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Patrick Balkany a-t-il menti sur la libération de Simone Veil et l'histoire de son père ?
Elle a fini pour retirer la publication de son mur Facebook. A l'occasion des 75 ans de la libération d'Auschwitz-Birkenau, Patrick Balkany a voulu raconter aux Levalloisiens l'histoire de son père et a donc fait appel à son épouse, Isabelle. Détenu depuis le 13 septembre 2019 à la prison de la Santé, il n'était pas en mesure de le faire lui même rappelle LCI.
Le récit qu'il a fait, ensuite retranscrit par son épouse, n'a pas manqué de surprendre les historiens — pour dire le moins. "Isabelle, nous sommes la dernière génération qui peut encore transmettre ce que nos parents ont vécu… Je veux que tu rapportes aux Levalloisiens ce que je ne leur ai jamais raconté", commence un Patrick Balkany "littéralement épuisé par l'anémie et la douleur", ainsi qu'il est décrit par sa compagne.
"27 janvier 1945… Cela fait presque trois ans que mon père Gyula, venu à pieds de Hongrie pour s'engager dans la Résistance et dénoncé par des Français, est à Auschwitz… Les Russes 'libèrent' le camp… Gyula incite dix de ses compagnons à s'enterrer vivants pour ne pas les suivre… Quelle prescience de ce qui se passera pour beaucoup de ceux qui partiront avec leurs 'libérateurs'", poursuit-il avant d'attaquer le fond du propos : c'est son père qui aurait délivrée Simone Veil. "Après deux jours 'enterrés", le camp vidé, ces hommes, sous la direction de Gyula, partent vers le camp des femmes et libèrent celles qui, comme eux, se sont cachées… Parmi elles, une certaine Simone Veil, sa Soeur de coeur pour la vie !"
Problème ? Il s'agit, d'après les spécialistes, d'un mensonge éhonté.
Mensonge de Patrick Balkany : ce qu'en pensent les historiens
"Indécente utilisation de l'Histoire et de la Shoah", s'est offusqué l'historien Frédéric Salée, docteur en histoire contemporaine à l'université de Grenoble. Il ne manque d'ailleurs pas de rappeler que Simone Veil n'était pas à Auschwitz-Birkenau mais à Bergen-Belsen, d'où elle a été libérée le 15 avril 1945 par les forces britanniques.
Dans les colonnes de LCI, il détaille le mensonge du maire de Levallois-Perret. Selon lui, il "ne faut absolument pas remettre en cause le parcours" de son père, mais "tout ce qui touche à la libération de Simone Veil est faux".
Pour Annette Wieviorka, elle aussi historienne et l'une des plus éminentes spécialistes de la Shoah, il s'agit ni plus ni moins d'un mensonge. "Une soixantaine de milliers de déportés ont été évacués par les Allemands mi-janvier [1945, précise la rédaction de LCI]. Ils se sont retrouvés dans les camps de la Grande-Allemagne, à Buchenwald ou Bergen-Belsen. Parmi eux se trouvait Simone Veil", explique-t-elle.
Le mensonge de Patrick Balkany : ces autres points qui posent problème
Ce n'est pas le seul élément à choquer l'historienne. L'attitude des déportés lui paraît surprenante. "Les prisonniers juifs n'avaient pas du tout peur des Russes, même quand ils n'étaient pas communistes. C'étaient leurs libérateurs", affirme-t-elle, sans nier cependant que certains aient pu développer des stratagèmes similaires à celui décrit par le couple Balkany. Si elle dit n'avoir jamais eu vent de ce genre de situation, elle reconnait que des "faits incroyables se sont déroulés" durant la Seconde Guerre mondiale.
"En voulant écrire 'court', j'ai fait une erreur chronologique. Gyula, le père de Patrick, a effectivement connu Simone Veil à Auschwitz lorsque, comme les autres déportés, il effectuait les travaux du camp des femmes. Pardon, Mme Veil", a depuis précisé Isabelle Balkany, indique la chaîne d'information sur son site.