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Un dernier voyage avant de disparaître. En avril 2011, Xavier Dupont de Ligonnès quitte la ville de Nantes (Loire-Atlantique), où il vit depuis de nombreuses années, et met le cap au sud. Rien d’étonnant pour cet habitué des déplacements professionnels, qui prend régulièrement sa voiture dès le dimanche après-midi, pour ne revenir que le vendredi suivant.
Les lettres d'un fou ?
Cette fois-ci, pourtant, il ne reviendra pas. Personne ne le sait encore, mais il est le seul survivant de sa famille, dont les cinq autres membres – sa femme Agnès et leur quatre enfants – ont été tués quelques jours plus tôt. Le quinquagénaire est le suspect principal de ces meurtres et a organisé sa cavale dans les moindres détails. Des lettres aux écoles de ses enfants et à ses proches informent tout le monde que la petite famille a déménagé, soit en Australie, soit aux Etats-Unis, où elle bénéficie d’un programme de protection de témoins. Plus question donc de les contacter, car ils ont changé d’identité.
Ces missives ont probablement provoqué un haussement de sourcil chez certains, qui y ont peut-être vu l’explication d’un fou. Pourtant, le but recherché est atteint, car les forces de l’ordre ne commencent à s’intéresser à cette disparition que quelques jours plus tard. À Nantes, si les volets fermés et le silence qui règne dans la maison les tiennent éloignés au début, les policiers finissent par mettre au jour les cinq cadavres enterrés sous la terrasse de la bâtisse. Tous ont été tués d’une ou plusieurs balles dans la tête, probablement dans leur sommeil.
Le dernier voyage de Xavier Dupont de Ligonnès
Cette découverte ne met pas en danger Xavier Dupont de Ligonnès car, le 21 avril 2011, il est déjà loin. Sa trace a été perdue six jours auparavant à mille kilomètres de Nantes, dans la ville de Roquebrune-sur-Argens (Var). Le père de famille semble s’être volatilisé en pleine journée, après avoir passé une dernière nuit à l’hôtel. A-t-il choisi un lieu retiré de la circulation pour mettre fin à ses jours ? A-t-il quitté la France pour l’étranger, peut-être les Etats-Unis, le Portugal ou l’Inde ? Ces questions n’ont pas encore leur réponse et ne les auront peut-être jamais.
Une chose est sûre, avant de disparaître de la carte, Xavier Dupont de Ligonnès a effectué un dernier périple lourd de sens, pour lui. Un retour dans son passé, aux jours heureux de sa jeunesse et de son couple, avant les désillusions qui suivront. En tout, le fugitif marque six étapes, alors qu’il aurait pu disparaître bien plus vite. Pourquoi a-t-il pris son temps à ce point-là ? Que signifient ces différents arrêts ?
Premiers arrêts en Charente-Maritime et en Haute-Garonne
Au milieu du mois d’avril 2011, Xavier Dupont de Ligonnès n’est pas un homme pressé. Il décide de quitter la Loire-Atlantique le dimanche du 10 avril, après avoir passé presque une semaine seule dans sa maison du boulevard Schuman. Comme l’explique le journaliste Guy Hugnet dans son livre L’affaire Dupont de Ligonnès, le père de famille aurait eu envie de garder le rythme de ses déplacements professionnels, "marqués par des étapes : chaque soir un hôtel différent, un nouveau nom, une nouvelle histoire".
Le premier arrêt, après Nantes, l’amène à Puilboreau, dans le département de la Charente-Maritime. Il passe la nuit dans un hôtel de la ville, où il dîne en compagnie des autres clients, avant de repartir le lendemain, après le petit-déjeuner. Il prend la route pour le sud, direction Blagnac, près de Toulouse (Haute-Garonne), où il réduit un peu la voilure côté dépenses. Il passe la nuit dans un établissement Première classe près de l’aéroport, où il ne marquera personne. C’est à ce moment-là, après cette deuxième étape, que Xavier Dupont de Ligonnès semble toucher du doigt l’objectif de sa cavale, un retour aux jours heureux de sa jeunesse, dans le sud de la France.
Pourquoi ce détour par la Seyne-sur-Mer ?
Blagnac n’est qu’un passage, dans la nuit du 11 au 12 avril, avant que Xavier Dupont de Ligonnès se dirige un peu plus vers le Sud-est. Un premier arrêt au Pontet lui permet de passer la nuit suivante dans une Auberge cinq étoiles, prestigieuse et réputée. Un dernier plaisir ? Un moyen de brouiller les pistes ? Celui qui change de nom chaque soir change aussi de standing en fonction de ses destinations. Encore une fois, le quinquagénaire règle la note après le petit-déjeuner et quitte le Pontet, direction la Seyne-sur-Mer.
Cette cinquième étape est manifestement un détour, car ce n’est pas le chemin le plus rapide pour relier le Pontet à son dernier arrêt, Roquebrune-sur-Argens. Ce n’est pas une destination choisie au hasard, car Xavier Dupont de Ligonnès connaît bien le coin. Il y a vécu plusieurs années, lorsqu’il était encore célibataire, ce qui conforte l’hypothèse de son pèlerinage aux différents endroits qui ont marqué sa vie. Selon plusieurs médias, il aurait proposé à une ancienne de ses conquêtes, qui se souvenait à peine de lui, de le retrouver lors de son passage dans la ville, ce qu’elle refusera. Peu importe, car sa destination finale l’attend.
La destination finale de Roquebrune-sur-Argens
Xavier Dupont de Ligonnès termine son périple à Roquebrune-sur-Argens, dans le Var. Plusieurs moments de sa vie, passés dans cette commune du Var, ont été heureux, donc quel meilleur cadre que celui-ci pour terminer son périple ? On sait que le fugitif a passé la nuit du 14 au 15 avril dans un hôtel Formule 1 aux portes de la commune, qu’il est sorti une première fois, avant de disparaître complètement.
La dernière image de lui vivant a été tournée à ce moment-là, le 15 avril dans l’après-midi, alors qu’il quitte son hôtel à pied, un long sac – pouvant contenir une carabine – sur le dos. A-t-il marché en direction d’un lieu que lui seul connaît, où il sait que son corps ne sera jamais retrouvé ? A-t-il rejoint une autre personne avant de prendre la fuite avec elle ? Est-il parti seul, faisant exprès de brouiller les pistes ? Dix ans se sont écoulés depuis cette dernière image d’avril 2011 et de nombreuses hypothèses ont été fouillées, mais elles n’ont pas permis de mettre la main sur Xavier Dupont de Ligonnès, qu’il soit mort ou vivant.