Face à la montée des cyberattaques, le FBI et la CISA recommandent d’arrêter d’envoyer des SMS entre utilisateurs d'iPhone et d'Android. Un conseil qui ne vise pas seulement les Américains mais tous les...
Un vrai temps de Toussaint. Le 16 novembre 2019, la pluie et le froid touchent une grande partie du pays et le département de l'Aisne ne fait pas exception. Ce début de week-end est comme un autre, ou presque. Elisa Pilarski, une jeune femme de 29 ans fraîchement débarquée de son Sud-ouest natal, part promener deux des animaux de son compagnon sur un plateau et dans une forêt où elle a ses habitudes. Enceinte de six mois, elle emmène en balade un seul animal à la fois. Peu après 13 heures, c'est au tour de Curtis, deux ans, d'aller se dégourdir les pattes. Ce qui ne devait être qu'une banale sortie, comme elle en a fait tant d'autres, sera en réalité sa dernière. Son corps est retrouvé sans vie en tout début d'après-midi par son compagnon, couvert de morsures de chien(s).
Un bonheur de carte postale ?
Pour comprendre toute l'affaire Elisa Pilarski, il est important de revenir quelques semaines à quelques mois en arrière, bien avant le drame. La jeune femme est passionnée par les animaux, particulièrement les chevaux et les chiens. Elle a d'ailleurs adopté une chienne de race American Staffordshire qu'elle a baptisée Ice. Très active sur les réseaux sociaux, elle poste des photos comme des vidéos de leurs sorties, affichant également son joli ventre qui s'arrondit. En novembre 2019, elle attend un petit garçon de son compagnon, Christophe Ellul. Ce dernier, âgé d'une quarantaine d'années, vit à des centaines de kilomètres puisqu'il est établi dans l'Aisne avec ses animaux. C'est la passion des chiens qui les a rapprochés sur Internet, puis dans la vraie vie. Peu avant cette journée du 16 novembre 2019, Elisa Pilarski est venue s'installer chez son compagnon et ses quatre chiens, accompagnée de son propre animal.
Interrogée par TF1 en juillet dernier, la mère de la jeune femme raconte : "Ils se sont rencontrés sur les réseaux sociaux. Elle a demandé des conseils pour le dressage de son chien et il est allé la voir dans les Pyrénées. Il lui a dit qu'il faisait faire du sport à ses chiens : du saut en longueur, du saut en hauteur. Et elle s'est dit ‘pourquoi ne pas faire cette activité avec mon chien, comme je le faisais avec mes chevaux'".
Christophe Ellul a alors plusieurs chiens en sa possession : Chivas, Lady, Drago et Curtis. Il présente ce dernier comme un mélange entre un Lévrier Whippet et un Patterdale Terrier, races autorisées en France. De petite taille, mais pesant quand même une vingtaine de kilos, l'animal est d'un noir profond et Elisa Pilarski lui donne de doux surnoms sur sa page Facebook. Pourtant, derrière son air joueur et ses petits yeux implorants, il aurait été formé à une pratique interdite en France : le mordant.
Les drôles de hobbies du chien Curtis
La loi française définit le dressage au mordant comme "toute activité destinée à faire mordre ou attaquer, avec ou sans muselière, un chien. Ces activités peuvent se réaliser notamment avec l'aide d'un homme d'attaque ou de tout matériel destiné ou non à cet usage". Tous les chiens ne sont pas autorisés à exercer cette activité, car les races qui en ont le droit sont strictement définies par la Société centrale canine. Il s'agit notamment des Bergers allemands ou des Pyrénées, des Boxer ou des Rottweiler. Les chiens "utilisés dans les entreprises ayant une activité de surveillance, gardiennage ou transport de fonds ou dans des établissements dispensateurs de formations à ces métiers" peuvent également être dressés au mordant.
Le mordant sportif est pratiqué par certains maîtres, mais il est réservé aux chiens dits "équilibrés". L'objectif est le même : tester son animal dans des épreuves de sauts, d'obéissance et de mordant. Cette dernière partie consiste à mordre en attaque de face mais, surtout, à relâcher la prise. En effet, si la pratique apprend à mordre sur ordre à un chien, il lui enseigne surtout à s'arrêter quand son maître le lui demande. Curtis savait-il desserrer les crocs ? La suite de notre enquête le dira.
Si des rencontres peuvent avoir lieu dans un cadre amateur, les compétitions officielles sont interdites en France, mais pas chez certains de nos voisins. Selon les informations de plusieurs médias, que Planet a pu confirmer, en août 2019, le chien Curtis a participé à un concours de "mordant sportif" en Belgique, organisé par l'ADBA, une association belge d'éleveurs de Pitbull. Des photos avaient alors été postées par Elisa Pilarski sur sa page Facebook.
Si Curtis a pu participer à ce concours, c'est parce qu'en réalité il n'est pas issu d'un mélange entre un Lévrier whippet et un Patterdale Terrier. C'est un Pitbull, une race pourtant interdite en France…
Curtis, une bombe à retardement ?
Tout au long de l'affaire, le chien Curtis a changé plusieurs fois de race. Présenté comme un American Staffordshire, puis comme un croisement entre deux espèces, il s'agit en réalité d'un Pitbull, qui aurait été importé illégalement en France. Cette information, donnée par plusieurs médias depuis le début de l'affaire, a également pu être confirmée par Planet. Mélodie [le prénom a été changé, NDLR] dirige une association de protection animale et s'est impliquée dans l'affaire dès le commencement, pour la défense de Curtis. Propriétaire de deux American Staffordshire, elle explique à Planet avoir su "tout de suite que Curtis était un vrai Pitbull pure race", car l'espèce "est plus fine au niveau de la tête et de la morphologie".
Prise de doutes, elle fait elle aussi quelques recherches sur le pedigree de Curtis, qu'elle trouve finalement sur Internet. La réponse tombe : de son vrai nom Dark Midnight, il est né dans un élevage des Pays-Bas, Hitam Kennel, spécialisé dans les Pitbull. Il aurait donc été importé illégalement en France, tout comme son frère Drago, car elle est considérée comme "dangereuse".
Race interdite en France, mordant sportif… Curtis était-il un amour de chien ou une bombe à retardement fabriquée par son maître ? À cette question, Mélodie choisit la deuxième option. Deux ans après cette dernière promenade d'Elisa Pilarski et du chien Curtis, l'animal est désigné comme le "responsable" des morsures décelées sur son corps. Voici ce qu'il s'est passé, minute par minute, le samedi 16 novembre 2019.
Notre enquête sur la mort d'Elisa Pilarski. Episode 2 : dans le secret de la forêt.