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"Il n'y a pas de mal à se faire du bien", assénait le père Matassoli, à l'une de ses très jeunes victimes, dans les années 70. L'homme de Dieu, qui fut vicaire de la paroisse de Clermont, dans l'Oise, puis curé du petit village de Saint-André-Farivillers (Oise, Hauts-de-France) est connu de la population locale comme l'un de ces ecclésiastes qui s'en prenait sexuellement aux enfants - il n'a cependant jamais été jugé ou reconnu coupable. "Tout le monde savait sans savoir", explique un chasseur du coin, dans les colonnes de Vanity Fair. Il dit avoir croisé le religieux dans les années 1990, sur une route de la région. "Il avait une main sur le volant, l'autre dans le slip d'un enfant", détaille-t-il au micro du journaliste Hugo Wintrebert qui signe un long et glaçant dossier sur l'affaire.
Dorénavant, le père Matassoli est mort. Sa dépouille a été découverte le 4 novembre 2019, après une interpellation sans lien apparent de prime abord. Un jeune garçon, de 19 ans, est arrêté au volant d'une Renault Scenic marron qui ne lui appartient pas. Rapidement, les forces de l'ordre réalisent qu'il n'est pas en mesure de fournir les papiers du véhicule et qu'il n'a pas de permis de conduire. Il est alors placé en garde-à-vue.
Le véhicule appartient en fait à Roger Matassoli, alors âgé de 91 ans. Les parents de l'adolescent, apparu hagard devant les forces de l'ordre, sont contactés. Son père connaît bien l'ancien curé : il a officié dans la paroisse de son village. Pire ! Il fut, a-t-il expliqué à notre confrère, l'une des victimes du vieil homme. Après l'appel des policiers, il décide donc de prendre la route. Pour s'assurer de l'état de l'individu qui, si longtemps, l'a torturé.
Le bureau de l'ancien curé sens dessus dessous, le vieil homme retrouvé mort
Le père de famille n'ira pas jusqu'à entrer dans la demeure du père Matassoli. Mais par la fenêtre, indique Vanity Fair, il distingue un cadavre. Celui de son ancien bourreau. C'est par crainte d'être accusé qu'il reste dehors.
Les gendarmes ne tardent pas : ils retrouvent l'ancien curé "les yeux enfoncés dans leurs orbites, un crucifix planté au fond de la gorge", écrivent nos confrères. L'autopsie permet ensuite d'affirmer qu'il est "mort pas asphyxie avec traces de coups violent à l'abdomen, au crâne et au visage". C'est l'une de ses (nombreuses ?) victimes qui, semble-t-il, a fini par le tuer.
La vengeance d'un paroissien
Monseigneur Jacques Benoit-Gonnin, l'évêque de Beauvais, apprend la nouvelle le jour même. D'après Vanity Fair, qui rappelle qu'il venait d'arriver à Lourdes pour participer à la conférence des évêques de France sur la réparation matérielle que l'Eglise doit offrir aux victimes de pédophilie, il est frappé par l'évidence : il s'agit là de la vengeance d'un paroissien. Il adresse d'abord un message à la famille de Roger Matassoli ; puis, le lendemain, un second destiné aux victimes de l'ancien curé.
C'est que ces dernières sont nombreuses, poursuit le mensuel. Le curé arrive au village dans les années 70. Les premiers soupçons commencent en 1984. Avant cela, ceux qui osaient s'étonner de la présence de tant d'enfants - essentiellement des jeunes garçons - à la maison curiale étaient simplement traités d'anticléricaux. Pourtant le magazine dépeint une souffrance bien réelle, ô combien glaçante. Colette, la petite dernière d'une famille nombreuse, avait 8 ans à l'époque des faits. Elle en a 60 désormais et explique comment l'abbé a ruiné la vie de plusieurs de ses grands frères. Paul et Jacques, respectivement 20 et 22 ans alors, devaient prendre des douches avec le père Matassoli. Il les caressait, les prenait en photo dans des poses suggestives, glissait la main dans leur sous-vêtements ou leur faisait faire du jardinage nus.
En 1986, Paul meurt après un accident de tracteur. Jacques meurt cinq ans après s'être confié à sa petite sœur. Il avait 27 ans quand, devenu banlieusard, il s'est noyé dans la Seine. Impossible de dire s'il s'agit d'un suicide ou non. Odile, l'une de ses sœurs, en est convaincue : s'il n'avait pas été victime de pédophilie, il serait sans doute encore en vie aujourd'hui.
Un demi-siècle de mensonges, d'omerta et d'agressions sexuelles ?
Le garçon qui est accusé d'avoir tué Roger Matassoli, 91 ans, Alexandre, compte apparemment parmi les victimes de l'ancien curé. Fait étonnant ; c'était aussi le cas de son père, Stéphane. À supposer que l'homme de Dieu ait commencé à agresser les jeunes enfants dès son arrivée à Saint-André-Farivillers, l'abbé aurait donc abusé de sa position d'autorité pour s'en prendre sexuellement à ses plus jeunes paroissiens pendant près de 50 ans. Impunément, ou presque.
Il y a bien eu quelques enquêtes, mais quand les faits n'étaient pas prescrits, Roger Matassoli a pu s'en sortir d'une formule. "Seul Dieu peut me juger", affirme-t-il devant les forces de l'ordre, qui finissent par rebrousser chemin.
En 2004, Stéphane - le père du meurtrier présumé - contacte finalement l'évêché à qui il décide de raconter son récit. En 2011, alors qu'il fait part du récit à son père, ce dernier se suicide à l'aide de son fusil. Dans une lettre qu'il remet au père Matassoli, Stéphane l'accuse du meurtre de son paternel. Il se jette sous une voiture le soir même. Hospitalisé trois mois durant, il est régulièrement visité par son bourreau. "Il m'apportait des cigarettes, des chocolats. Il me conseillait aussi de ne pas dire de bêtises aux docteurs", raconte-t-il à Vanity Fair. Des années plus tard, quand le vieil homme a commencé à aider son propre fils à payer le loyer, il n'a pas compris le danger qui se tramait.