De nouvelles règles d’indemnisation entreront en vigueur en avril 2025 et impacteront durement les plus âgés.
"J'ai envie de profiter maintenant que je suis en bonne santé, parce que je ne sais pas ce qu'il va advenir de moi dans une semaine, une année ou cinq ans", affirme Daniel, un presque quadragénaire suisse, de plus en plus tenté par le frugalisme. Interrogé par RTS, une radio helvète, il fait partie de ces gens qui - de toute évidence - en ont assez de travailler. Et envisagent donc un départ à la retraite précipité. C'est le cas d'Antonio, par exemple, qui "prévoit de diversifier ses sources de revenus pour rassembler suffisamment d'économies et arrêter de travailler à 50 ans", écrivent nos confrères.
En France aussi, comme l'a déjà expliqué Planet, le phénomène prend de l'ampleur. Yann, un trentenaire, est ingénieur. Et expliquait être séduit il y a déjà deux ans. "Mon travail me met énormément la pression et je ne me vois pas travailler jusqu'à 68 ans. On n'a qu'une vie et il faut en profiter", déclarait-il aux journalistes de 20 minutes, en 2018. Cela étant, mettre un terme à sa carrière aux alentours de quarante ans demande un réel investissement. Environ 40% des revenus annuels, pour l'ingénieur, généralement pas moins de 50% et parfois jusqu'à 80% selon les cas, indique Capital.
Arrêter de travailler à 40 ans : est-ce dangereux pour la société ?
"Au rythme où je suis, je pourrais arrêter de travailler à 45 ans", poursuit Yann, qui a embarqué son épouse dans l'aventure. Ils entendent tous deux "développer un potager", afin d'être "totalement autonomes".
"Tant que cela reste marginal, un phénomène pareil ne pose pas de réels problèmes à l'échelle de la société", analyse pour sa part Florence Legros, économiste et directrice générale de l'ICN Business School. "Naturellement, s'il venait à se généraliser davantage dans la population, ce mode de vie soulèverait certaines questions de financements. Soit les frugalistes bénéficient de minima sociaux en plus de la rente qu'ils ont constitué, soit ils sont inactifs et ne touchent aucune aide. Dans ce scénario, on rencontre un problème de rentrée de cotisations qui, si le frugalisme devenait courant, pourrait poser un vrai souci d'équilibre du système de retraites", poursuit la spécialiste.
Faut-il s'attendre à une explosion du frugalisme en France ?
En théorie, un avènement du frugalisme en France poserait aussi d'autres problèmes, d'ordre économique encore une fois. "Si la majorité des foyers arrêtait subitement d'acheter, cela aurait évidemment un impacte sur l'économie française. N'oublions pas que la consommation des ménages représente 80% du PIB national", rappelle la directrice générale de l'ICN Business School qui estime qu'en cas d'adhésion massive à ce mode de vie, les effets pourraient être comparables à ceux d'un confinement national. Encore faut-il, cependant, que le phénomène prenne de l'ampleur.
Pour l'heure, indique BFMTV, il demeure "marginal". Et, estime l'économiste, il ne peut que le rester.
"Bien sûr, arrêter de travailler à 40 ans peut théoriquement être viable. Les golden boys en ont été une preuve, dans les années 80-90-2000. Force est de constater, néanmoins, qu'il est plus simple de se lancer dans ce genre de démarches quand on est privilégié que quand on ne l'est pas", souligne Florence Legros qui avoue douter de la viabilité du modèle frugaliste. Non pas pas à l'échelle de la nation - elle est convaincue que le mouvement ne pourrait pas concerner assez de gens pour représenter un problème - mais bien à l'échelle individuelle. Sauf exception.
Pourriez-vous devenir frugaliste ?
Théoriquement, le frugalisme se veut accessible à tous. En pratique, estime Florence Legros, c'est un modèle peu viable, qui n'en vaut probablement pas la peine. Elle prend en exemple le témoignage d'un infirmier, qui explique économiser 80% de ses revenus. "C'est une situation très exceptionnelle, d'autant plus que cet homme explique travailler énormément. Plus important, il dit vouloir accumuler 500 000 euros. S'il n'est pas héritier et ne touche pas une fortune, cette somme pourrait s'avérer bien faible, à terme. Particulièrement s'il ne touche aucun minima sociaux après avoir cessé de travailler. N'oublions pas qu'arrêter toute activité professionnelle à 40 ans, cela signifie devoir financer 40 à 50 ans de rente, environ. Il faut pouvoir se loger, s'habiller, manger… 500 000 euros, c'est trop peu", tranche la directrice générale de l'ICN Business School.
Le problème est d'autant plus évident qu'avoir travaillé une quinzaine d'années ne permet évidemment pas de prétendre à une importante retraite, une fois l'âge légal finalement atteint. "Dans ce genre de cas, le système de répartition français ne fournit qu'une pension minimale. Le montant de cette dernière est calculée sur la base du prorata temporis et de l'indexation des salaires portés au compte sur les prix. Il y aura forcément un décrochage", conclut l'économiste.