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A l’époque, Colleen avait 11 ans. Le 27 août 2017, lorsque Maëlys, 8 ans et demi, disparait en pleine noce à Pont-de-Beauvoisin, son monde s’est écroulé. Quatre ans et demi plus tard, et alors que le meurtrier de sa petite sœur a été condamné en février dernier à la réclusion criminelle à perpétuité, Colleen s’est confiée pour la première fois dans les colonnes de Paris Match.
En couverture du magazine, un cliché privé, jamais dévoilé auparavant : on y voit la jeune Colleen faire une grimace aux côtés de sa petite sœur. La photo a été prise dans la voiture familiale, sur la route du mariage, ce jour-là. C’est l’une des dernières images de Maëlys en vie.
L’adolescente a évoqué ses souvenirs avec Maëlys, mais aussi son enfance fracturée par le drame, et les séquelles très lourdes qu’il a laissé sur sa famille entière.
Une enfance idyllique, une complicité incroyable
En février dernier, la jeune Colleen avait fait front, avec ses deux parents, pour assister au procès de Nordahl Lelandais. A la barre, elle avait même interpellé le suspect, de façon poignante ; le sommant de dire enfin la vérité. A l’issue du verdict, Colleen avait exprimé son soulagement de voir l’ancien militaire condamné à la réclusion criminelle à perpétuité assortie de 30 ans de sureté.
« Je suis contente pour ma sœur, c'est une guerrière. J'espère que Maëlys sera là dans l'esprit de tous les Français. Elle mérite tout l'amour du monde, elle méritait pas ça, si je pouvais venir la chercher et prendre sa place, je le ferais. Ma sœur, c'est mon exemple, c'est tout pour moi ».
Entre Maëlys et Colleen, la complicité était toute naturelle. Les deux fillettes grandissent, entourées de leurs parents, dans un village du Jura : ensemble, ils s’appelaient « les quatre mousquetaires ». Une enfance idyllique. Jusqu’à ce que tout bascule.
« J’ai vécu un drame qui a brisé ma vie pour toujours. », a confié Colleen dans Paris Match.
Colleen de Araujo : les « idées noires »
Après le drame, pour la jeune Colleen, impossible de reprendre une vie normale. Elle peine à aller à l’école, et se met à dormir dans le salon, sur un matelas. « Je ne pouvais plus dormir dans la chambre que je partageais avec Maëlys », a-t-elle confié.
Avec ses parents, elle ne peut plus jouer le rôle de la petite fille. « J'allais les consoler, les booster », a-t-elle ainsi raconté, expliquant qu’ils étaient devenus « comme [ses] enfants ». « C'était normal que je me fasse oublier, ils venaient de perdre leur fille ».
« J'étais très stressée, sans objectif. J'avais des idées noires, je voulais rejoindre ma sœur », a raconté Colleen, avant d'ajouter, « le vide de Maëlys me détruisait de l'intérieur . »
La jeune adolescente s’est mise à s’isoler, de plus en plus. Il semble impossible, pour elle, de trouver sa place dans ce monde sans sa sœur, sa « confidente », sa « moitié ».
Elle voit aussi sa famille voler en éclats. En 2019, sa maman demande le divorce. Le couple est trop éprouvé par le drame. Longtemps, Colleen va lui en vouloir. « Lelandais nous a tout enlevé, jusqu'à notre vie de famille », raconte Colleen.
Mais finalement, c’est unis et soudés que Jennifer, Joachim et Colleen se rendront au procès de Nordahl Lelandais en janvier 2022. Les « quatre mousquetaires » ne sont plus que trois, mais ils sont déterminés à se battre pour Maëlys.
Colleen de Araujo : sa « haine » contre Nordahl Lelandais
L’épreuve du procès est de taille pour la famille. Pendant les trois semaines d’audience, devant la cour d’assises de l’Isère, ils sont confrontés à nouveau aux détails les plus insoutenables sur la mort de la fillette, et surtout, au regard de son meurtrier.
Dans le box, Nordahl Lelandais livre des explications qui sont loin de convaincre Colleen.
« J’ai haï tous ses mots, toutes ses excuses sans remords », a-t-elle lâché dans Paris Match.
L’adolescente avait ému -et impressionné - la cour en invectivant directement le suspect, alors qu’elle témoignait à la barre. Elle avait alors lancé, pleine d’assurance, ces mots en direction de l’accusé :
« Regardez-moi et répondez à ma question : qu’est-ce qui vous empêchait de dire où elle était pendant ces six mois ? Pour nous, c’était de la torture. Dites-nous si vous l’avez violée ? Et quels ont été ces derniers mots sur cette terre ? »
Dans Paris Match, Colleen est revenue sur ce moment fort et cathartique : « c’est essentiel pour moi de savoir pourquoi il a tué ma sœur. Mais le principal est de lui avoir parlé et posé ces questions. Je ne crois pas en ses fausses excuses, ni en ses différentes versions, et pas en ses larmes ».
L’adolescente a poursuivi : « C’était sidérant, aussi, de l’entendre nous dire : “Vous n’y êtes pour rien.” Ah ! On n’est pas responsables ? Comme il est gentil ! C’était le pompon. On se demande où il va chercher tout ça. Il n’a jamais été convaincant. Aucune empathie, aucune conscience. C’est sans doute pour cela qu’il a pris trente ans. »
Pour elle, Nordahl Lelandais est un personnage « sans courage », un « déchet ».
Aujourd’hui, près de deux mois après le procès, Colleen tente de se reconstruire, difficilement. « J'ai le contrecoup de tout, maintenant. Je me fais aider », a livré la jeune adolescente au magazine.