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Michel Rocard aurait-il eu raison trop tôt ?
Peu de temps avant d'être remplacé par Edith Cresson, Michel Rocard, Premier ministre socialiste, a préfacé en 1991 un Livre Blanc sur les retraites qui a marqué les esprits, avant de tomber dans un oubli relatif. Sa relecture est salutaire dans le contexte actuel.Le constatLe chômage était alors de 9,2 % et le rapport écrivait : "Même avec des hypothèses économiques favorables au plein emploi, les régimes de retraite connaîtront des problèmes de financement à partir de 2005... on aboutit dans le cadre législatif actuel à un besoin de financement proche de 300 milliards de francs en 2010."Quelles étaient les propositions?Après avoir évacué les hypothèses du statu quo et du remplacement de la répartition par la capitalisation, le rapport proposait des réponses sur un double horizon. > Pour le plus long terme, une transformation en profondeur du système articulée sur 4 principes :- Un premier étage commun à tous les régimes.- Séparation des droits "contributifs" et ceux qui ne le sont pas.- Transformation des régimes en "annuités" en régimes par "points."- Réforme des mécanismes de compensation entre régimes. > Pour un horizon plus proche, il prévoyait des mesures à l'horizon de 2010 :- Sur l'âge de 60 ans, le rapport exclut de le changer, mais écrit néanmoins que l'évolution de l'emploi, des conditions de travail et l'allongement de l'espérance de vie "pourraient conduire à une remontée progressive de l'âge de cessation d'activité autorisant à plus long terme un réexamen de la question de l'âge minimum de départ à la retraite."- Sur la durée de cotisation, le rapport envisage une augmentation progressive pour passer de 37,5 années à 42 ans en 2010.- Sur les départs avant 60 ans, le rapport préconise un réexamen concerté des conditions d'emploi et de carrière des agents en bénéficiant. Les départs sans condition d'âge des fonctionnaires ayant 3 enfants et 15 ans de service seraient limités à ceux remplissant les conditions à l'époque.- Pour la Sécurité Sociale, prendre en compte les 25 meilleures années au lieu de 10. Par contre, pas de proposition pour les fonctionnaires et régimes spéciaux.- L'effort contributif global pour la retraite des fonctionnaires, 38,1 % (dont 30,25 à charge de l'Etat) était plus élevé pour l'ensemble des salariés 23,4 % (dont 12,85 à charge de l'employeur). Malgré cette constatation, le rapport ne proposait pas de mesure de rapprochement.Même s'ils n'étaient pas de sa couleur politique, certains successeurs de Michel Rocard ont mis en œuvre certaines de ses préconisations. 2010 est arrivé et les déficits sont encore là. La frilosité devant des réformes affectant fonctionnaires et régimes spéciaux était manifeste. Elle le reste. La demande d'un système plus simple, plus clair, plus juste reste d'actualité, mais l'ouverture du chantier est sans cesse repoussée.