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Les retraités sont-ils trop nombreux ? La question a de quoi surprendre — choquer, peut-être même. Pourtant, de nombreux experts s’inquiètent du grave problème démographique auquel la France est aujourd’hui confrontée. En avril 2021, comme l’expliquait déjà Planet à l’époque, le Conseil d’Orientation des Retraites (COR) publiait les travaux préparatoires à son rapport annuel. Ces derniers ne se montraient guère encourageants sur l’évolution et les perspectives relatives à notre système de solidarité intergénérationnel. En cause ? Un problème de fécondité et d’espérance de vie.
Fort heureusement, peut-on encore lire dans le rapport, l’impact sur la stabilité financière du régime devrait rester minime. Mais force est de constater que la tendance à de quoi inquiéter ; notamment à l’échelon individuel : le temps passé à la retraite diminue, ce qui signifie que les nouvelles générations perçoivent leurs pensions moins longtemps. En parallèle, elles travaillent plus longuement. Ce n’est cependant pas le seul problème posé par ce déséquilibre démographique… Lequel se ressent avec plus ou moins d’insistance dans certains départements.
Ces départements où les retraités s’installent en nombre
C’est le cas en Vendée, par exemple, où les retraités représentent 30% de la population, rapporte Ouest France. Mécaniquement, une telle situation n’est pas sans engendrer des enjeux spécifiques et des problématiques particulières.
“En Vendée, mais aussi dans les départements de la Corse comme dans la Creuse, la proportion de retraités est plus élevée qu’elle ne peut l’être en moyenne, à l’échelle nationale. Cela entraîne forcément des besoins en services domestiques et sanitaires assez élevés. Par conséquent, il faut une population active importante, ce qui n’est pas toujours le cas”, observe l’économiste Philippe Crevel, pour qui certains départements s’en tirent considérablement mieux que d’autres.
“Dans les régions rurales, où le pouvoir d’achat des retraités est peu élevé, ce personnel a moins d’incitation à venir s’installer et le risque de déserts médicaux est réel. Le déficit de main d’oeuvre y est préoccupant. En Vendée et, d’une façon générale, sur le littoral la situation est moins inquiétante : l’économie ne repose pas que sur le service à la personne, ce qui permet au département de tenir sans trop de mal”, poursuit-il.
Cette “silver éco” qui se développe ça et là peut pourtant poser d’importants problèmes, juge-t-il. Explications.
Les effets pervers d’une économie trop centrée autour des retraités
“La silver économie a souvent été présentée, en France, comme l’avenir du pays. Dans les faits, la situation est plus complexe. L’économie, c’est produire. Or, la silver économie, c’est une forme de répartition : les pensions de retraites, financées par le travail des actifs, permettent de financer… le travail des actifs”, note d’entrée de jeu le macro-économiste, qui liste les travaux d’aide à domicile, les activités de loisir, les services culturels et sanitaires. “Les retraités peuvent financer leur besoin grâce à l’argent reçu du fait du travail des actifs. Il faut donc que les actifs produisent”, poursuit-il. Un trop gros décalage à l’échelle nationale peut donc s’avérer problématique.
Et le directeur du Cercle de l’Epargne de prendre l’exemple du Portugal, qui “a fait ce pari-là, un temps”. “Le Portugal a joué sur les incitations fiscales pour attirer les retraités du monde entier. Ils ont dû y mettre un terme parce que la situation présentait de nombreux effets pervers : il y avait trop de retraités, trop peu d’actifs et cela faisait grimper les prix de l’immobilier en flèche… au détriment des travailleurs”, rappelle-t-il.
Quel est le ratio retraités-travailleurs en France ?
Le problème démographique observé en France résulte de plusieurs facteurs. D’abord, souligne Philippe Crevel, il s’explique par “le vieillissement global de la population”. “Les baby boomers arrivent désormais à l’âge de la retraite. Il y a aujourd’hui 17 millions de retraités en France, il devrait selon toute vraisemblance y en avoir 23 millions d’ici la moitié du siècle”, poursuit-il.
C’est loin d’être tout : il faut aussi prendre en compte la baisse de la fécondité observée depuis 30 ans environ. “Cela signifie que la population active va être amenée à plafonner, sinon à diminuer. Autrefois, dans les années 1970-1980, on comptait quatre cotisants pour un retraité. Désormais, on est à 1,4 cotisant pour 1 retraité”, rappelle-t-il encore. En clair, il n’y a plus assez de travailleuses et de travailleurs.
Des solutions existent cependant. Mais toutes ne sont pas aisément applicables. “Il est difficile d’avoir prise sur le taux de fécondité, mais il serait théoriquement possible d’augmenter le nombre de travailleurs en ayant recours à l’immigration. Ici, le problème est politique. Il est aussi envisageable d’améliorer le taux d’emploi des jeunes en faisant reculer le chômage et celui des seniors en repoussant l’âge de départ à la retraite”, note encore l’expert. Dernière piste ? Améliorer la productivité des employés.