue un facteur de risque." Il s’agit, selon elle, de "décharger une tension liée à un trauma". Parfois il y a aussi une "addiction à la violence" et, dans le cadre des personnes âgées notamment, une "volonté de transgression". "Violer un enfant ou un octogénaire c’est commettre un acte qui n’a pas tellement de sens, qui est impensable. C’en est d’autant plus traumatisant."
La plupart du temps, d’ailleurs, l’agresseur n’est pas un inconnu. "Comme pour tous les viols, la majorité sont le fait de gens connus par les victimes. Les personnes âgées ne dérogent pas à cette règle. Il s’agit souvent de l’aide-soignant en EHPAD, d’un membre de la famille ou d’un proche que la victime aidait. Les cas d’inconnus entrés par effraction, qui sont ceux rapportés et dont on entend parler ne sont pas représentatifs. Ils sont plus rares", assure Muriel Salmona pour qui on constate aussi des "conditions d’opportunités". Pire encore, peut-être ! Après le viol d’une personne âgée, qui sont loin d’être assez protégées et dont on minimise souvent la souffrance, on a plutôt tendance à "faire évacuer la victime" sans se soucier de "traiter le problème du côté de l’agresseur", insiste la docteure.