De nouvelles règles d’indemnisation entreront en vigueur en avril 2025 et impacteront durement les plus âgés.
Pas un seul mort en Ehpad depuis une semaine. C'est le bilan, ô combien encourageant, que publiait le journal local Lyon Capitale, le vendredi 10 juillet 2020. Après le décès de de 3084 personnes pour la seule région Auvergne-Rhône-Alpes depuis le début de l'épidémie, le coronavirus n'aura tué personne en l'espace de sept jours, permet d'affirmer le dernier point hebdomadaire de Santé Publique France. Pour autant, la situation pourrait progressivement se détériorer, en France. C'est en tout cas ce que craint un infirmier en gériatrie, officiant dans un établissement de la Robertsau, à Strasbourg. Il a accepté de répondre aux questions de Planet.
Selon lui, le coronavirus Covid-19, qui a fait tant de mal à l'Hexagone, est loin d'être derrière nous. "Pour une majorité de Français, je crois que la fin du confinement signifiait aussi la fin du coronavirus. Nous l'avons bien remarqué : le soutien au personnel soignant s'est tari et pour beaucoup de gens, c'est comme si la maladie n'existait plus. Or c'est loin d'être le cas. Cet été, je le crains, il va falloir s'attendre à des surprises…", alerte-t-il.
D'après lui, la situation est d'autant plus dramatique que le personnel soignant manque cruellement de tout pour pouvoir prendre en charge les malades. De matériel, certes, mais pas seulement. "Nous devons faire face à un véritable problème de sous-effectif. Depuis la fin du confinement, ce fut le cas sur 5 des neufs premiers postes que j'ai du faire. Evidemment, cela n'est pas sans impact sur la façon dont nous faisons notre travail", rappelle l'infirmier qui détaille les conséquences néfastes d'une organisation en perpétuel flux-tendu : fatigue, difficultés à prodiguer les soins comme il faudrait…
"Nous sommes en bout de chaîne"
"C'est comme si le coronavirus n'avait rien changé", poursuit le praticien qui explique combien les habitudes précédent le virus sont de retour. Et lui de déplorer : "On nous tape de nouveau dessus dès lors que l'on souhaite commander du matériel…"
Pourtant, quand il évoque les objets dont il a besoin, le soignant n'évoque rien d'exubérant : à la Robertsau, ils manquent de blouse, de masques, de pousses-seringues par exemple. Autant d'éléments essentiels, tant pour la protection des personnels médicaux que pour celle des patients… "Nous sommes en bout de chaîne. Mécaniquement, ça devient donc très dur de s'approvisionner en masques ou en blouse, pour ceux qui peuvent en trouver", affirme-t-il. Et c'est loin d'être le seul soucis.
Un véritable problème avec la hiérarchie ?
Quand le soignant évoque les problèmes qui complexifient l'exercice de son métier, il évoque évidemment les relations parfois conflictuelles avec sa direction. "Pendant la crise sanitaire, nombre d'entre elles se sont mise en arrêt maladie, craignant d'attraper le virus. Pendant ce temps-là, nous étions au feu", rappelle-t-il d'entrée de jeu. Il dénonce une hiérarchie incapable d'écoute, qui n'a qu'une seule réponse à la bouche : "débrouillez-vous".
Cet infirmier en gériatrie s'émeut aussi de la vision comptable qui prévaut au moins à la Robertsau. "Il est urgent d'écouter les équipes, de faire davantage dans l'humain et de débloquer les budgets. Dès lors qu'on ne travaille qu'en flux-tendu, la moindre absence devient problématique", rappelle-t-il, non sans évoquer certaines des conséquences concrètes sur le confort de vie et de travail des soignants.
Il raconte : "Auparavant, nous avions une salle de repos, équipée d'un téléviseur permettant aux soignants de rester informés. L'une des cadres de l'établissement a voulu la faire retirer prétextant qu'elle coûter trop cher. Notre chef a souhaité la maintenir mais finalement, elle a tout de même été enlevée. Cette logique pécuniaire, qui vise à faire l'économie de bouts de chandelles, n'est pas compatible avec la qualité de vie du soignant". Laquelle, rappelle-t-on pour celles et ceux qui auraient pu l'oublier, joue directement sur la façon dont vos proches pourraient-être traités.
Des infirmières et des infirmiers mal formés ?
Entre la fatigue, le manque de bras et de matériel, la situation se fait mécaniquement complexe. Et, visiblement agacé, le soignant reconnaît ne pas vouloir penser à comment se déroulera l'été. Après tout, il devrait bientôt pouvoir prendre quelques congés amplement mérités. "J'ai près de deux mois à rattraper au total, que je ne récupérerais jamais", explique-t-il, précisant que c'est en comptant les nombres d'heures passées à travailler qu'il est possible pour chaque infirmier de savoir à combien de jours de repos supplémentaires il pourrait théoriquement prétendre.
Mais le sous-effectif n'est pas le seul problème. "Un nombre considérable d'infirmières et d'infirmiers qui nous rejoignent sont mal formés. Ils doivent apprendre dans l'urgence, formés en deux ans au lieu de trois et sont pris sur dossiers plutôt que sur concours. Chez ceux-là, j'ai l'impression que la vocation n'y est pas", estime-t-il.