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Le 2 juin 2019, à Clermont, une commune de l’Oise, les gendarmes sont appelés par des résidents à 4h30 du matin. Ils racontent qu’un drame se serait produit chez leurs voisins. Sur place, les forces de l’ordre retrouvent Anne, 24 ans, et son père, prostrés. La mère de famille, elle, vient d’être emmenée d’urgence à l’hôpital dans un état grave après avoir été poignardée à deux reprises.
Le père et sa fille sont immédiatement placés en garde à vue.
Pour tenter de comprendre ce qui a bien pu se passer au sein du foyer, les gendarmes enchaînent les auditions.
Une jeune femme « mythomane »
Très vite, le paternel est mis hors de cause. Et c’est Anne vers qui convergent tous les soupçons des enquêteurs. Car la jeune femme a enchaîné les déclarations contradictoires et les propos hasardeux. Un collège d’experts l’ayant examinée la qualifie même de « mythomane ».
Après avoir accusé un quidam d’avoir attaqué sa mère, Anne a ensuite reconnu les faits, mais en assurant avoir agi selon les directives de son père. Finalement, au terme de sa garde à vue, elle racontera au juge d’instruction avoir été contrainte par un inconnu de poignarder sa mère tout en incriminant son père. Elle évoque aussi sa consommation supposée de champignons hallucinogènes, et dit souffrir de troubles bipolaires.
Deux jours après le drame, elle est mise en examen pour « violences ayant entraîné une mutilation ou une infirmité permanente ». Sa maman, une septuagénaire, a survécu, mais est désormais lourdement handicapée.
Mais une question taraude désormais la justice et les enquêteurs : pourquoi la jeune femme est-elle vraiment passée à l’acte ?
Le profil déroutant d'Anne
Le procès d’Anne, qui s’est ouvert lundi 13 mai devant la cour d’assises de l’Oise, devait notamment y répondre. Mais les audiences ne sont pas vraiment déroulées comme entendu.
La cour a d’abord entendu le témoignage du père. Détail curieux, le soir des faits, Anne dormait dans le même lit que son père.
«Cette nuit-là, mon épouse dormait dans la chambre d’Anne car depuis le mois de décembre 2018 ma fille était avec moi. Elle allait très mal et elle ne pouvait pas dormir seule. Je me suis réveillé en sursaut en entendant Anne crier et je l’ai vue faire un point de compression pour tenter d’arrêter l’hémorragie de sa mère. Je suis allé ensuite chez le voisin qui est pompier professionnel et les secours sont ensuite arrivés. Dès la garde à vue, j’ai compris qu’Anne avait des problèmes psy. C’était trop bizarre car je n’avais pas vu un intrus, c’était tellement énorme…», a confié le septuagénaire à la barre, avant d’ajouter : « Sa mère et moi, nous ne voulons qu’une seule chose, que notre fille puisse vivre normalement…».
Pour ses parents, Anne est malade.
Reste que la jeune femme peine à expliquer son geste. Elle dit même n’avoir aucun souvenir du drame.
Anne raconte par ailleurs avoir été abusée en classe de 4ème par son professeur de mathématiques, puis, plus tard, victime d’un viol collectif alors qu’elle était agent de la police municipale. Elle a assuré, tout en ôtant sa perruque pour dévoiler son crâne rasé, souffrir d’alopécie et avoir tenté de se suicider à plusieurs reprises.
Mais dans toutes ces suppositions, la cour a dû mal à démêler le vrai du faux.
« Il faut que tu poignardes ta mère, elle est nocive »
Toujours est-il que cette fois, la jeune femme semble déterminée à assumer son geste. « Je reconnais les faits », a-t-elle assuré à a la cour.
Mais elle avance une curieuse explication. Selon elle, le soir du drame, c’est une « voix » qui lui aurait ordonné de blesser la victime. « J’entendais des voix. Elles me disaient : il faut que poignardes ta mère, elle est nocive », a déclaré Anne.
Un mobile qui ne convainc pas, surtout que l’administration pénitentiaire avait intercepté des courriers de la jeune détenue dans lesquels elle expliquait se servir de ces « voix » pour minimiser sa responsabilité.
« Elle a peut-être menti lors de ses explications, mais pendant ces trois jours d’audience, elle a reconnu les faits », affirme son avocat Me Nicolas Vanden Bossche
Au terme des débats, Anne a été reconnue coupable de « violences ayant entraîné une mutilation ou une infirmité permanente » et condamnée à 8 ans de réclusion criminelle. La cour a toutefois retenu l’altération de son jugement au moment des faits.
Au moment de quitter la salle d’audience, sa maman lui a soufflé ses mots en lui envoyant un baiser : « tu es pardonnée ».