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Cécile Collet, esthéticienne depuis 38 ans et socio-esthéticienne depuis 5 ans, basée à Tavers dans le Loiret, est la créatrice du blog Cécile avec Vous, dédié à sa nouvelle activité. Il y 5 ans donc, elle a décidé de s'orienter vers une pratique de son métier un peu moins commerciale que celle des instituts traditionnels. Mais aussi plus humaniste. C'est ainsi qu'elle a découvert la socio-esthétique, devenue depuis son cheval de bataille. Mais qu'est-ce que c'est exactement ? Cécile Collet a bien voulu nous expliquer les tenants et aboutissants de cette discipline méconnue qui existe ourtant depuis 40 ans.
Planet.fr : Quelle est votre définition de la socio-esthétique ?
Cécile Collet : Je dirai que c'est une approche "psycho-corporelle" de personnes fragilisées (maladie, vieillesse, détresse sociale ou handicap), dans laquelle le soin sensoriel, esthétique et le "toucher-massage" sont proposés comme outils pour apporter un "mieux être", à avoir une meilleure estime de soi.
Planet.fr : Elle n'est donc pas destinée qu'aux personnes âgées ?
Cécile Collet : Non, je travaille aussi en prison par exemple, également auprès de personnes en situation de handicap et de personnes en réinsertion professionnelle. Mais beaucoup en Ehpad, en résidences seniors (pour lesquelles je ne fais que des séances collectives car c'est dans leur cahier des charges), et aussi pour des associations qui proposent des activités aux jeunes retraités. Et je m'occupe également des aidants, qui ont une vie compliquée. Les personnes intéressées peuvent aussi se rapprocher des centres sociaux et mairies de leurs communes, qui offrent de plus en plus fréquemment ce genre de prestations aux ainés. Cela peut être de la socio-esthétique mais aussi de l'art-thérapie, dans l'optique de créer du lien entre les gens.
Planet.fr : Et concrètement, la socio-esthétique consiste en quels actes ?
Cécile Collet : Les accompagnements socio-esthétiques peuvent se faire de deux façons, soit en ateliers collectifs (soins des mains, du visage, auto-massage, création de produits), soit par des soins individuels (massages, soins du visage, maquillage etc.). Le massage par exemple est souvent un accompagnement corporel de la souffrance, le maquillage pour retrouver une meilleure estime de soi. Mais on y ajoute un aspect thérapeutique ou éducatif en fonction du public que l'on va avoir. Ce, toujours en coordination avec des équipes pluridisciplinaires. Par exemple j'ai travaillé à Orléans avec une association qui s'appelle le Pont des âges, financée par une mutuelle (Malakoff Humanis). J'ai réalisé des séances de groupes avec des retraités et des aidants. Il est important de travailler avec ces équipes car elles connaissent les gens et savent les mobiliser, car il faut les motiver (les aidants n'ont pas le temps, les retraités pensent que ce n'est pas pour eux).
Planet.fr : Comment faire pour les motiver ?
Cécile Collet :Il faut donner aux gens l'envie de prendre soin d'eux. Les établissements en ont conscience et constatent que leurs pensionnaires ne vont pas forcément bien. Les problématique du vieillissement sont souvent le laisser-aller, le manque d'envie de prendre soin de soi justement. Les femmes comme les hommes, ces derniers étant d'une génération qui n'en n'a pas l'habitude. Il y a aussi les veuves. Ces gens se renferment sur eux-mêmes. Nous, notre objectif c'est de recréer du lien, de leur faire rencontrer d'autres personnes et qu'il reprennent confiance. Pour certains, le fait de ne plus travailler leur donne le sentiment de ne servir à rien.
Planet.fr : Là on parle des séances collectives ?
Cécile Collet : Il y en a aussi en Ehpad car pendant les séances collectives, qui ont lieu l'après-midi, les gens font aussi "par eux-mêmes." Cela les mobilise. Je vais travailler sur tout ce qui olfactif, sensoriel, les textures et les gens vont par exemple faire des auto-massages. On va aussi insister sur la motricité fine. Avec le sensoriel, on va essayer de faire rejaillir la réminiscence, les souvenirs. Cela va mettre tous les sens en éveil, car les patients ne les font plus travailler. La socio-esthétique va remobiliser les cinq sens et lutter contre les troubles cognitifs. C'est très bénéfique pour les troubles liés au grand âge.
