Rachida Dati : quel est le problème avec les 900 000 euros que lui a versé Renault ?AFP
L'ancienne garde des Sceaux, qui a travaillé pour Renault à partir de 2010, a touché d'importants émoluments. Pourtant, elle est aujourd'hui soupçonnée d'emploi fictif.
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"Vous savez, les boules puantes ont commencé, et ça va continuer", s'agaçait Rachida Dati, tout en sobriété, le 30 mai 2019, sur le plateau de Ruth Elkrief. Elle faisait alors référence aux révélations relatives aux 900 000 euros versés par Renault, survenues en plein coeur de la campagne pour la mairie de Paris, qu'elle briguait alors. "Je suis totalement prête à ça. Comme par hasard, au moment où je déclare ma candidature. Mais je suis très tranquille", faisait-elle d'ailleurs remarquer. Avant d'asséner, plus piquante : "Je ne vis pas de la politique. Je ne suis pas une héritière, mes parents ne m'ont rien laissé. Et je ne suis pas une rentière. Moi, je n'ai pas un compte en Suisse ou un tas d'or caché sous mon matelas".

Pourtant, rappelle Europe 1, plus d'un an après les premières révélations - et longtemps après sa défaite aux élections municipales -, l'affaire continue. "Cet argent interroge la Justice, qui soupçonne un contrat anormal, voire illégal, et peut-être un emploi fictif", écrivent nos confrères, qui ont invité Fabrice Lhomme, journaliste pour Le Monde et auteur de l'enquête pour en discuter.

Un contrat anormal ?

En pratique, explique-t-il, c'est la filiale néerlandaise de Renault-Nissan qui a versé, à compter de 2010, des centaines de milliers d'euros. A l'époque, l'ancienne ministre de la Justice offrait alors une "prestation de conseil" auprès de Carlos Ghosn lui même, dont les déboires judiciaires sont elles aussi connues. Le soucis, pour le journaliste, c'est bien le contrat que Rachida Dati a signé. Ce dernier, estime-t-il, n'a rien de normal. "Nous nous sommes procuré un mail où une collaboratrice de Carlos Ghosn s'interroge et se demande ‘comment on va faire pour rémunérer Rachida Dati ?'", qui à l'époque n'était pas avocate. "On voit bien que ça a été fait de manière opaque et anormale", poursuit le journaliste d'investigation.

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Rachida Dati bien en peine de prouver son travail ?

"Les policiers, mandatés par trois juges d'instructions, sont à la recherche de documents qui attesteraient le travail pour lequel Madame Dati a été rémunérée de manière importante, note encore Fabrice Lhomme, qui continue, non sans griffer la ligne de défense de l'ancienne ministre : "Il y a donc un doute sur la réalité des prestations effectuées". 

Il explique aussi qu'il ne reste que "peu de traces des missions pour lesquelles elle aurait rempli conformément à son contrat".

Et ce n'est pas tout ! Le contrat lui même pose d'importants problèmes… Parce qu'au moment où il a été signé, Rachida Dati venait d'être élue eurodéputée. Elle intervient alors en faveur de Renault, "mais plus comme une lobbyiste que comme une avocate ou une consultante", souligne le journaliste qui rappelle ensuite : "ce travail de lobbyiste est interdit pour tout parlementaire".

Quid de la rémunération elle-même ?

Le montant exact de la rémunération de Rachida Dati a aussi de quoi surprendre. Après tout, l'ancienne ministre exigeait tout de même quelques… 1 000 euros de l'heure. Intrinsèquement, ce n'est pas nécessairement un problème pour la justice. Cependant, celle-ci questionnerait le mérite de l'ex-garde des Sceaux en la matière.

Fabrice Lhomme pointe "un contraste entre l'importance des sommes qui sont versées et la faiblesse des prestations apparentes". De quoi troubler les enquêteurs, juge-t-il.

Interrogée à ce sujet, Rachida Dati a simplement nié la réalité de ces chiffres.