De nouvelles règles d’indemnisation entreront en vigueur en avril 2025 et impacteront durement les plus âgés.
Date et conditions de départ à la retraite, avance sur prime, délai de prévenance…Connaissez-vous vraiment vos droits en tant que salarié ? Contrairement à certaines idées reçues, l’employeur ne peut pas décider du départ à la retraite de son employé. "Si les pressions peuvent être dans certaines situations fortes, il ne peut, légalement, mettre un salarié à la porte avant l’âge de 70 ans", assure Dominique Prévert, associé du site Optimaretraite, leader en France dans le domaine de la vérification, du calcul et de l'optimisation des droits à la retraite.
"Il peut se sentir fragile, ou être confronté à une pression ou un climat pesant, mais le salarié est en position de force. Il doit ainsi être le pilote de sa propre retraite, en définissant ses objectifs, et sa stratégie de fin de carrière", détaille-t-il.
Retraite : "On ne peut ni vous forcer à partir ni vous l’interdire"
Si votre feuille de route n’est pas compatible avec votre employeur, vous pourrez alors négocier. Gardez en tête qu’il ne peut, tout comme la caisse de retraite, ni vous forcer à partir, ni s’opposer à votre départ à la retraite. Vous avez donc la main sur la date à laquelle vous liquiderez vos droits, en fonction de vos désirs et vos intentions.
Certes, l’âge légal est fixé à 62 ans, mais 3 choix s’offrent à vous.
- le départ anticipé avant 62 ans, si vous bénéficiez d’un dispositif carrière longue
- le départ à 62 ans au taux plein
- le départ au-delà de l’âge légal si l’ensemble des trimestres ne sont pas acquis ou ne vous permettent pas d’acquérir un pouvoir d’achat satisfaisant.
"Un salarié peut faire valoir ses droits à la retraite le premier jour du mois suivant son 62ᵉ anniversaire (âge légal). Or, votre date de départ doit être un choix individuel. Vous avez la possibilité d’anticiper votre départ ou bien de rester au-delà de l’âge légal. Cette décision doit être effectuée en fonction de votre équilibre de vie : évaluez ainsi les retombées psychologiques (pression éventuelle), affectives, et économiques (surcote, décote, compensations à négocier)", conseille l’expert.
La différence de pouvoir d’achat entre votre salaire et votre pension de retraite peut en effet être conséquente. "En continuant de travailler, vous pouvez donc, à court terme, avoir des revenus plus élevés, tout en générant de nouveaux droits à la retraite, jusqu’à 63, 64 ou 65 ans", poursuit-il. Cela vous permettra d’avoir une surcote non négligeable.
Certaines dates de départ sont toutefois plus opportunes que d’autres…
Retraite : les 3 dates d’opportunités de liquidation de vos droits
Si l’on peut partir n’importe quel premier jour d’un mois civil, certaines dates sont toutefois plus avantageuses pour le calcul de vos droits. 3 astuces permettent de les optimiser.
"Selon le profil de carrière, souvent, nous préconisons de partir le 1ᵉʳ jour d’un trimestre civil", conseille Dominique Prévert. "Par exemple, si vous partez le 1ᵉʳ juillet au lieu du 1ᵉʳ juin, vous bénéficiez d’un trimestre de plus. Cela correspond à une surcote d’1,25% sur votre pension, plus un mois de salaire et quelques points Agirc Arrco supplémentaires. Reculer votre date de départ d’un mois peut donc vous être profitable."
Même logique pour les départs en fin d’année. "Le régime de base s’appuie sur les 25 meilleures années pour calculer le salaire annuel moyen. Or, la dernière année, qui offre souvent la rémunération annuelle la plus élevée, n’est prise en compte seulement si elle a été accomplie en totalité. Ainsi, mieux vaut partir le 1ᵉʳ janvier que le 1ᵉʳ décembre pour augmenter le calcul de votre pension", assure l’expert. "Même si cela ne vient rajouter que 20 à 30 euros par mois, sur la durée, cela revient à des milliers d’euros sur 20 ou 30 ans d’espérance de vie".
En dehors de la dimension sociale (droits sociaux, patrimoine social, droits à la retraite) "vous pouvez aussi lisser vos revenus exceptionnels (congés payés, soldes de tout compte, prime de départ…) et optimiser votre facture fiscale", assure Dominique Prévert. "Si vous vous apprêtiez à partir en fin d’année, il peut être judicieux de repousser votre départ l’année suivante, pour répartir vos revenus sur deux années fiscales différentes", détaille-t-il. Au lieu du 1ᵉʳ janvier, partez plutôt le 1ᵉʳ février. En effet, les revenus à la retraite étant moindre, vous pourrez de cette manière étaler vos revenus exceptionnels liés à la fin de carrière, en étant soumis à une tranche d’imposition moins forte l’année suivante (1 mois de salaire et 11 mois de pension retraite).
