Face à la montée des cyberattaques, le FBI et la CISA recommandent d’arrêter d’envoyer des SMS entre utilisateurs d'iPhone et d'Android. Un conseil qui ne vise pas seulement les Américains mais tous les...
Nous sommes le lundi 2 novembre, Juliette*, étudiante, entre dans le métro parisien à la station Rome vers 21 heures. C’est alors qu’un homme "pas très grand, bedonnant, des lunettes, propre sur lui, l’air gentil et honnête" l’aborde en lui demandant s’il peut passer le portique du métro avec elle "Parce que j’ai pas d’argent pour payer un ticket" lui dit-il. La jeune femme accepte, et l’homme continue avec une autre requête : "Est-ce que vous voulez bien accepter de m’écouter, s’il vous plaît, je suis agent immobilier, j’ai passé une journée abominable, j’ai un très très gros problème".
Sa technique : se faire passer pour un homme qui a tout perdu et solliciter la compassion
Juliette accepte et l’homme commence son récit. "Il vient de Besançon, il est venu à Paris pour acheter un appartement, il s’est fait enlever sa voiture à Courcelles, évidemment son portable ses papiers, ses moyens de paiement, tout est dans sa voiture, il n’a aucun moyen de les récupérer et personne ne peut venir l’aider. Comme il n’a rien sur lui, il ne sait pas du tout comment il va faire pour dormir ce soir" rapporte Juliette.
"J’ai une petite fille vous savez […] elle doit beaucoup s’inquiéter"
L’homme continue et fait jouer la corde sensible : "Aucun parisien ne veut m’écouter, vous êtes très gentille de bien vouloir m’écouter, j’ai une petite fille vous savez, si vous avez encore votre papa vous devez savoir qu’elle doit beaucoup s’inquiéter…".
Pensant que l’homme est vraiment en difficulté, Juliette lui demande comment elle pourrait l’aider. La réponse ne se fait pas attendre : "J’aurais besoin que vous me prêtiez un peu d’argent" déclare l’homme en précisant "je vous le rendrai dès demain".
Pour achever de convaincre la jeune femme, il va plus loin : "Je ne suis pas un nécessiteux, je suis agent immobilier, je gagne 6000 euros par mois, donc l’argent n’est pas un problème pour moi" lui affirme-t-il.
"Je lui explique que je suis étudiante, que c’est compliqué, que je vais peut-être être à découvert si je lui prête de l’argent" nous raconte Juliette, mais l’homme insiste, déclarant être "de bonne foi" en promettant lui rembourser les frais liés à son découvert. "J’ai juste besoin d’aide, ça aurait pu arriver à n’importe qui, ça aurait pu arriver à votre papa" lui dit-il, finissant par convaincre Juliette.
"Si vous ne le faites pas de bon cœur, reprenez votre argent Mademoiselle"
La jeune étudiante poursuit son récit : "Je l’accompagne au métro Courcelles et je lui demande ‘Mais Monsieur, il vous faudrait combien ?’ Il me dit ‘Ça ferait à peu près 80 euros pour l’autoroute et 150 euros pour la fourrière, donc en arrondissant, il me faudrait 250 euros.’ Là, je commence à blêmir, je lui dis que 250 euros, je ne peux pas. Il me répond ‘que ce soit 250 ou 600 euros, vous aurez tout votre argent dès demain’".
Le prétendu agent immobilier prend soin de noter les coordonnées de sa sauveuse, lui donne un (faux) nom et promet de la recontacter dès le lendemain. Il l’accompagne donc à un distributeur et laisse la jeune femme retirer l’argent "sans rester derrière [elle] ni regarder [son] code".
"Je tire les 250 euros, je lui donne, et il me remercie chaleureusement. Il me fait la bise en me disant ‘vous êtes quelqu’un de bien’". A ce moment-là, Juliette a un doute, l’homme le sent, lui demande si tout va bien et l’invite même à revenir sur sa décision : "Si vous ne le faites pas de bon cœur, reprenez votre argent Mademoiselle, il ne faut pas que vous vous sentiez forcée". La jeune femme laisse partir l’homme avec son argent mais très vite, sent qu’elle a fait une erreur. "J’avais vraiment une sensation de flou, de ne pas avoir été moi-même pendant ce moment-là" décrit-elle "il y avait une part de méfiance mais c'était tellement bien ficelé... et une partie de moi avait vraiment envie de l'aider".
Bien entendu, l'homme ne l'a jamais rappelée pour la rembourser.
Le retour de l’arnaqueur du métro parisien ?
Juliette a contacté la rédaction de Planet.fr car son histoire lui a rappelé une affaire dont nous avions fait écho en 2013, celle de l’arnaqueur du métro parisien. Selon la jeune femme, le procédé que nous rapportions correspond à celui dont elle a elle-même été victime.
Lire aussi : L'incroyable histoire de l'arnaqueur du métro parisien
L’homme dont il était question dans notre article, un retraité dépendant aux jeux qui escroquait les jeunes femmes depuis une vingtaine d'années, a été jugé et condamné à 12 mois de prison dont huit avec sursis en décembre 2014, comme le rapporte France TV Info. "Il attaque toujours le même genre de jeunes filles"
Que Juliette soit tombée sur ce même malfaiteur ou qu’il s’agisse d’un autre homme empruntant le même procédé, force est de constater qu’un arnaqueur rôde toujours dans le métro parisien. "Apparemment, il attaque toujours le même genre de jeunes filles, entre 20 et 30 ans, qui ont l’air un peu fatigué, moi j’avais passé toute ma journée en réunion" analyse-t-elle.
Une arnaque sans recours ?
Juliette nous a raconté "pour l’anecdote" que la police a refusé de prendre la plainte d’une autre jeune femme qu’elle a rencontrée au commissariat. Cette dernière avait subi la même mésaventure qu’elle, un homme l’avait abordée aux alentours de la Sorbonne avec la même histoire et lui a soutiré 400 euros. La plainte de la jeune femme n’a toutefois pas été reçue au motif qu’elle avait donné l’argent de son plein gré. Juliette, qui n’a pas encore eu le temps de déposer plainte, compte bien se faire entendre quitte à "taper du poing sur la table". Elle compte faire valoir les multiples témoignages identiques au sien qu’elle a lus sur des forums afin de donner du poids à sa plainte pour que celle-ci aboutisse. "On a du mal à être prises au sérieux" déplore-t-elle, même si la police connait le dossier.
Quant à l’escroc, Juliette aimerait qu’il "essaie de gagner sa vie honnêtement". "Il prend à des petites jeunes, c’est de la lâcheté, de la malhonnêteté. J’espère qu’il ne l’emportera pas au paradis et que la justice fera son travail" conclut-elle.
* Le prénom a été modifié.
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