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Se dirige-t-on vers la fin des "petites" retraites ? Selon Emmanuel Macron, le système de retraite français, composé de "42 régimes différents, [...] entretient des inégalités majeures". Toutefois, "les conditions ne sont pas réunies pour relancer ce chantier aujourd'hui", a déclaré le chef de l'État lors de son allocution télévisée ce mardi 9 novembre, à propos de la réforme des retraites. Afin de justifier son choix, le président a évoqué la reprise de la crise sanitaire en Europe, qui fait face à une cinquième vague.
"Une vie de travail doit offrir une pension digne et donc toute retraite pour une carrière complète devra être supérieure à 1 000 euros par mois", avait néanmoins assuré le chef de l’État en juillet dernier. Cette mesure, qui fait partie des promesses présidentielles à l’issue du grand débat, se fait toutefois toujours attendre. Elle est pourtant inscrite dans la loi depuis 2003, rappelle Alternatives Économiques.
Introduit dans la réforme des retraites de 2019, ce coup de pouce a été écarté en raison de la crise sanitaire.
Retraite à 1000 euros : plus d’1/3 des retraités touchent moins
Sur les 15,5 millions de retraités français, 5,7 millions touchent une pension brute inférieure à 1 000 euros. Soit plus d’un tiers (37%), selon le rapport Turquois-Causse remis au gouvernement en mai dernier.
Notons que ce chiffre ne comptabilise pas les pensions de réversion versées aux veuves et veufs, ni les carrières à l’étranger. En intégrant ces données, la part chute à 22%. Près des trois quarts (74%) sont des femmes.
Au fil des années, la situation économique des retraités semble toutefois s’améliorer. 54% de ceux ayant liquidé leurs droits en 1990 perçoivent en effet une pension inférieure à 1 000 euros, contre 32% de ceux étant parti à la retraite entre 2010 et 2019 (32 %). Cela s’explique par une augmentation de la part des femmes sur le marché du travail. Les longues périodes d’inactivité pour garde d’enfants (premier facteur explicatif des petites pensions), sont moins nombreuses. Le rapport stipule cependant que les temps partiels prolongés augmentent. "Ce sont elles principalement qui connaissent de petites carrières. Or, le mécanisme de décote est ravageur : une réduction de carrière d’1/8ème (ex : 37 ans travaillées au lieu de 42 ans) aboutit à la perte d’1/4 de retraite !", assurait en octobre dernier Bruno Chrétien, président de l’Institut de la Protection Sociale, dans les colonnes de Notre Temps.
Qui pourrait bénéficier de cette retraite garantie à 1000 euros ?
Retraite à 1000 euros : carrière complète obligatoire
Seules les personnes pouvant justifier d’une "carrière complète", soit celles ayant validé l’ensemble de leurs trimestres (167 actuellement, puis 172 à partir de la génération 1973), seront éligibles à la pension retraite de 1000 euros. Ce serait une sorte de taux plein plancher.
"Il n’apparaît pas équitable qu’une pension issue d’une carrière complète soit inférieure à un minimum social. Il est ici aussi question de dignité et de valeur accordée au travail", jugent les députés Lionel Causse (LREM) et Nicolas Turquois (MoDem) dans leur rapport.
Cette pension totale minimum de 1 000 euros, serait progressivement à 85% du Smic net, soit un niveau proche du seuil de pauvreté (qui était de 1 063 euros en 2018).Sur les 5,7 millions de retraités percevant une pension inférieure à 1 000 euros, seuls un tiers (1,8 million) ont une carrière complète ou quasi complète (plus de 30 ans de cotisation). Cela représente 12% de l’ensemble des retraités. Leur pension varie entre 700 et 800 euros en moyenne.
Quand cette mesure entrera-t-elle en vigueur ?
Retraite à 1000 euros : il va encore falloir patienter
Les deux élus proposent de revaloriser le "minimum contributif majoré" aux personnes justifiant d’une carrière complète avec 120 trimestres cotisés (et non assimilés), soit ceux qui ont donné lieu à un prélèvement de cotisations sur un revenu. Ainsi, seules 875 000 personnes pourraient être concernées, soit près de 6% de l’ensemble des retraités.
Coût de la mesure : 1,4 milliard d’euros.
En élevant progressivement le minimum contributif majoré afin que la pension totale aboutisse à 85% du Smic net en 2025, la réforme ferait gagner 163 euros aux bénéficiaires, pour un coût annuel de 2,1 milliards d’euros.
Si la mesure n’est accordée qu’aux nouveaux retraités, seuls 51 700 personnes (soit 8%) pourraient en jouir. Gain mensuel : 46 euros pour un coût de 54 millions d’euros à l’horizon 2025.
Les concertations devraient reprendre à la rentrée, mais rien ne sera lancé "tant que l’épidémie ne sera pas sous contrôle et la reprise bien assurée".
Quoi qu’il en soit, la retraite à 1000 euros ne pourra pas être instaurée en 2022. Le rapport Turquois-Causse note "l’impossibilité technique" pour les caisses de retraite de recalculer les pensions pour l’an prochain.
Emmanuel Macron a d'ailleurs déclaré ce mardi 9 novembre que "dès 2022 il faudra, pour préserver les pensions de nos retraités et la solidarité entre nos générations, prendre des décisions claires" suivant "des principes simples". Il faudra "travailler plus longtemps en repoussant l'âge légal, aller vers un système plus juste en supprimant les régimes spéciaux, en harmonisant les règles entre public et privé et en faisant en sorte qu'au terme d'une carrière complète, aucune pension ne puisse être inférieure à 1000 euros".
Il a aussi émis la possibilité de "partir en retraite progressivement, d'accumuler des droits plus rapidement pour celles et ceux qui le souhaitent" et "d'encourager le travail au-delà de l'âge légal aussi pour celles et ceux qui en ont envie".