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Ils sont les victimes oubliées de Tchernobyl. Le 26 avril 1986, le réacteur numéro 4 de la centrale ukrainienne explose durant un test de sûreté. Il est 1h23 et le monde ne sait pas encore que la plus grave catastrophe nucléaire du XXe siècle vient de se produire. Il faudra plusieurs jours pour que la population aux alentours, les pays voisins et les membres de l’Union européenne soient informés de ce qu’il vient de se produire.
Tchernobyl : combien de victimes au total ?
Construite dans les années 1970, la centrale se trouve à proximité de la frontière avec la Biélorussie et a fait sortir de terre la ville de Prypiat, qui loge alors les employés du complexe nucléaire. La centrale de Tchernobyl a donc seulement 16 ans au moment de la catastrophe et le réacteur en cause n’était en service que depuis trois ans. Les différentes études menées bien apès la catastrophe ont souligné plusieurs dysfonctionnements importants pour expliquer les événements, notamment un problème avec le système d’arrêt d’urgence et l’inexistence des contrôles de sûreté.
Aujourd’hui encore, c’est aussi la gestion post-accident qui pose question. Les pouvoirs publics de l’époque sont accusés d’avoir minimisé l’accident et d’avoir évacué les populations trop tardivement. Ils ont aussi sacrifié plusieurs dizaines d’hommes, chargés de ramasser les débris radioactifs avec des équipements dérisoires. Beaucoup ont développé des cancers et sont morts dans les années qui ont suivi leur exposition.
Si ceux que l'on appelé les "liquidateurs"et les pompiers ont été reconnus comme les premières victimes immédiates de la catastrophe, des enfants nés peu de temps après l'explosion du réacteur nucléaire ont été oubliés dans le décompte officiel. Nés dans les années qui ont suivi l’explosion de parents exposés aux radiations, ils s ouffrent de graves malformations, de handicaps moteurs ou mentaux, mais aussi de cancers, de leucémies et de problèmes de thyroïde. Un photographe a documenté leur quotidien.
Tchernobyl : des enfants malformés ou atteints de cancers
Il est quasiment i mpossible d’obtenir un bilan officiel des victimes de Tchernobyl, tant la question fait débat. Un comité officiel ne reconnaît qu’une trentaine de morts, tandis que le groupe scientifique réuni par l'Onu évalue le bilan à une cinquantaine de morts ayant subi les effets directs de la catastrophe essentiellement des pompiers et opérateurs, et "plus de 4000" décès indirects liés aux suites de l'explosion. En 2016, le président ukrainien affirmait pourtant que "le nombre de personnes tuées ou devenues invalides se chiffre malheureusement à des centaines de milliers".
Parmi elles, de nombreux enfants. En 1990, l e photographe Wojtek Laski est le premier à documenter le calvaire des "enfants de Tchernobyl", nés quelques mois ou quelques années après l’explosion du réacteur numéro 4. Il parcourt les hôpitaux de Biélorussie, à la rencontre des soignants et de ces enfants qui présentent diverses malformations. Il photographie un bébé de quelques mois né sans son bras gauche, une petite fille née sans lèvres et une autre sans regard, accueillis dans un centre spécifique. Dans un autre hôpital, il rencontre de nombreux enfants atteints de cancers et de leucémies.
Dans un livre paru en 2019, Kate Brown (Tchernobyl par la preuve ; vivre avec le désastre et après, traduit chez Actes Sud en 2021)– professeure au Massachusetts Institute of Technology – revient sur ces problèmes de santé : "L’été 1986, les registres notent une forte hausse des complications à la naissance, des bébés nés avec des malformations, ou qui meurent dans le mois (…) Avant l’accident, 80% à 90% des enfants étaient répertoriés comme "en bonne santé" ; après, en 1987 et 1988, seuls 10% à 20% le sont. Le nombre de cancers explose environ 18 mois après l’accident, des leucémies, des cancers de la thyroïde chez les enfants". Que sont devenus ces survivants ?
Tchernobyl : les séquelles des enfants
Les enfants photographiés par Wojtek Laski ont entre 35 et 40 ans en 2024 et on ne sait pas ce qu’ils sont devenus. D’autres nés bien des années plus tard prés entent encore des malformations, des cancers ou des problèmes de thyroïde. Comme l’expliquait Paris Match en 2016, "les autorités locales constatent les séquelles de la catastrophe nucléaire sur les jeunes générations". Certains, qui sont nés et ont grandi dans des zones exposées, sont accueillis dans un centre de rééducation près de Minsk (Biélorussie), où ils bénéficient de traitements.
Sans chiffre officiel, il est impossible de saisir le pourcentage de ces malformations et maladies liées à l'explosion du réacteur. La sortie d'une série télévisée produite par HBO et diffiusée sur OCS et M6 en 2019 avait relancé la polémique sur les circonstances des événements, Moscou ayant décidé de produire sa propre série. Au-delà des rumeurs, des spéculations les plus folles et des peurs liées à la catastrophe, le véritable bilan de Tchernobyl reste à faire.