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Prendre sa vieillesse en main, avant qu’elle ait pris le dessus. Lorsqu’ils passent le cap des 60 ou 65 ans, de nombreux Français s’interrogent sur l’avenir : combien de temps vais-je encore pouvoir rester chez moi ? Que va-t-il se passer si je tombe alors que je suis seul(e) ? Qui verrais-je lorsque j’aurai totalement cessé de travailler ? Certains ont décidé d’apporter eux-mêmes leurs réponses à ces questions avant que la vie ne le fasse pour eux. A Vaulx-en-Velin (Rhône), l’immeuble Chamarel – Les Barges a récemment fêté ses trois ans et ses habitants ne pourraient pas être plus enthousiastes d’y vivre, même sous confinement. Ils sont moins d’une vingtaine, répartis dans seize appartements flambant neufs, proche des transports, des commerces et des loisirs de la commune. Une sorte de grande colocation joyeuse, à la différence que les habitants ne sont pas des étudiants, mais des retraités.
Habitat coopératif : vivre en communauté pour vivre mieux
Âgés de 62 à 80 ans, les habitants de Chamarel-Les Barges ont été les premiers à sauter le pas de l’habitat coopératif pour personnes vieillissantes en France. Il a fallu plusieurs années et de nombreuses galères pour que le rêve de ce groupe d’amis devienne enfin réalité et que leur immeuble ouvre ses portes pour la première fois en 2017. Jean, 69 ans, est un des pionniers de cette aventure et il se souvient auprès de Planet "qu’il a fallu au moins huit ans entre le commencement et l’arrivée dans nos murs, pour trouver le groupe de personnes qui était prêt à faire une coopérative d’habitants, trouver le terrain, convaincre les élus, les banques etc.". Si aujourd’hui il ne regrette rien, il n’avait pas réalisé à l’époque le travail et le temps que tout cela représentait. À la clef, un immeuble qui répond à de nombreux critères écologiques, qui offre une entière indépendance à ses résidents et surtout qui leur facilite la vie. Isolation en paille, belle exposition, jardin commun, ascenseur, douche à l’italienne, espace nécessaire pour un fauteuil roulant… Les résidents peuvent y vieillir en toute sérénité.
Jean vit dans un T3 de 55 m², mais la majorité des habitants de Chamarel-Les Barges vivent dans un T2 de 48m². C’est le cas de Danièle, la doyenne de l’immeuble du haut de ses 80 printemps, qui nous explique payer une redevance mensuelle de 618 euros. Pour ce prix, elle loue un logement totalement indépendant avec un petit balcon et partage plusieurs espaces communs avec les autres résidents : "Une grande salle qui sert aux réunions, aux spectacles, aux repas partagés. Une cuisine ouverte quand on reçoit ou qu’on mange tous ensemble, avant le Covid bien sûr ! Il y a également la buanderie commune, un atelier de bricolage, un garage à vélo et un bureau".
Si les bons côtés sont nombreux, pour pouvoir profiter pleinement d’un habitat coopératif, tous les résidents mettent la main à la pâte. Comment s’organisent-ils au quotidien ?
Habitat coopératif : des préférences et de l'autogestion
Ce n’est pas parce que ces 17 retraités vivent en communauté qu’ils doivent vivre ensemble 24 heures sur 24. Il y a un seul moment particulièrement important dans leur semaine et auquel ils ne dérogent pas : l’assemblée générale des habitants. C’est pendant cette réunion que sont évoqués les différents points de la vie en communauté mais aussi, comme nous l’explique Jean, "pour gérer les relations humaines, qui sont parfois un peu plus compliquées à appréhender". Toutes les décisions sont prises au consensus et un habitant représente une voix, peu importe son loyer, son ancienneté ou la taille de son logement.
Surtout, "tout le système est monté pour qu'il n'y ait pas de spéculation", ajoute Jean. "La valeur du bâtiment reste la même, quoi qu'il arrive et personne ne peut faire de bénéfice sur les opérations en cas de revente, l'argent qui reste une fois les crédits payés irait directement à la coopérative des habitants, pour aider une autre résidence". Pour Danièle, l'habitat coopératif repose avant tout sur quatre piliers, "la non-spéculation, la solidarité, la démocratie et nous on a voulu aussi l'écologie".
L’immeuble étant en autogestion, ses habitants ont le devoir de mettre la main à la pâte et de trancher toutes les questions qui peuvent se poser au quotidien : ménage intérieur, aménagement extérieur, finance... Il y a ceux qui jardinent, ceux qui bricolent et ceux qui préfèrent la paperasse. Bref, "on a des relations collectives pour gérer les choses, mais chacun est libre de voir qui il veut, ça ne nous regarde pas", assure Jean. Cet habitat coopératif offre aux résidents une sérénité financière puisqu’ils ont un loyer qui n’augmente pas, mais aussi une sérénité sociale, car ils ne se sentent jamais seuls.
Habitat coopératif : entraide et solidarité entre retraités
A entendre nos deux résidents, il n’y a rien d’autre que de l’entraide et de la solidarité au sein de cet habitat coopératif. A 80 ans, Danièle apprécie de vivre avec des personnes qui ne sont pas de sa génération et qui ont parfois même 15 ans de moins qu’elle : "Entre retraités, même s’il y a un décalage important en termes d’âge, on est toujours plus compréhensif à 60 ans qu’à 20 ou 40, vis-à-vis des personnes qui ont besoin d’aide". "On s’entraide sans doute plus facilement, parce qu’on comprend mieux les problèmes de la vieillesse", ajoute-t-elle auprès de Planet, avant de conclure : "Ici, l’objectif c’est de vieillir en évitant l’isolement".
À tous ceux qui s'inquiètent pour leur avenir ou qui aimeraient sauter le pas sans oser le faire, Jean a un conseil : "Dépêchez-vous parce qu'il faut un certain temps pour réaliser ce projet !". "Rien n'est prévu pour le vieillissement et c'est quand arrive la catastrophe qu'on ne sait pas comment gérer les choses. Les solutions existantes coûtent cher et en deux ou trois ans toutes les économies d'une personne peuvent être bouffées", ajoute-t-il à l'intention des sexagénaires et septuagénaires intéressés par l'habitat coopératif. Il insiste surtout sur l'importance de l'humain, qui est au coeur de leur démarche : "De savoir qu'on peut taper à n'importe quelle porte et que qu'un répondra, c'est une chance qu'on ne mesure pas toujours".