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Pour la société, elles sont des personnes âgées avant d’être des femmes. Les violences conjugales ne s’arrêtent pas lorsqu’on a plus de soixante-cinq ans, mais on n’en parle beaucoup moins. L’histoire d’un retraité qui tue sa femme est considéré un fait divers et les statistiques sur les féminicides ne recensent pas les victimes qui ont plus de 75 ans. Comme à tout âge, les violences subies peuvent être aussi bien physique que psychologique chez les seniors, alors pourquoi une telle chape de plomb au-dessus de ce qui est, avant tout, un fait de société ?
Violences conjugales : pourquoi les seniors n'intéressent-ils personne ?
"Tout se passe comme si, avec l’âge, l’identité féminine s’affaiblissait au bénéfice de l’identité de personne âgée", explique à Planet Pierre Czernichow, président de la Fédération 3977, centre d’écoute téléphonique destiné aux personnes âgées ou handicapées. Selon le Code pénal, l’âge est un facteur de vulnérabilité, c’est pourquoi on parle également de maltraitance quand la personne a dépassé un certain âge. "La dimension de violence conjugale semble s’atténuer et ça devient un phénomène de maltraitance de personne âgée", précise-t-il, avant d’ajouter : "Pourtant, quand on regarde les situations pour lesquelles on nous appelle, il y a bien des femmes âgées victimes de maltraitance, au niveau familial, de la part de leur conjoint. Il n’y a pas beaucoup de différences avec les violences observées chez des femmes plus jeunes".
La violence s’installe-t-elle avec le temps ? Au mois de février, un homme de 72 ans a été condamné à 12 ans de prison pour le meurtre de sa femme, qu’il a tuée de 21 coups de couteau alors que le couple n’avait jamais connu de violences. "Pour nous, ce sont souvent des situations qui perdurent depuis longtemps", explique à Planet Pierre Czernichow, précisant : "Ce n’est pas très fréquent qu’il y ait des formes de violence conjugale qui apparaissent à 70 ans et qui ne se sont pas manifestées avant. Si c’est le cas c’est souvent lors d’un changement de conjoint". Si on sait que ces violences conjugales existent au-delà d’un certain âge, pourquoi n’intéressent-elles personne ?
Violences conjugales : "Tout se passe comme si ça relevait de la sphère privée"
Les maltraitances et les féminicides envers les femmes âgées restent à l’arrière-plan, alors même que la société avance sur ces questions. "Tout se passe comme si ces phénomènes de maltraitance, notamment intrafamiliaux, relevaient de la sphère privée et que donc la société n’a pas à s’en occuper, que ça serait une sorte d’ingérence", souligne Pierre Czernichow, concluant qu’il y a "un degré de tolérance qui est assez élevé" sur ces questions.
Pourtant, selon le président de la Fédération 3977, il y a certains signes qui ne trompent pas chez nos proches, nos voisins ou nos amis : "Il faut faire attention aux changements. Quand vous voyez un changement récent, important, chez quelqu’un, dans sa façon de s’habiller, dans ses habitudes, sa façon de parler, ses mimiques même, ça peut être le signe qu’il s’est passé quelque chose chez cette personne et ça pourrait être des situations de maltraitance". Il peut également s’agir d’idées noires, d’une forme de mutisme, d’une baisse d’attention voire même d’un sentiment d’abandon.
Si on a repéré ces signes chez une personne de notre entourage, quelle est la première chose à faire ?
Violences conjugales : "Lorsqu'on n'en parle pas, ça continue"
La première chose à faire est d’en parler. "Lorsqu’on n’en parle pas, ça continue", résume Pierre Czernichow, précisant : "Quand quelqu’un est maltraité chez lui, il n’y a aucune raison que le phénomène s’arrête, sauf si une intervention amène à ce qu’on en parle, à ce qu’on amène le sujet sur la table". En parler donc, et à n’importe qui. "La force d’une personne qui maltraite c’est le secret. Si ça commence à être connu, si on en parle en famille etc. vous verrez très souvent ces phénomènes s’arrêter tout seul, car celui qui mis en cause comprend que ça n’est plus possible", ajoute le président de la Fédération 3977, avant de conclure : "Dans les cas les plus graves, si vous n’en parlez pas personne ne le saura et il ne se passera rien", conclut-il.