De nouvelles règles d’indemnisation entreront en vigueur en avril 2025 et impacteront durement les plus âgés.
Presque 20 ans de mariage ! En 2011, Xavier et Agnès Dupont de Ligonnès devaient fêter leurs noces de porcelaine. Aux yeux de leurs amis, ils forment un couple parfait, entouré de quatre beaux enfants, Arthur, Thomas, Anne et Benoît. Unis, amoureux, cultivés, avec une bonne situation… Ils ont tout pour eux. Pourtant, derrière la façade, le portrait se révèle beaucoup moins flatteur mais ça, personne ne le sait à part eux. S’ils sont toujours mariés, Xavier et Agnès mènent leur vie en parallèle, chacun pris au piège de désillusions qu’ils n’arrivent pas à partager avec l’autre. De la rancœur, des décisions qu’ils regrettent et un manque flagrant d’intimité empoisonnent les relations du couple.
Agnès Dupont de Ligonnès : elle était "follement amoureuse de son mari"
Le matin du 3 avril, Xavier Dupont de Ligonnès a déjà mûri sa décision : il va tuer sa femme et ses quatre enfants, puis ensevelir les corps sous la terrasse de leur maison. Acculé financièrement, pris dans une spirale d’échecs dont il n’arrive pas à sortir, le quinquagénaire n’imagine pas d’autre solution que cette décision radicale, celle d’un fou. Beaucoup de choses ont été écrites sur Xavier Dupont de Ligonnès ces dernières années, mais très peu sur son épouse Agnès. Présentée comme une femme sans relief issue d’une bonne famille bourgeoise versaillaise (Yvelines), catholique et mère au foyer, elle a presque été passée sous silence depuis le drame en 2011.
L’enquête menée par le journaliste et écrivain Guy Hugnet, dans son livre L’Affaire Dupont de Ligonnès, La secte et l’assassin (Éditions de l’Archipel), dresse au contraire le portrait d’une femme de caractère, bien moins docile que ce qu’on a voulu dire. Une femme profondément triste aussi, engluée dans un quotidien, bien loin de la vie dont elle rêvait mais dont elle n’arrivait pas à s’extraire.
Tout commence dans les années 1970. La jeune Agnès vit alors à Versailles avec ses parents et ses frères, fréquente peu l’église et "mène ses parents par le bout du nez", écrit Guy Hugnet, qui a recueilli le témoignage de proches, et s’appuie sur la correspondance d’Agnès dont il publie de larges extraits. L’auteur dresse le portrait d’une adolescente "dotée d’un sacré caractère et [qui] n’a pas l’habitude de s’en laisser conter". Drôle, grande gueule, elle fait ce qui lui chante, aime sortir, boire, danser et fumer. "Elle a été décrite comme la Versaillaise nunuche, catholique coincée, un cliché en réalité car elle n’était pas du tout comme ça", rappelle-t-il à Planet. Une "super copine" disponible pour ses amies, mais qui peut aussi "se montrer vacharde et très possessive".
En 1979, alors âgée de 17 ans, Agnès croise la route de Xavier Dupont de Ligonnès et tombe "follement amoureuse de lui", nous précise Guy Hugnet. Ils sont jeunes, insouciants, la vie est belle en région parisienne et dans le sud de la France, avant une fin brutale de non-recevoir. Au milieu des années 1980, Xavier préfère à la petite Agnès une grande blonde Allemande, rencontrée dans un camping en Corse. Après l’avoir quittée pour une autre et sillonné les Etats-Unis, Xavier Dupont de Ligonnès revient finalement vers Agnès. Au début des années 1990, le voilà de retour à Versailles, avec des projets plein la tête. Elle vient de donner naissance à un garçon appelée Arthur dont le géniteur a pris la poudre d’escampette. Qu’importe, Agnès est toujours amoureuse de ce beau gosse aux Ray Ban qui adopte l’enfant.
Les noces sont célébrées en secret à Draguignan. Un mariage d’amour pour elle, mais pour lui ? "Ça semble être plus un mariage de raison qu’autre chose", explique Guy Hugnet à Planet, ajoutant : "Elle était vraiment raide dingue de lui mais il n’y a pas d’éléments, dans tout ce qu’il écrit, qui montrent que Xavier était vraiment amoureux d’elle". Rapidement la famille s’agrandit avec la naissance de Thomas. Mais le bonheur conjugal laisse progressivement place à une série de ruptures, jusqu’au point de non-retour.