Planet.fr : Comment se déroulent les séances individuelles ?
Cécile Collet : Le matin je réalise des soins individuels en chambre pour ceux qui ne sont plus en capacité de participer aux ateliers. On sera plus sur du massage. J'ai aussi une formation en aromathérapie, en réflexologie plantaire et en conseil en image. L'aromathérapie me sert beaucoup car elle peut améliorer la santé psychique. J'ai l'exemple d'une dame pour laquelle je l'ai utilisée en même temps que la réflexologie plantaire et les équipes médicales ont diminué ses traitements (elle souffrait d'une dépression profonde).
Planet.fr : Les Ehpad sont-ils ouverts à cette nouvelle discipline ?
Cécile Collet : Quand ils l'ont testée, ils sont convaincus. Ceux qui ne connaissent pas sont un peu sceptiques au départ, il faut les rencontrer pour leur expliquer les bienfaits sur les résidents. La socio-esthétique diminue aussi beaucoup l'anxiété par cette approche bienveillante. Et nous, nous avons le temps contrairement aux soignants. On va beaucoup écouter les gens, les toucher (certains me disent qu'on ne les a jamais massés de leur vie), on les "réhumanise" en quelque sorte. Je pense à une dame qui avait vécu dans une ferme toute sa vie et le soin des mains, le massage et le vernis rouge, ce sont des choses auxquelles elle n'aurait jamais pensé avoir accès un jour.
Planet.fr : Mais comme vous l'évoquiez la socio-esthétique ne se limite pas aux soins ?
Cécile Collet : On apporte beaucoup de bien-être, de détente et de réconfort. On donne aussi des astuces, des conseils pour des soins pas chers (faire un gommage des mains avec du sucre en poudre et une huile parfumée par exemple). Les résidents aiment beaucoup. On permet aussi de maintenir l'autonomie des personnes, notamment par la motricité fine comme je vous le signalais précédemment. Je fais également des retours aux équipes, quelle que soit la structure, après chaque séance, individuelle ou collective : par rapport à l'évolution d'une maladie d'Alzheimer. Et les gens se confient plus facilement qu'avec le personnel soignant. On accompagne aussi les personnes en soins palliatifs, pour faciliter leur fin de vie en diminuant l'angoisse par des massages et toujours l'aromathérapie si on voit que ça fonctionne.
Planet.fr : Comment êtes-vous devenue socio-esthéticienne ?
Cécile Collet : J'en avais entendu parler, je trouvais que ça me correspondait bien. Je me suis un peu renseignée et me suis inscrite à l'école du CODES* à Tours. Je voudrais en profiter pour insister fortement sur la formation car ce sont des métiers qui ne sont pas assez réglementés. Or vous avez des personnes qui, comme pour la sophrologie ou la naturopathie par exemple, vont faire une semaine de formation sur internet et qui se prétendront ensuite qualifiées. Le CODES est intégré à l'hôpital Bretonneau de Tours qui est le seul à ce jour à délivrer un diplôme reconnu d'Etat (RNCP) en socio-esthétique.
Planet.fr : Ces pseudos praticiens qualifiés vous portent préjudice ?
Cécile Collet : J'insiste aussi auprès des professionnels. Disons que certains établissements ne sont pas assez regardants. Ils se disent "chouette je vais intégrer la socio-esthétique à ma structure." A l'arrivée, ce n'est pas du tout la même prestation qui est fournie que celle d'une socio-esthéticienne diplômée. Le CODES s'adresse à des personnes qui sont esthéticiennes de métier, avec une formation qui va être axée sur la psychologie, la gériatrie et l'oncologie car les patients sous traitement anti cancéreux sont au cœur de notre activité. Et la psychiatrie également.
Planet.fr : Comment exercez-vous cette activité justement ?
Cécile Collet : Je suis à mon compte comme la plupart de mes collègues. Il existe très peu de postes salariés en socio-esthétique. Les soins ne sont pas à la charge des patients, mais des structures. D'ailleurs, les interventions en Ehpad et résidences autonomies sont financées par la "conférence des financeurs" (ARS, CPAM, caisses de retraites et complémentaires retraite). En socio-esthétique on travaille principalement avec des équipes professionnelles : médicales, médico-sociales ou sociales. Je collabore avec huit structures différentes.
*(Cours d'esthétique à option humanitaire et sociale)