L'affaire Colette Deromme, ce meurtre que l'on a failli attribuer à Xavier Dupont de Ligonnèsabacapress
Il y a tout juste 11 ans, l'homme « le plus recherché de France » disparaissait après avoir été vu une dernière fois, quittant un hôtel de Roquebrune-sur-Argens, dans le Var. A quelques kilomètres de là, dans une ville que l'homme connaissait particulièrement bien pour y avoir vécu des années auparavant, une quinquagénaire disparait elle aussi, au même moment. Coïncidence troublante ? L'affaire fait jaser. Récit.
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C’était le 15 avril 2011. Alors que les corps des cinq membres de sa famille n’avaient pas encore été découverts, ensevelis sous la terrasse du jardin familial, Xavier Dupont de Ligonnès quittait l’hôtel Formule 1 de Roquebrune-sur-Argens, dans le Var, après plusieurs jours de « cavale » organisée. Depuis, et malgré les recherches minutieuses des enquêteurs pendant toutes ces années, l’homme demeure introuvable. Et dans cette affaire, qui secoue la France depuis maintenant 11 ans, les mystères sont encore nombreux.

Mais peu se souviennent qu’à l’époque, une autre affaire s’est invitée dans l’affaire « Dupont de Ligonnès ». Il s’agit de la disparition de Colette Deromme, une femme de 52 ans.

Le 15 avril, soit tout juste un jour avant que Xavier Dupont de Ligonnès ne disparaisse des radars, la quinquagénaire, qui vit à Lorgues, dans le Var, disparait, elle aussi, mystérieusement.

Chez elle, le temps est curieusement figé : sa voiture est bien garée devant sa villa, et son sac à main, ses papiers d'identité ainsi que ses cigarettes et les clés de son véhicule et de sa maison sont retrouvés à l’intérieur.

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Agée de 52 ans, Colette a pourtant tout d’une dame sans histoires. Cette maman de 4 enfants devenus adultes travaille dans un supermarché. Elle est divorcée depuis quelques années, et vit seule dans une coquette maison de Lorgues, une commune dans les hauteurs du Var.

Affaire Colette Deromme : des liens troublants

Les semaines passent, et toujours aucun signe de la mère de famille.

Jusqu’au 15 mai 2011. Un mois après la disparition de Colette, des vacancières font une macabre découverte, en contrebas d’une route départementale varoise. Alors qu’elles s’étaient arrêtées au borde la route pour admirer le paysage, elles perçoivent une odeur atroce. Il s’agit d’un corps, en état de putréfaction avancé, dissimulé quelques mètres plus bas.

Une enquête est immédiatement ouverte. A l’époque, et alors que la France vient tout juste d’apprendre l’horreur du drame de Nantes, les théories les plus folles se mettent à circuler : est-ce le corps de Xavier-Dupont de Ligonnès ? Ou de l’une de ses victimes ?Car le père de famille a disparu à seulement quelques kilomètres de là, et ça n’est pas le seul lien qu’il entretiendrait avec cet endroit précis…

    Affaire Colette Deromme : la piste Xavier Dupont de Ligonnès

    Après la découverte du cadavre, à Lorgues, les questions vont bon train. Car c’est dans cette petite ville du Var, très exactement, que Xavier Dupont de Ligonnès et sa femme Agnès ont vécu, pendant les années 90. Deux de leurs enfants y sont même nés.

    Plus troublant encore :la ville de Roquebrune-sur-Argens, où sera retrouvée le 22 avril la voiture du père de famille, et où il aurait été vu pour la dernière fois le jour même de la disparition de Colette, n’est qu’à quelques kilomètres de là.

    Le 15 avril 2011, on voit, sur les images de vidéo-surveillance, Xavier Dupont de Ligonnès quitter à pied le parking de l’hôtel Formule 1 de la ville, dans lequel il a passé la nuit. Et puis, plus rien : la trace du père de famille se perd définitivement.

    Mais très vite, l’autopsie écarte une piste : le cadavre retrouvé en contrebas de la départementale n’est pas celui du père de famille, mais bien de Colette Deromme, la quinquagénaire disparue elle aussi au même moment.

    Seulement, l’autopsie ne permet pas d’en savoir bien plus : le corps est dans un état de décomposition avancé. Pour le légiste, la quinquagénaire serait toutefois décédée par strangulation, entre le 14 et le 15 avril 2011.

    En menant des investigations plus poussées, les enquêteurs vont toutefois très vite se rendre compte que les rapprochements entre Colette Deromme et Xavier Dupont de Ligonnès ne seraient que le fruit de « coïncidences ».

    Affaire Colette Deromme : les aveux qui changent tout

    Les enquêteurs vont notamment s’intéresser à l’entourage de la victime, et décident de placer sous écoute son ex belle-sœur, Sylviane Fabre, avec qui elle était en conflit depuis plusieurs mois. Les deux femmes géraient ensemble une SCI (Société civile immobilière).

    Au fil de leurs écoutes, les gendarmes découvrent que Sylviane fait de troublantes déclarations à son fils, David, au sujet du meurtre de Colette.

    En février 2012, soit près d’un an après la macabre découverte, ils sont placés en garde-à-vue.

    Le fils ne tarde pas à craquer, et avoue.

    Le soir du 14 avril 2011, sa mère et Colette avaient rendez-vous chez cette dernière pour discuter de leur SCI. Elles seraient ensuite disputées dans le hangar : bousculée par son ancienne belle-sœur, Colette se retrouve à terre. Sylviane aurait alors attrapé une cordelette avant de l’étranger pendant 15 minutes.

    La mère de famille aurait alors appelé son fils pour qu’il l’aide à charger le cadavre de Colette dans sa voiture, avant de l’« abandonner » dans un coin difficile d’accès à la tombée de la nuit.

    Sylviane est mise en examen pour « meurtre », son fils David pour « complicité de meurtre ».

    Lors de son procès, en 2014, Sylviane Fabre raconte son enfance difficile, entre un père « rugueux » qui la force à travailler à l’atelier de menuiserie dès ses 10 ans, et une mère « alcoolique ». Mais elle ne parvient pas à expliquer comment elle a pu s’en prendre à Colette, qui était son amie la plus proche. Elle explique, à propos de l’étranglement : "J'ai pas regardé l'heure, ça a été long, très long." Ses enfants la surnomment la « Gestapo » Sylviane les appelle « les fléaux ».

    Au terme des débats, elle est condamnée à trente ans de réclusion, une peine confirmée lors du procès en appel en octobre 2015.

    Son fils David écope de trois ans de prison dont un an de sursis.