Le projet de loi de finances pour 2025 du gouvernement demande un effort de cinq milliards d'euros aux collectivités locales les plus aisées. Et cela ne sera pas sans conséquences sur votre quotidien.
- 1 - Grands-parents privés de leurs petits-enfants : un sentiment de honte
- 2 - Grands-parents privés de leurs petits-enfants : le résultat de conflits familiaux
- 3 - Grands-parents privés de leurs petits-enfants : des personnes en détresse
- 4 - Grands-parents privés de leurs petits-enfants : que faire si c'est votre cas ?
De nombreux grands-parents ont une place prépondérante dans la vie de leurs petits-enfants. Ayant souvent plus de recul que les parents – car ils sont déjà passés par là – ils parviennent à développer une relation privilégiée avec la progéniture de leur progéniture. Une relation qui peut être forte, parfois idéalisée, mais qui, comme toutes, apporte aussi son lot de déceptions. Si la distance espace les rencontres, que le rythme de vie des petits-enfants n’est pas celui des grands-parents, ce sont parfois des problèmes plus profonds qui viennent entacher leur relation, quand elle n’est pas complètement rompue. Une situation qui peut alors être très difficile pour ces grands-parents qui en attendaient beaucoup, peut-être un peu trop, ou qui font face au résultat de non-dits, de problèmes familiaux plus lourds.
Grands-parents privés de leurs petits-enfants : un sentiment de honte
Annick Eschermann est écoutante pour l’Ecole des grands-parents européens depuis une dizaine d’années. Elle-même grand-mère, elle donne de son temps pour venir en aide à ces grands-parents qui se sentent parfois un peu démunis, un peu dépassés par les événements. "Dans notre mission, on essaie dans un premier temps de valoriser le courage de l’appelant, car c’est courageux de dire à quelqu’un de l’extérieur qu’il y a des choses pesantes chez soi et qu’on ne sait pas toujours vers qui se tourner", nous explique-t-elle. L’objectif des écoutants de l’association – qui sont parfois des psychologues, des conseillères conjugales – est de comprendre le malaise d’une personne, afin qu’elle puisse parler de ses émotions. "On l’aide autant qu’on peut à clarifier sa situation, parfois c’est assez confus car beaucoup de choses arrivent en même temps dans la vie de cette personne", détaille Annick Eschermann.
Ils sont désormais de plus en plus nombreux à décrocher leur téléphone. Selon le rapport d’activités 2018 de l’association, plus de 250 appels ont été reçus, provenant à 50% des régions autres que la région parisienne et, dans 80% des cas, de grands-mères. Comme le précise Annick Eschermann, "on voit qu’il y a de plus en plus de grands-pères qui osent appeler. Il ne faut pas oublier que ce sont des personnes d’un certain âge, qui ne sont pas habituées à mettre comme ça, sur la place publique, les propres soucis de leur vie". Bien souvent, ces grands-parents ont également honte de cette situation : "Une grand-mère me disait qu’elle ne pouvait pas en parler à ses amies, car ça se passe trop bien avec leurs petits-enfants", nous confie l'écoutante.
Ce sont parfois des problèmes lourds que doivent entendre les écoutants, sur fond de conflits familiaux, de non-dits et d’incompréhension entre générations.
Grands-parents privés de leurs petits-enfants : le résultat de conflits familiaux
Pour quelles raisons le lien entre grands-parents et petits-enfants finit-il par se rompre ? Pour Annick Eschermann, de nombreux problèmes peuvent découler de l’arrivée d’une belle-fille ou d’un gendre au sein de la famille. "On leur demande s’ils ont bien accueilli leur belle-fille ou leur gendre au sein de leur famille", car c’est parfois le point de départ d’un conflit qui va s’enliser, qui va s’amplifier dans le temps. "On s’aperçoit que, parmi ce qui nous est dit, beaucoup de problèmes viennent de familles où il s’agit d’un fils unique ou d’une fille unique, ajoute Annick Eschermann. La seule source de petits-enfants vient de leur enfant unique et, quelques fois, ils ont beaucoup misé dessus".
