De nouvelles règles d’indemnisation entreront en vigueur en avril 2025 et impacteront durement les plus âgés.
Madeleine, 87 ans, a eu une vie bien remplie. Avec son époux, décédé en 2011, elle a eu 4 enfants, et elle est devenue au fil des années l’heureuse grand-mère de 11 petits enfants. Mais depuis la mort de son mari, le quotidien de la vieille dame a radicalement changé. Et si elle reçoit toujours, de temps à autre, sa famille dans son pavillon de la banlieue parisienne, les journées lui semblent d'ordinaire bien mornes, et la maison, bien vide.
Cette solitude, certaines personnes mal intentionnés ont d'ailleurs cherché à en profiter, aux malheureux dépens du portefeuille de Madeleine.
Depuis plusieurs années, en effet, la grand-mère est victime de ce que l’on pourrait appeler des abus de faiblesse, de la part de nombreux démarcheurs à domicile.
A chaque fois, le scénario se répète ; ils sonnent chez elle, elle leur ouvre et engage la conversation, poliment. “Comme je vis seule, cela me fait toujours plaisir de parler à quelqu’un”, nous raconte Madeleine. “Et à chaque fois, ils me font comprendre que je dois absolument faire tel ou tel changement dans ma maison”.
Trois chèques de 800 euros pour "l'entretien du toit'"
Une première fois, il y a environ trois ans, un homme se présente comme un expert de la toiture. Il lui assure que son toit est en sale état. “Il m’a expliqué pendant de longues minutes qu’il fallait absolument le nettoyer avec un produit spécial, sinon, il risquerait de s’abîmer encore plus. Et l’entretien devrait être fait, selon lui, très vite, avant l’hiver!” Crédule, et inquiète, Madeleine cède. L’artisan de fortune lui facture la prestation 2400 euros. Elle lui adresse le jour même trois chèques de 800 euros.
Une somme considérable pour cette retraitée, qui laisse d’ordinaire ses enfants gérer ses comptes.
Quelques jours plus tard, c’est son fils qui fait la terrible découverte en examinant ses relevés bancaires. “Il m’a appelé pour me demander de quoi il s’agissait, et je lui ai raconté. Je me suis faite gronder”, tonne Madeleine, honteuse.
Les quatres enfants de la veuve se concertent, inquiets, et décident de lui parler. “Nous lui avons dit qu’elle s’était fait avoir, et qu’il ne fallait plus qu’elle ouvre à personne, et encore moins qu’elle laisse les démarcheurs à domicile la convaincre”, nous explique sa fille, Sylviane.
Cette dernière va essayer de retrouver la trace du démarcheur en question, mais impossible. “Ce sont des chèques, effectués à l’ordre d’une société étrange que je n’ai pas pu retrouver”, poursuit l’unique fille de Madeleine.
Le tour des fenêtres à 1500 euros
Surtout, les enfants ignorent quel type d’entretien a vraiment été réalisé sur le toit. “On n’a jamais vraiment vu ce qui avait été fait, ni le produit qui avait été utilisé. Ça n’a donc servi à rien, c’était vraiment une arnaque”, s’agace Sylviane.
La mésaventure aurait pu rester un incident isolé. Mais Madeleine, hélas, n’a pas pu s’empêcher d’ouvrir à nouveau sa porte.
Quelques mois plus tard, un autre démarcheur sonne chez la grand-mère. “Cette fois, c’étaient mes fenêtres qui avaient un problème, selon lui. Il fallait refaire les bordures impérativement.” Pour ses travaux, effectués dans l’heure qui suit, il facture 1500 euros.
La vieille dame règle sans broncher. "Ça avait l’air sérieux”, rapporte-t-elle.
A nouveau, ses enfants sont interpellés par cette dépense en épluchant les comptes de Madeleine. Les remontrances reprennent de plus belle. “On sait que notre maman est têtue… Et qu’elle ne se rend pas forcément compte qu’on cherche à l'arnaquer, elle ne voit pas le mal. Mais là, c’est inquiétant. C’est de l’abus de faiblesse”, explique Sylviane.
La famille pense à porter plainte, mais une fois de plus, il est impossible de retrouver la trace de l’artisan.
La peinture de la boîte aux lettres pour 900 euros
Une fois de plus, Madeleine se retrouve avec des consignes strictes : on n’ouvre à personne, on ne parle pas aux démarcheurs… Mais rien n’y fait. Au début de l’été 2022, elle s’est à nouveau laissée séduire par l’offre d’un visiteur.
“Il m’a proposé de repeindre ma boîte aux lettres pour 900 euros. Sur le coup, ça me semblait une bonne affaire. Mais je n’ai aucune idée de ce que ça coûte vraiment”, précise la vieille dame.
La transaction est réalisée, la boîte est repeinte sommairement. Et Madeleine est à nouveau sermonnée par ses enfants.
Au total, la grand-mère s’est fait délestée en quelques mois de près de 5 000 euros.
Ses enfants soupçonnent même qu’il puisse s’agir d’un seul et même groupe d’arnaqueurs. “Ils ont vu que ça marchait pour la première fois, alors, ils sont revenus, peut-être était-ce le même type sans qu’elle ne s’en rende compte!”, s’indigne Sylviane.
Depuis ce dernier épisode, l’octogénaire tente de suivre à la lettre les recommandations de ses proches.
Dernièrement, pourtant, Madeleine a dévié : elle a laissé un homme rentrer chez elle et examiner son jardin. “Il m’a dit qu’il pouvait faire quelques travaux de jardinage qui paraissaient importants. Mais bon, cette fois, je lui ai dit que j’en parlerai à mes enfants d’abord !”.
Du progrès, donc.