Réfléchissez donc à la date la plus opportune en fonction de votre profil, car celle-ci est irréversible.
Date départ à la retraite : entamez le processus 6 mois à l’avance
Avant de prendre votre décision définitive, mieux vaut donc y réfléchir à 3 fois. Vous ne pourrez en effet pas revenir en arrière. Il vous faudra donc anticiper, pour ne pas être pris au dépourvu. "Entamer le processus 5 à 6 mois à l’avance, comme le recommande les caisses de retraite, en demandant la liquidation de vos droits. Cela vous permettra de : vérifier l’ensemble des informations relatives à votre relevé de carrière, (date, nom et adresse des employeurs…), accessible via votre espace personnel sur le site de l'assurance retraite, et réunir tous les documents nécessaires et manquants, afin d’être payé dès le mois de votre départ à la retraite", note Dominique Prévert.
Selon le climat et la courtoisie dans l’entreprise, vous avez la possibilité de prévenir votre employeur de votre intention par politesse. "En revanche, nous conseillons plutôt de ne pas vous engager officiellement. Le travail de regroupement et de vérification d’informations peut être long et fastidieux. Une anticipation de 6 mois vous laisse le temps de compléter votre dossier, d’avoir l’ensemble des accusés de réception et d’en vérifier l’exactitude, et vous donne en même temps la certitude d’être payé rapidement, au moment de votre départ", énonce l’expert.
Une fois que le dossier vous semble correct, vous pourrez alors informer votre direction de votre départ et signer officiellement les documents relatifs à votre départ à la retraite. Le délai de prévenance, généralement inscrit dans votre convention collective, se situe entre 2 et 3 mois avant la date de départ officielle.
"Ne faites surtout pas les choses à l’envers, en prévenant votre employeur avant d’élaborer votre dossier retraite. Car en cas d’imprévu (bug, changement d’avis, manque de justificatifs…), ce sera la panique à bord !", prévient Dominique Prévert.
Par ailleurs, est-il possible de négocier la prime de départ ? Si oui dans quelles conditions ?
Prime de départ à la retraite : montant et négociations possibles
Dès lors que vous avez a minima 10 ans d’ancienneté dans votre entreprise, une indemnité de départ à la retraite doit légalement vous être versée. "Le montant est indiqué dans votre convention collective", déclare l’associé d’Optimaretraite.
Il équivaut généralement à un demi-mois de salaire pour 10 ans d’ancienneté au sein de la société, un mois après 15 ans, un mois et demi après 20 ans, et deux mois après 30 ans.
En revanche, les conditions de versement peuvent être plus favorables selon les conventions (par exemple sans condition d’ancienneté ou inférieure à 10 ans). "Pour connaître la somme de votre prime de retraite, il suffit de relever le numéro de votre convention collective sur votre bulletin de salaire, et d’effectuer une recherche sur Legifrance. Vous pouvez également directement demander à votre service des ressources humaines de vous la communiquer, mais vous prenez alors le risque d’éveiller des soupçons sur vos intentions de départ", avertit l’expert.
En ce qui concerne la négociation de la prime, "dans 99 % des cas, c’est l’indemnité prévue par la convention collective qui est versée", indique Dominique Prévert. Toutefois, certaines situations vous placent en situation de force : "Les salariés, "forcés" par leur employeur de passer en retraite progressive, ont une marge de manœuvre. En vous retrouvant avec 85 à 90% de votre ancien salaire pour un temps partiel équivalent à 60 ou 80 % d’un temps plein, vous avez la possibilité de négocier une avance de votre indemnité de départ à la retraite de manière lissée", ajoute-t-il.
Vous pouvez également suggérer à votre employeur de calculer votre indemnité à partir de votre salaire à temps plein, plutôt que sur la base de vos revenus à temps partiel en retraite progressive. "Généralement, il ne refusera pas cette proposition. D’une part car l’indemnité de départ a été provisionnée dans ses comptes sur un temps plein, et d’autre part, car il a intérêt à ne pas provoquer de tensions, s’il souhaite que vous acceptiez de passer en retraite progressive", indique l’associé du cabinet de conseil Optimaretraite.
Votre employeur vous presse vers la sortie et vous n’avez pas acquis votre taux plein ? "Poussez-le alors à racheter vos trimestres à titre d’indemnité de départ en retraite. Cela est plus avantageux pour lui, car vous garder jusqu’à l’obtention de votre taux plein peut lui coûter bien plus cher", conclut Dominique Prévert. D’autant que le rachat de trimestres est déductible du revenu imposable.