Parfois, un certain nombre de grands-parents "regrettent de ne pas avoir eu assez de temps pour s’occuper de leurs enfants, donc ils en font un peu trop vis-à-vis de leurs petits-enfants". Ces derniers, décrits comme "trop gourmands", prennent trop de place : "Ils oublient, et on leur rappelle, que ce sont les parents qui ont l’autorité parentale sur leurs enfants". Des situations qui amènent parfois à des incompréhensions pour ces grands-parents, qui ont, par exemple, été très présents lorsque leurs petits-enfants étaient plus jeune, pour les garder. "Il se peut que les parents voient que les grands-parents prennent plus d’importance qu’eux dans la vie de leurs enfants et, quelque fois, il y a une rupture brutale. Et ces grands-parents se demandent pourquoi ils se comportent ainsi".
Si ces situations sont parfois la faute des grands-parents eux-mêmes, elles n'en restent pas moins déroutantes et douloureuses.
Grands-parents privés de leurs petits-enfants : des personnes en détresse
Lorsqu’ils décrochent leur téléphone, les écoutants se retrouvent souvent à interroger des grands-parents en grande détresse, explique Annick Eschermann : "On sent des grands-parents qui pleurent, qui sont vraiment très tristes, qui ne savent plus comment faire". Parfois, ces personnes sont malades ou s’interrogent simplement sur la vie qui passe. "On voit très clairement qu’il y a une histoire de temps : ils voient leur vie qui s’écourte, tandis que leurs enfants et leurs petits-enfants ont l’avenir devant eux", précise l’écoutante. Le rapport au temps s’inverse donc entre les grands-parents et leur descendance, ce que certains ont du mal à vivre : "Beaucoup de grands-parents disent que c’est du gâchis, qu’ils ne voient pas leurs petits-enfants grandir".
Les écoutants n’ont, de facto, qu’une seule version des événements, celle donnée par les grands-parents. Selon Annick Eschermann, certains n’ont "pas toujours conscience qu’il y a eu des conflits antérieurs, que ça ne vient pas comme ça d’un coup, qu’il y a eu un facteur déclenchant". "On essaie aussi de leur faire prendre conscience, même si c’est difficile, du rôle qu’ils ont dans tout cela. Ils y sont aussi pour quelque chose, ils ont aussi eu un certain nombre de comportements ou de gestes qui n’ont pas toujours été adéquat par rapport à leurs enfants", tempère l’écoutante.
Lorsqu'une telle situation se produit, de nombreux grands-parents se trouvent démunis. Que peut-il être possible de faire lorsqu'on ne voit plus ses petits-enfants ?
Grands-parents privés de leurs petits-enfants : que faire si c'est votre cas ?
Annick Eschermann invite tout grand-parent qui serait dans cette situation à décrocher son téléphone, même s’il s’agit juste de parler. "Être écouté, c’est déjà énorme", nous explique-t-elle, car cette rupture peut être parfois très lourde à porter pour les grands-parents.
Des recours en justice sont possibles mais ils sont longs, coûteux et rompent parfois pour de bon la relation entre parents et enfants. D’après la loi, les grands-parents ont le droit de voir leurs petits-enfants : l’article 371 – 4 du Code civil stipule que "l’enfant a le droit d’entretenir des relations personnelles avec ses ascendants" et que "seul l’intérêt de l’enfant peut faire obstacle à ce droit".
Si des recours en justice sont possibles, l’association préconise toujours la médiation pour régler un conflit entre grands-parents et parents. "On privilégie cette démarche de médiation car il nous semble que c’est moins radical qu’une action judiciaire. C’est un moment où on peut se parler normalement", conclut Annick Eschermann. Un échange durant lesquels des choses très lourdes peuvent être dites mais qui peuvent permettre, à long terme, de reconstruire quelque chose.