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Planet : La rivalité entre Manuel Valls et François Hollande a-t-elle toujours existé ?Patrick Girard* : "Elle n’est pas nouvelle. Ils étaient rivaux au sein du Parti socialiste bien avant d’accéder aux plus hautes sphères de l’Etat. François Hollande et Manuel Valls représentent deux courants opposés, le premier Mitterrandien et le second Rocardien. Récemment les cartes ont même été rabattues et c’est François Hollande qui a pris l’avantage. Lors du Congrès du Parti socialiste, le président a marqué plusieurs points grâce la victoire de Jean-Christophe Cambadélis. Ce n’est désormais plus Manuel Valls qui incarne le renouveau.
Planet : Leur rivalité se ressent-elle dans leurs relations au quotidien ?Patrick Girard : Tous les deux affichent une unité de façade. Mais en coulisses, les membres de leur entourage ne manquent pas de s’envoyer des commentaires acerbes. A ce jeu-là, ils sont pires que les deux principaux intéressés ! Même si le silence des derniers est assez significatif… C’est d’ailleurs pour ça que j’ai intitulé mon livre ‘Le Boa et le naja’. François Holland me fait penser à un serpent qui avale tout et étouffe sa proie tandis que Manuel Valls est plus semblable à un naja. Un serpent moins noble, moins impressionnant et qui tente de foudroyer sa proie avec son venin. Après tout, on peut être un président normal et un serpent d’exception ! Planet : François Hollande a-t-il des raisons de craindre Manuel Valls ?Patrick Girard : S’il en avait, aujourd’hui il n’en a plus. A l’instar de ce qu’avait François Mitterrand avec Michel Rocard, en nommant Manuel Valls Premier ministre, François Hollande l’a tué politiquement. Ces derniers temps, le grand espoir du chef du gouvernement était de voir la motion A du gouvernement l’emporter au Congrès du PS. Mais avec la victoire de Jean-Christophe Cambadélis, Manuel Valls s’est marginalisé. Il est désormais très peu représenté parmi les grandes instances du parti. Il n’est pas dans une bonne posture pour 2017 tandis que François Hollande, lui, a raflé la mise.
Planet : Manuel Valls a-t-il renoncé à 2017 ?Patrick Girard : C’est un homme suffisamment intelligent pour comprendre que cette élection n’est pas la bonne carte à jouer. Si entre 2012 et 2014, Manuel Valls est parvenu à franchir la distance entre Beauvau et Matignon, il sait en revanche qu’il ne franchira pas celle séparant Matignon de l’Elysée en 2017. Les carottes sont cuites, il en est conscient. Il n’a pas non plus envie d’essuyer un échec du PS, comme l’a fait Ségolène Royal en 2007. Manuel Valls ne veut pas vivre la même traversée du désert, il ne veut pas se 'royaliser'. Mais, et à l’instar de ce qu’il avait fait en se présentant à la primaire de 2011, il va continuer à poser ses pions en vue des élections d’après. Actuellement il lorgne sur 2022.
Planet : Pourtant plus populaire que François Hollande pendant plusieurs mois, Manuel Valls semble aujourd’hui au creux de la vague. Comment le vit-il ?Patrick Girard : Il est incroyablement silencieux depuis l’automne dernier. Même après les élections régionales, il n’a pas pris la parole pour essayer de tirer le tapis vers lui. Cela me rappelle un peu l’attitude de Jacques Chirac qui, fin 1975-début 1976, se préparait à quitter Matignon par surprise. Je ne dis pas que Manuel Valls va démissionner mais plutôt qu’il a entamé une période de retrait. C’est comme s’il se lavait les mains de la politique qui est faite, celle du président Hollande. Finalement, Manuel Valls s’est avéré être l’un des faux-espoirs de la politique. Ceux qui, comme un ballon de baudruche, se dégonflent très rapidement".
*Patrick Girard est l’auteur du Boa et le naja (éd. Du Moment)