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Les événements ukrainiens de la semaine passée suscitent nombre de débats et d’interrogations, notamment sur l’avenir, plus qu’incertain, de la stabilité politique du pays. Les répressions violentes, parfois sanglantes, des mobilisations pro-européennes à Kiev sont tout autant de preuves de la panique généralisée qui semble s’animer au sein de la sphère présidentielle et gouvernementale. Bien que Laurent Fabius ait infirmé la théorie du "coup d’état" avancée par Mykola Azarov, le Premier ministre ukrainien, la similarité des événements avec la Révolution orange de 2004 n’en reste pas moins de mise. Motion de défiance contre le gouvernement rejetée par le parlement ? L’idée n’en a pas moins été fortement envisagée. Alors que la mobilisation ne faiblit pas, lumière sur cette décrépitude latente sur fond russo-européen.
Kiev écartelée entre Bruxelles et Moscou
Le 21 novembre dernier, alors que la ratification d’un accord de libre-échange et d’association entre l’Union Européenne et l’Ukraine s’apprêtait, cette dernière jette l’éponge. En cause selon elle : une problématique exclusivement économique, et le pays d’écarter la thèse d’une quelconque manœuvre stratégique. Bruxelles ne l’entend pas de cette oreille, et a impliqué Moscou, dénonçant des pressions qu’aurait exercées le Kremlin sur le gouvernement ukrainien. Une hypothèse vivement décriée par Vladimir Poutine, qui a sommé l’Union de cesser leurs "commentaires acrimonieux". Kiev est venu infirmer cette affirmation, en reconnaissant quelques jours plus tard une intervention Russe dans la décision d’abandon du projet d’accord. "Il nous a été dit clairement : nous sommes prêts à examiner avec vous et l’UE touts les problèmes, mais vous reportez la signature de l’accord, nous discutons, nous nous mettons d’accord et après vous signez », déclara alors Viktor Ianoukovytch, actuel président d’Ukraine. Et le président Russe de reconnaître à demi-mots ces faits, en qualifiant de "trahison majeure" les actes d’accords en pourparler.
"Aurions-nous dû consentir à étrangler des pans entiers de notre économie pour leur plaire ?" a-t-il alors renchéri. L’homme d’Etat fait référence aux étroites relations économiques entretenues par les deux pays, vestige de l’Union Soviétique, voyant notamment le quart des exportations ukrainiennes convoyer vers son grand frère moscovite. Car nombre de leurs liens dus au soviétisme sont encore d’actualité. Et le pays d’observer une scission entre deux camps : ceux de la pérennité des liens avec la Russie, et ceux de l’ouverture vers l’Ouest. Bien que le détachement de l’URSS ait été plébiscité par 90% des voies en 1991, certains secteurs, notamment agricoles, revendiquent l’importance prépondérante des échanges avec le voisin russe.
Cette problématique est le vecteur de vives contestations au sein de la sphère politique. Et pros et antis de se déchirer, affaiblissant l’exécutif. Bien que Bruxelles reste ouverte à de nouveaux accords, Kiev entend accéder à un "niveau confortable" de négociations avant de signer. Un oui pou un non.
Dans la rue : des vestiges de 2004
Cette décision a été vécue comme une véritable trahison par la population pro-européenne. L’indignation a très vite entraîné de nombreuses manifestations aux chiffres toujours plus grandissants, jusqu’à atteindre les 100 000 participants. Les cortèges grondent de plus en plus, et se rapprochent ostensiblement des institutions, jusqu’à investir, le 2 décembre dernier, les entrées du siège du gouvernement. Accusant une légitimité et une autorité affaiblies, Ianoukovytch n’a alors d’autre choix que de réprimer les rassemblements au moyen d’une violence radicale propre aux états policés. Les blessés se comptent par centaines, les vidéos diffusées dans les medias sont sans équivoques : Kiev perd son sang froid.
D’autant plus que ces événements, initialement motivés par l’abandon des accords, résonne avec les événements de 2004, nommés "Révolution orange". Les deux mêmes protagonistes : le peuple vengeur, et Viktor Ianoukovytch. A l’époque, le peuple s’était soulevé afin de protester contre l’élection de l’homme à la présidence du pays, alors que les sondages annonçaient unanimement vainqueur son opposant, Viktor Iouchtchenko. Accusant des fraudes, l’élection avait finalement été renouvelée après l’annulation du scrutin. Ce tollé avait d’ailleurs sonné le premier véritable rapprochement entre l’Ukraine et l’UE. Ianoukovytch, soutenu par le Kremlin, avait finalement accédé à la présidence en 2010. Ainsi, bien que le mouvement Révolutionnaire semble s’être éteint, les valeurs qu’il défendait, démocratiques et pro-européennes, semblent perdurer. "Une mobilisation autour d’une idée et non pas autour d’un leader", estime Ioulia Shukan, spécialiste de l’Ukraine à l’université Paris-Ouest.