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Nouvelle affaire embarrassante pour les proches d’Emmanuel Macron. Cette fois-ci, c’est Eric Dupond-Moretti, le garde des Sceaux, qui est pointé du doigt pour l’achat d’un bolide de luxe italien en janvier 2013. La Maserati sur laquelle le choix de l’ancien avocat se portait alors lui a coûté 95 158 euros, informe Mediapart, dont les éléments sont repris par Libération. Rien de bien problématique, à première vue, mais les révélations ne s’arrêtent pas là : le souci viendrait en fait de l’argent utilisé pour payer le garagiste qui a cédé le véhicule. C’est de la société offshore Exelyum, basée aux Seychelles et impliquée dans une affaire d’escroquerie boursière dont le préjudice a été évalué à 23 millions d’euros que proviendrait le financement.
Le hic ? Eric Dupond-Moretti n’aurait jamais conseillé l’entreprise en question, note La Provence, ce que dément d’ailleurs le cabinet du ministère de la Justice. L’affaire de la société Exelyum "a été instruite par un juge d’instruction, spécialisé en matière financière, qui disposait de tous les éléments et a procédé à des investigations sans juger pour autant nécessaire d’entendre Éric Dupond-Moretti", ont ainsi les balayés les équipes du ministre, qui assènent encore : "Eric Dupond-Moretti a défendu les intérêts d'un client en 2013, ce qui a valu facturation et une perception d'honoraires". Mais que retenir de cette situation en matière de transparence de la vie publique ?
Ce que la nouvelle affaire Dupond-Moretti dit de la transparence en France
"C’est un cas de figure assez embarrassant parce que ce qui est reproché à Eric Dupond-Moretti remonte à une époque où il n’était pas encore ministre. C’est donc par extension que tout ceci se raccroche à la vie politique actuelle", rappelle d’entrée de jeu Dominique Jamet, journaliste, auteur et ancien vice-président du parti Debout la France. "Naturellement, il n’est pas anormal qu’étant devenu ministre, on s’intéresse au passé de monsieur Dupond-Moretti. C’est quelque chose de légitime et de compréhensible : il est pertinent de chercher à savoir si nos dirigeants - et d’une façon générale si les hommes publics - sont irréprochables. Ceci étant dit, cet exemple précis m’apparaît un peu trop à cheval", poursuit-il.
Le problème, juge Dominique Jamet, vient notamment du fait que ce type de procès - qu’il estime parfois "moraux" - ne s’abat pas avec la même vigueur sur les uns et les autres. "Il est souhaitable que les hommes publics fassent preuve de plus de transparence et d’exemplarité, mais la presse et la justice aussi. Force est de constater qu’à agissements comparables, le bras de la justice tombe plus vite sur des figures telles que Claude Guéant, Nicolas Sarkozy ou Patrick Balkany qu’il ne le fait sur les figures de la majorité présidentielle. S’intéresse autant au financement de la campagne présidentielle d’Emmanuel Macron qu’à celle de Nicolas Sarkozy ?", questionne-t-il encore.
Le fait est que plusieurs ministres nommés durant la mandature d’Emmanuel Macron ont été mis en cause pour conflit d’intérêt ou déclaration incomplète…
Conflits d'intérêts, déclaration incomplète… Les ministres de Macron sont-ils protégés ?
"Un certain nombre de personnalités de la majorité actuelle ont été compromises ou mentionnées dans des faits qui ne correspondent ni à la déontologie ni à la loi. Or, dans bien des cas, ces affaires traînent, quand d’autres - en tout point comparables à ceci près qu’elles ne concernent pas les mêmes personnes - ont été traitées de façon beaucoup plus rapide", rappelle d’entrée de jeu Dominique Jamet ; qui rechigne pourtant à parler de "culture de la malhonnêteté" chez les ministres d’Emmanuel Macron. "Je suis assez d'accord, mais je dirais cela autrement", déclare-t-il, non sans lister les affaires Bayrou, Ferrand, Griset, Belloubet, Kohler, ou Pénicaud. Toujours est-il qu’il faut concéder, assure-t-il, que la situation générale est particulière.
"Nous sommes aujourd’hui à la charnière entre deux époques. Il faut bien dire qu’un certain type de comportements autrefois tolérés ne le sont plus aujourd’hui. Dès lors, certaines personnalités politiques, qui ont fait comme les autres jadis, sont mises en cause parce que les règles déontologiques se sont faites plus exigeantes. Parce que la justice s’est montrée plus curieuse et les médias moins respectueux. Malheureusement, il est parfois imprudent de formuler des exigences d’exemplarité qui impliquent forcément la compromission d’une partie de la classe politique", tranche encore le journaliste.
Les limites de la transparence
Pour Dominique Jamet, la transparence est un outil nécessaire, mais qui présente hélas un certain nombre de limites.
"De toute évidence, il existe aujourd’hui une confusion entre les exigences de transparence dans la vie politique française et la transparence qu’il convient de mettre en œuvre. L’une ne profite pas particulièrement à la démocratie : elle porte essentiellement sur la vie privée des uns et des autres, en témoigne les révélations sur les vacances à Ibiza de monsieur Blanquer. Par le passé, les médias se seraient abstenus d’en parler", juge le journaliste.
Et lui de conclure : "La vraie transparence, celle qui n’est pas un leurre, porte sur les faits de corruption, les conflits d’intérêts, les tractations secrètes qui - aujourd’hui comme de tout temps - caractérisent la vie politique. Ces comportements n’ont pas disparu de la vie politique. Mais force est de constater que l’on se soucie davantage des costumes de François Fillon que d’affaires autrement plus graves, comme le financement d’une campagne à la présidentielle".