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Si, pour les seniors, accéder à un crédit pour financer ses projets peut relever du casse-tête, une nouvelle offre émmerge du marché. Elle pourrait vous séduire par des mensualités totalement adaptables, mais gare aux petites lignes et à l'imprévu du marché financier et immobilier.
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Payer un prêt sans jamais le rembourser ? C’est la demi-promesse d’un tout nouveau type de crédit expliquée cette semaine dans les colonnes de nos confrères de Capital. La condition est simple : chaque propriétaire d’un logement à la retraite peut se voir accorder un crédit, pour n’importe quel projet, sans devoir rembourser la moindre mensualité.

C’est à ce moment précis que la question se pose : mais où est l’arnaque ? Si l’offre est attrayante, les petites lignes peuvent avoir un impact conséquent sur votre descendance et les mettre en grande difficulté financière, comme l'explique Planet.fr.

Un crédit alléchant, surtout en période d’inflation

L’idée, tout d’abord, est issue du cerveau des dirigeants de l’entreprise Arrago (une société spécialisée dans les prêts bancaires). Sur le plateau de BFM Business, son directeur général, Alexis Rouëssé, a introduit dans les grandes lignes ses motivations : “Le passage à la retraite est un moment où les revenus baissent. Mais les banques proposent des prêts en fonction des revenus, les retraités ne cochent jamais les cases,” déplorait-il.

Depuis toujours, la différence entre le salaire d’un actif et la pension de retraite est colossale. On estime que la différence entre les deux versements en début de mois est de 40 %.

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Dans la sphère politique, la retraite, qu’il s’agisse de l’âge du départ ou du montant minimal percevable par les personnes concernées, est constamment au cœur des débats, et pour cause. En 2021, en pleine crise de la Covid-19, le montant moyen d’une pension de retraite en France était de 1 531 euros bruts, soit 1 420 euros nets (selon des statistiques établies par la Drees, Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques). Un montant très proche du SMIC actuel (1 426,30 euros nets).

Depuis, les prix ne cessent de grimper : l’essence, l’électricité, l’eau, le gaz, les produits de première nécessité… À tel point qu’une grande partie des retraités en France renonce aux voyages, aux restaurants, faute de moyens. La France a subi de plein fouet une inflation remarquable, résidu de la crise du coronavirus, de la guerre en Ukraine, et plus majoritairement du contexte mondial instable.

Prêt pour les retraités : la seule condition imposée

Pour redonner goût à cette tranquillité et permettre d’accroître les activités de nos seniors, la société permet d’emprunter à la seule condition d’être propriétaire. Le montant accordé peut varier entre 20 % et 60 % de la valeur du bien des demandeurs. Une somme importante pour ceux disposant d’un patrimoine, qui, comme le rappelle l’Insee, sont 66 % à détenir un bien immobilier entre 60 et 69 ans.

Mais ici encore, les crédits, via leurs taux d’intérêt, les mensualités plus ou moins faibles étirées sur une longue période, mettent parfois le couteau sous la gorge et empirent une situation financière déjà instable.

Le directeur général de l’entreprise a également pensé à cet aspect du crédit : les emprunteurs n’ont pas à rembourser leur crédit… Enfin, dans les grandes lignes. Ici encore, l’entreprise se veut visionnaire et souhaite que ces personnes retraitées “aident leurs enfants à se constituer un apport pour acheter un bien immobilier à leur tour.”

La mauvaise surprise de l’héritage laissé à vos enfants et petits-enfants

Le problème est là : à un moment donné, comme tout crédit, il faudra bien passer à la caisse, et la note pourrait être salée. Chaque crédit doit être remboursé, l’obligation est posée noir sur blanc et celui-ci n’échappe pas à la règle. Les demandeurs peuvent rembourser de manière progressive, en une seule fois, ou… ne faire aucun virement du tout.

En revanche, si rien n’oblige les demandeurs à rembourser leur prêt, certains devront pourtant le solder. Imaginons que la personne parte en maison de retraite, le prêt peut être remboursé par la vente de la maison, à condition, bien sûr, que votre bien immobilier ne soit pas totalement décoté, affichant un DPE catastrophique et des travaux à foison.

En cas de décès, vos héritiers seront directement visés. Ils peuvent choisir de rembourser le prêt avec la vente du bien immobilier, à condition que le montant de la vente de celui-ci couvre en totalité le montant prêté, ou choisir de payer avec leurs propres fonds. Une mauvaise surprise à la clé, somme toute.

Un crédit au taux d’intérêt très élevé

Selon son plan, l’entreprise n’accorde au maximum qu'un prêt couvrant 60 % du prix du bien immobilier pour éviter ce genre de fâcheuses déconvenues. Cependant, une deuxième surprise vous attend au tournant : le taux d’intérêt.

Celui-ci est particulièrement élevé : 6 %. Un problème d’autant plus impactant que ce prêt ne prévoit pas de mensualités, car, comme expliqué plus haut, il peut courir des années, jusqu’au décès du demandeur.

Un point relevé par l’entreprise qui argumente par un cas pratique. Une personne de 67 ans possède un bien de 600 000 euros et peut demander un crédit de 140 000 euros. Cette personne décède à 90 ans. La totalité de son prêt, intérêts compris, sera déduite de la vente de sa propriété. Arrago estime alors que 300 000 euros reviendront aux héritiers, et que les 300 000 autres euros couvriront le prêt.

Un pari risqué qui, pour le moment, séduit 300 personnes pour un montant total de 42 millions d’euros de crédit accordé.