Agnès Dupont de Ligonnès : "Une liaison avec le meilleur ami de Xavier vécue comme une trahison"
En 1995, Xavier perd la foi, "la pire désillusion qu’un homme puisse connaître", écrira-t-il. A 35 ans, il est dévasté par un tsunami intérieur qui chamboule son équilibre mental et familial. Interrogé par Planet, Guy Hugnet explique que "les choses ont commencé à se gâter entre Xavier et Agnès. Il est absent toute la semaine, elle reste seule avec les enfants et déjà se plaint d’être délaissée – aussi bien socialement, affectivement que sexuellement –et de n’avoir pas d’amis etc." Lui ne voit pas où est le problème , les critiques soulevées par son épouse étant "dans sa tête". Les échanges entre Agnès et son mari présentés dans L’Affaire Dupont de Ligonnès, La secte et l’assassin montrent qu’aux reproches qu’elle lui fait, il répond qu’il ne comprend pas du tout pourquoi elle se plaint. Pourtant Agnès sombre s’enfonce de plus en plus, jusqu’à la nouvelle rupture de 2005.
S’il a perdu la foi dix ans auparavant, Xavier Dupont de Ligonnès sait qu’il peut compter sur sa famille, sur une épouse dévouée et quatre beaux enfants, auxquels il se raccroche. Mais "la trahison" d’Agnès va marquer un une rupture dans leur relation, nous explique Guy Hugnet. "Xavier découvre qu’elle le trompe avec son meilleur ami. C’est pour lui un second traumatisme". Pour la punir, il l’oblige à participer à un plan à trois avec son amant et lui-même. Elle se sent humiliée.
Dès lors le couple s’engage sur une pente glissante. Xavier Dupont de Ligonnès a en tête plein de beaux projets professionnels supposés lui apporter gloire et richesse, mais ses affaires ne marchent pas. Il accumule les dettes. D’un côté, il a dilapidé l’héritage de sa femme de l’autre, elle le soupçonne d’entretenir des liaisons extra-conjugales. Agnès n’est pas heureuse : elle le dit à son mari, et confie son mal-être à des inconnues rencontrées sur des forums.
Agnès Dupont de Ligonnès : "Il existe une fracture dans sa personnalité"
Pendant son enquête, Guy Hugnet a interrogé plusieurs amies d’Agnès, dont certaines la connaissaient depuis son plus jeune âge. A leurs yeux, la rencontre avec son mari marque le moment de bascule, celui où elle se jette "dans la gueule du loup". Non seulement dans les bras de Xavier mais aussi dans ceux de sa belle-mère, qui est à la tête d’une pseudo église et se prétend réceptrice de messages divins. A l’entendre, le monde est gouverné par Satan et l’Apocalypse, imminente. Pour Guy Hugnet, "à partir du moment où elle [Agnès, NDLR] le rencontre, elle tombe sous sa coupe et se met à croire les délires religieux de sa belle-mère. Elle est jeune, mais, ça ne colle pas avec sa personnalité forte et indépendante". Plus qu’une simple crédulité, il y a sans doute une faille intérieure.
Pendant son mariage, Agnès, tentera bien de se rebeller contre son mari, refusant par exemple de lui accorder une énième rallonge financière. En représailles, il quitte le domicile conjugal, la laissant désemparée et sans ressources pour élever ses enfants (c’est lui qui tient les cordons de la bourse). Quelques mois plus tard, elle rentre dans le rang et capitule. La vie reprend.
Au fil du temps Agnès s’enlise dans un marasme sans fond. Ses plus proches amies soupçonnent des conflits à l’intérieur du couple, mais sans en mesurer ni l’étendue ni la profondeur. Agnès, seule, délaissée, perd pied. Pour Guy Hugnet, "il existe une scission, une fracture entre la personnalité qu’elle donnait à voir et ce qu’elle était et vivait réellement. Elle souffrait profondément, mais faisait bonne figure pour donner le change". Totalement désespérée, "elle n’arrivait pas à se sortir de cet engrenage dans lequel elle était prise et qui lui sera fatal". Pourquoi n’a-t-elle pas divorcé ? Par dépendance affective ? C’est le mystère Agnès Dupont de Ligonnès.