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Si la définition de l’addiction au sexe en tant que pathologie ne fait pas consensus, c’est encore plus le cas lorsqu’on aborde la question des cliniques privées pour la traiter. Accusée de harcèlement et d’agressions sexuelles, Kevin Spacey et Harvey Weinstein ont annoncé qu’ils suivaient désormais une cure de désintoxication pour soigner leur addiction au sexe. La plus célèbre aux Etats-Unis est peut-être The Meadows, située en Arizona, et dont le coût s’élève à 3400 dollars la nuit comme l’explique Vanity Fair.
Des établissements qui ne font pas l’unanimité
Si ce type d’établissement est courant aux Etats-Unis, ils sont loin d’être adoubés par tous. L’addiction au sexe ne figure d’ailleurs pas dans le Diagnostic and Statistical Manuel of Mental Disorders. David J. Ley, auteur de Le Mythe de l’addiction sexuelle et psychologue américain, n’hésite pas à parler de "colonies de vacances pour les riches" : "Il n’y a pas une once d’évidence que ces traitements fonctionnent. Ces établissements exploitent financièrement des gens qui sont désespérés, qui veulent sauver leurs images, leur carrière. Certaines personnes vont aussi dans ces cliniques pour montrer qu’ils réagissent, qu’ils font quelques choses et qu’ils prennent le problème au sérieux. C’est juste un coup de com'". Suivez son regard…
L’auteur américain va plus loin et estime tout simplement que l’addiction au sexe n’existe pas et lie l’émergence de ce terme à l’épidémie du SIDA au début des années 80. "A l’époque, le sexe était quelque chose d’effrayant et de mortel", ajoute-t-il. Selon lui, ceux qui se définissent comme des accros n'ont tout simplement pas de ''self-contrôle": "Choisir de ne pas exercer de contrôle sur sa sexualité c’est très différent de ne pas en être capable. Même si les sex-addict assurent qu’ils ne peuvent pas se contrôler, ces affirmations arrivent souvent quand ils ont des problèmes. Il n’y a pas de preuve ou d’étude qui montre d’ailleurs que c’est une question de self-control."
Une approche très différente en France
Cette approche, ce n’est pas du tout celle à laquelle souscrit le psychiatre Jean-Claude Matysiak, chef du service de traitement des maladies addictives au centre hospitalier du Littoral à Villeneuve-Saint-Georges, et auteur de nombreux ouvrages sur le sujet, dont Fantasmes et réalistes sur les sex addicts. "On peut tous être concernés par des comportements excessifs, par exemple au début d’une relation avec quelqu’un. Mais ça devient maladif quand il y a une souffrance. On a tous une sexualité différente, et il n’y a pas vraiment de norme, cependant la définition de l'addiction c'est le geste répétitif et la souffrance", précise-t-il de son côté.
Lui non plus, en revanche, n’est pas du tout convaincu par les traitements en cliniques américaines et estime le système français beaucoup plus efficaces. "Le problème, c’est que ce sont des endroits où les thérapies sont basées sur la culpabilité et l’auto-critique, qu’il faut faire devant tout le monde, et aussi évidemment sur l’argent. C’est un système payant qui coûte très cher. En France, on a un système de soins vraiment différent qui s’appuie sur des centres de consultation où les gens viennent se soigner parce qu’ils en souffrent. Aux Etats-unis, vous avez un joyeux mélange de dépendants sexuels authentiques, mais aussi de problème des couples, de gens qui ne sont pas malades en fait", détaille Jean-Claude Matysiak.
Dans les faits, les traitements proposés par ces cliniques obligent les patients à s’isoler sur plusieurs jours. Pour le psychiatre ce n’est pas une méthode qui peut fonctionner car "quelque part, elle éloigne la volonté". "On se dit ''je vais dans un centre, on va me désintoxiquer". Mais pour se soigner, il faut un un engagement volontaire, or il n’y a pas besoin d’isolement pour avoir cette engagement", ajoute-t-il.
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La société et la responsabilisation en question
Les accros au sexe sont-ils des agresseurs en puissance ? "Non, pas forcément, estime le Jean-Claude Matysiak. Il y en a qui sont dans leur constitution, des agresseurs sexuels, mais ce qui est important comme nuance, c’est que parfois, l’addiction au sexe sur internet ne va pas forcément déclencher un passage à l’acte mais va protéger du passage à l’acte". Quant à la question de la responsabilité, Jean-Claude Matysiak dénonces des confusions. "Aujourd’hui, il y a confusion, on se sert de ce concept pour déculpabiliser les gens de leurs actes. Une addiction est entre guillemets une circonstance atténuante mais une personne reste responsable de ses actes. Une addiction ne dépénalise pas", précise-t-il.
Pour David J. Ley, si l’addiction au sexe n’existe pas, il appelle en revanche la société à mieux appréhender les questions liées à la sexualité. "Nous avons besoin d’une meilleure éducation sexuelle, de plus d’exemple, de plus dialogues sur la diversité sexuelle. Nous devons parler de sexe en dehors des moments d’excitations, nous devons mieux penser comment intégrer le sexe dans nos vie", estime-t-il.