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C’est un groupe islamophobe qui prend de l’ampleur en Allemagne, obligeant la chancelière Angela Merkel à sortir du silence. Baptisé "Pegida" (acronyme allemand de "Européens patriotes contre l’islamisation de l’Occident"), ce mouvement descend chaque lundi dans la rue pour protester contre "l’islamisation de la société". Dernière manifestation en date, celle qui a fait descendre quelques 18.000 personnes dans les rues de Dresde, dans la Saxe. Un succès intriguant au vu de la jeunesse de ce groupe, formé au mois d’octobre.
D’où vient Pegida ?
Né à Dresde, dans l’Est de l’Allemagne, le mouvement est fondé au mois d’octobre dernier par un certain Lutz Bachmann, graphiste et photographe de 41 ans. Est-il connu des services de police ? Oui, le quadragénaire est passé plusieurs fois par la case prison pour des affaires de vols à main armée, de cambriolages ou encore de trafic de cocaïne. Indigné après avoir vu un reportage rapportant des heurts entre des salafistes et des kurdes ans les rues teutonnes, il a appelé à une marche contre l’islamisme.
Celle-ci a lieu le 20 octobre et a regroupé quelques 500 personnes venues protester contre l’islamisation, les djihadistes et les étrangers qui ne se fondent pas de moule de la culture germanique, menaçant donc selon eux la "culture chrétienne allemande". Le groupe s’est par ailleurs octroyé le slogan scandé sous la RDA : "Nous sommes le peuple" ("Wir sind das Volk !"). La pratique de la manifestation hebdomadaire se réunissant chaque lundi est également empruntée à l’histoire locale.
De 500 à 10.000 personnes
Comme le rapporte Libération, ces petites marches islamophobes ont vite rencontré leur public. Très vite, le nombre de manifestants a enflé allant jusqu’à 10.000 personnes réunies chaque lundi. Parmi le foule, une population assez hétérogène. Des jeunes, des vieux, des femmes, des enfants et quelques néonazis ou membres du NPD (parti d’extrême droite allemand) tentant de surfer sur le succès de cette expression anti-islam.
Alors, comment expliquer un tel développement ? "Pegida est né du fait qu’une partie importante de la population se rebelle contre un développement sur lequel on ne l’a pas consultée et qui n’a jamais été débattu : le fait que l’Allemagne devienne une terre d’immigration" explique le politologue allemande Werner Patzelt à Libération. De surcroît, géographiquement, cette zone de l’Est de Allemagne est propice au développement de ce genre de thèse. En effet, la Saxe a souvent été le fief du NPD et observe actuellement une hausse du parti eurosceptique AFD rappelle L’Obs. Mais au-delà, un sondage cité par L’Express signale que près d’un Allemand sur deux dit voir Pegida avec sympathie.
Le contexte peut expliquer en parti le succès de cette irruption islamophobe. Depuis 2012, l’Allemagne connaît une vague d’immigration à tel point que le pays s’est hissé à la deuxième place du classement des terres d’accueil des pays de l’OCDE, juste derrière les États-Unis. Une flux de migrants estimé à près de 400.000 personnes, toujours selon l’OCDE. À titre de comparaison, en France ce chiffre était de 258.000 pour la même année. Une sorte de bouleversement dans la conscience politique des Allemands a ainsi pris racine outre-Rhin.
Toutefois, ils sont tout aussi nombreux en Allemagne à ne pas partager cette vision alarmiste vendue par Pegida et dont les rangs sont pénétrés par les extrémistes. Ainsi, lundi 6 janvier, une importante vague pro-immigration s’est soulevée sur l’ensemble du territoire brandissant des pancartes "Bienvenue en Occident". Et dans dans la grande majorité des villes, les anti-Pegida étaient les plus nombreux. A Hambourg, le mouvement anti-islamophobe s’est par ailleurs baptisé "Tegida", dont l’acronyme signifie "Européens tolérants contre la crétinisation de l’Occident".