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Viol : ce quinquagénaire a vécu l'enfer
Raphaël Emeth a 56 ans et, des années durant il a vécu un véritable enfer. Après des années de silence, ce quinquagénaire a finalement décidé de briser l’omerta et de révéler le secret qui l’encombre depuis son enfance. L’homme a été victime d’abus sexuel alors qu’il avait 11 ans. Il a rencontré son agresseur en vacance. "J’étais en colonie de vacance et était présent un infirmier, qui était étudiant en médecine. On s’est connu pendant un été", commence-t-il, détaillant son calvaire auprès de LCI. "Il est passé chez moi au mois de septembre et a sympathisé avec mes parents. C’était quelqu’un de très gentil." Un jour, l’homme a expliqué vouloir l’initier et lui expliquer "comment draguer et embrasser des filles". "Ce n’est pas une fille qui m’a embrassé. C’est lui", assène Raphaël, avant de passer très brièvement sur le détail des attouchements. "C’est comme ça que ça a commencé. Il m’a dit de ne pas en parler et que ce serait notre secret." Pendant deux ans, une fois par semaine environ, l’homme le viole. Parfois chez lui, dans son appartement de Drancy, parfois chez les parents de Raphaël. "Il s’assurait toujours que la porte soit fermée."
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Raphaël, encore enfant, explique ne "jamais avoir dit non". Il décrit un processus sournois, insidieux. "Je n’ai jamais pris de plaisir, ça m’a toujours dégoûté. Mais je ne me suis pas enfui. Il ne m’a pas attaché physiquement, il m’a attaché avec des mots, avec sa gentillesse… C’est quelque chose dont je me suis longtemps senti coupable. Je me sentais comme une putain qui attend que ça le mauvais moment passe", raconte-t-il. Il n’en a jamais parlé à ses parents et, à l’époque, il ne réalisait pas vraiment ce qui se passait. "Quand il y avait une émission sur les enfants victimes de pédophiles à la télé, je changeais de chaîne. Je ne pouvais tout simplement pas regarder."
Viol : une prise de conscience tardive
C’est très tardivement, à 38 ans, qu’il comprend ce qu’il s’est vraiment passé. "J’étais dans la rue, vers l’heure du déjeuner. J’ai croisé une maman avec ses enfants et j’ai été complètement paralysé. Je ne pouvais plus avancer. J’ai eu peur d’abuser des enfants, de les toucher. C’est là que je me remémore tout ce qui m’est arrivé." Auparavant, Raphaël n’avait jamais eu de pulsions de ce type. "J’ai eu peur de moi même. Au fond, je n’avais jamais oublié ce qu’il m’avait fait, mais mes souvenirs était enkystés, recouverts d’alcool, de drogues et d’autres choses. Je les avais enfouis", décrit-il. Car même avant de mettre le doigt sur ce qui n’allait pas, les viols successifs qu’il a subit ont très largement impacté la vie de ce père de famille. En grandissant, il a commencé à boire, à se droguer. Mais surtout, il a perdu tout estime de soi. "J’ai développé un dégoût de moi même. J’avais l’impression d’être une merde. J’ai eu peur de devenir un pédophile." Indique-t-il. Sa vie de famille a évidemment été bouleversée. "Il m’était plus facile de gifler mon fils que de lui faire une caresse. J’étais incapable de toucher mes enfants ou de les laver."
Il évoque aussi des tocs et ce qu’il appelle des "phobies d’impulsion". "C’est la peur de se jeter sous un métro, la peur de se pendre, de poignarder ses enfants. C’est aussi la peur d’être en société. Je ne pouvais pas rester dans un lieux clos avec plusieurs personnes", précise-t-il.
Avant de comprendre ce qui n’allait pas, Raphaël a continué à suivre son agresseur. Il l’a même appelé pour lui annoncer la naissance de son premier enfant, aujourd’hui trentenaire. "Je l’ai appelé pour lui dire que j’avais eu un fils et que j’aurais aimé lui présenter. Il était au Club Med avec son épouse et m’a proposé de l’y rejoindre. Je ne l’ai jamais fait. Un de mes psychiatres estime que c’était, de façon inconsciente, un moyen de lui dire que moi aussi j’étais en mesure d’avoir une vie, des enfants", poursuit le quinquagénaire qui insiste : avant ses 38 ans, il n’avait jamais nourri d’animosité à l’égard de son violeur. Mais après ce choc, et sur conseil de sa femme également psychiatre, il a suivi plusieurs thérapies. "Au début, j’avais la tête sous l’eau, je cherchais surtout à respirer. La colère est venue après, progressivement." Malgré la prescription des faits, il a choisi de porter plainte. C’est là qu’il découvre qu’il n’est pas la seule victime. "Deux autres personnes ont porté plainte et il y aura un procès aux assises. J’y serais entendu en tant que témoin simple. J’ai besoin que ce type soit condamné", témoigne-t-il, amer. "C’est un médecin, en contact avec des enfants. Depuis 72, je suis sûr que nous sommes plus que trois victimes. Et pourtant il a continué à être un bon père de famille, un docteur reconnu… Un notable", lance Raphäel, âcre. "J’aimerais lui dire, mais peut-être s’en fout-il, qu’il a mis une partie de ma vie en l’air. Celle de mes enfants et de ma femme aussi. Il a fait en sorte que je me déteste mais aujourd’hui c’est lui que je déteste."