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Après six jours de silence, Emmanuel Macron a réagi à l'affaire Alexandre Benalla, assumant pleinement ses "responsabilités". Mais que risque le chef de l'Etat ?

Emmanuel Macron : "seul responsable" dans l'affaire Benalla

Responsable et après ? Emmanuel Macron était à la maison de l’Amérique latine à Paris, mardi soir pour célébrer avec les parlementaires de la majorité leur première année de mandat. Impossible pour le chef de l’Etat de ne pas évoquer l’affaire Alexandre Benalla qui agite toujours l’opinion publique près d’une semaine après les révélations du Monde.

Dans son discours, relayé par les membres de la majorité, Emmanuel Macron assume sa responsabilité dans le scandale qui met en cause son ex-collaborateur – "Le seul responsable de cette affaire, c'est moi, et moi seul" . Alexandre Benalla a été identifié dans une vidéo prise le 1er mai et dans laquelle il a un comportement violent avec des manifestants, il a été mis en examen pour "violences en réunion". La parole d’Emmanuel Macron était très attendue mais à quoi l’expose-t-elle alors que le président est "irresponsable" comme le stipule Constitution ? 

Selon Dominique Rousseau, professeur de droit public, qui s’exprimait dans Le Monde, avant la prise de parole d’Emmanuel Macron, le président pourrait tout de même être entendu en commission, ce qui constituerait une première dans la Ve République. "L’article 67 de la Constitution interdit que le président de la République soit 'requis de témoigner devant aucune juridiction ou autorité administrative'. La commission d’enquête parlementaire n’est ni une juridiction ni une autorité administrative", a-t-il dit. Une analyse que n’est pas partagée par tous les juristes.

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La difficile convocation d’Emmanuel Macron

Selon Bertrand Mathieu, juriste et président de l’Association française de droit constitutionnel, contacté par Planet, L'interprétation de la Constitution ne peut pas se faire en ce sens. "Dominique Rousseau, qui est un confrère que j’apprécie, raisonne par la négative. Or, les liens entre le président et le parlement sont prévus de manière exclusive par la Constitution. Le président a la possibilité de faire un discours devant le Congrès mais du reste il n’est responsable que devant le peuple. C’est le Premier ministre qui est responsable devant le parlement", assure-t-il évoquant également la séparation des pouvoirs.

Bertrand Mathieu prend par ailleurs pour exemple la commission d’enquête parlementaire sur les avions renifleurs sous François Mitterrand. Les parlementaires avaient demandé à entendre l’ex-chef d'Etat, Valéry Giscard D’Estaing. Le président socialiste avait alors envoyé une lettre pour leur signifier que même un ancien chef d’Etat ne pouvait être entendu.

La destitution pour Emmanuel Macron : pas du tout réaliste

L’autre relation qui peut s’établir entre le président et les parlementaires, comme l’explique Bertrand Mathieu, c’est la destitution. "C’est le deuxième lien que peut avoir le président avec le parlement, mais dans la situation actuelle, elle ne s’y prête pas du tout. Au-delà de toute partisanerie, il s’agirait d’une décision complètement démesurée. D’ailleurs, la destitution demande une très large majorité pour pouvoir être lancée, et ce n’est pas le cas ici", relève le juriste.

Quand bien même Emmanuel Macron assume sa responsabilité dans l’affaire Benalla, dont il dit avoir validé la sanction, ce sera aux trois enquêtes – parlementaire, administrative et judiciaire – de faire toute la lumière sur les décisions qui ont conduit ce collaborateur aux événements du 1er mai. Le président ne devrait toutefois pas sortir complètement indemne de cette affaire. Selon un sondage Ipsos publié mardi, la popularité du chef de l’Etat a atteint son plus bas depuis septembre 2017. Il tombe à 32% d’opinions favorables.